David Copperfield est un de mes meilleurs souvenirs d'enfance…. Et un des pires. Un des meilleurs parce que c'est grâce à ce merveilleux roman que je suis entré dans l'univers de Dickens. Un des pires, parce que ce livre pour lequel j'avais une affection particulière a été égaré avec une bonne partie de mes bouquins d'enfance, lors d'un déménagement. J'avais à peine 14 ans, et déjà j'avais un rapport quasi charnel avec l'objet-livre, sa forme sa couleur et même l'odeur de sa reliure. Alors, les copains, si vous trouvez un jour chez un bouquiniste ou dans une brocante, un «
David Copperfield rouge, avec une illustration représentant un petit garçon assis sur une malle, et les indications suivantes : «
Charles Dickens –
David Copperfield – Adaptation de
Marguerite Reynier – Illustrations de
Pierre Noury - Ernest Flammarion Editeur Paris » (indications retrouvées sur internet), c'est peut-être le mien…
Dickens, comme d'autres auteurs « classiques » adoptés pour la jeunesse, a beaucoup compté pour des générations d'enfant : David,
Oliver Twist, Pip (de «
de grandes espérances », Mr Pickwick, Scrooge (du « Conte de Noël » … tous ces personnages nous ont accompagnés, relayés ensuite par le cinéma, la télévision, ou la BD. Et pourtant, si l'on regarde bien, ces romans qui ont des enfants pour héros (les trois premiers, en tous cas) ne paraissent pas destinés à un public enfantin (comme Cosette et Gavroche, du reste) : leurs aventures, souvent tragiques, peuplées de malheurs, de personnages malfaisants, de maladie, de mort, sont d'un réalisme souvent très dur. C'est peut-être ici qu'il faut rendre hommage à ces adaptateurs (particulièrement à ceux-ci, des années 60 ou 70, qui travaillaient avec leur tête et leur coeur, sans aucune aide extérieure, sans informatique, ni intelligence artificielle pour les aider) qui ont réussi à nous initier ainsi aux grands classiques, avec intelligence et humilité, (la même remarque vaut également pour les dessinateurs).
David Copperfield, orphelin de père, vit heureux avec sa mère Clara et sa servante Peggotty. Clara se marie avec Mr Murdstone, sinistre et cruel personnage, flanqué de sa soeur Jane, en tous points pareille à lui. Envoyé en pension, David fait la connaissance du joyeux Tommy Traddles et du brillant et énigmatique James Steenforth. A partir de là tout s'enchaîne : Clara meurt, Peggotty se marie et part, David quitte la pension et se voit obliger de travailler à Londres. Les malheurs et les contrariétés s'accumulent. Son logeur, l'inconséquent mais sympathique Micawber est arrêté pour dettes avec toute sa famille. David est recueilli par sa tante Betsey Trotwood, aussi sèche et raide d'aspect qu'affectueuse et dévouée pour son neveu. Il loge à présent chez un avocat, Mr Wickfield, la fille de ce dernier dès leur première rencontre, voue à David un amour secret, mais passionné. Cependant les malheurs continuent : David ayant eu la mauvaise idée d'emmener Steenforth dans la famille de Peggoty (son frère Dan et son neveu Ham), le brillant mais machiavélique jeune homme enlève Emily, une nièce de Dan promise à Ham. David, devenu chroniqueur parlementaire et écrivain fait un mariage de convenances avec Dora, une femme-enfant, incapable de gérer sa vie, encore moins un ménage. Parallèlement un aventurier, Uriah Heep, ruine Mr Wickfield, et commence même à lorgner sur Agnès. Fort heureusement les amis de David (les vrais), Traddles et Micawber, mettent à jour la traîtrise de Uriah Heep et envoient ce dernier en prison. Dora meurt de maladie. Emily est retrouvée, Steenforth meurt en mer, mais Ham est de son côté lui aussi emporté par une lame. L'horizon s'éclaircit pour David qui peut enfin épouser Agnès
L'histoire peut paraître longue et embrouillée, mais grâce à une peinture parfaite des personnages, retient l'attention du lecteur de bout en bout. La raison essentielle tient à l'empathie profonde que met l'auteur dans son récit. Celui-ci, souvent sombre et tragique, le serait encore plus si Dickens n'amenait pas un regard compatissant sur ses héros, tempérant ainsi le réalisme de certaines scènes. L'humour est également présent dans cette oeuvre, à travers les portraits un peu caricaturaux (mais sympathiques) de certains personnages (Traddles et Micawber, en particulier, font penser à Mr Pickwick).
«
David Copperfield » a été maintes fois adapté au cinéma et à la télévision : citons la meilleure version, réalisée par George Cukor en 1935, avec Freddie Bartholomew en David enfant, Edna May Oliver en Tante Betsey,
W. C. Fields en Micawber, Basil Rathbone en Murdstone et Maureen O'Sullivan en Dora. En France, l'adaptation de Claude Santelli, réalisée par Marcel Cravenne en 1965 pour le Théâtre de la Jeunesse, fait figure de référence..