Pour apprécier cet essai, il faut d'abord franchir le premier chapitre, noir à souhait et probablement "pire que ce que vous croyez". Les conséquences des modifications climatiques dont l'humanité est au moins partiellement responsable sont apocalyptiques. Les collapsologues nous annoncent purement et simplement la fin de notre espèce.
le propos de
Cyril Dion dénonce le cercle vicieux de la croissance (on ne fabrique plus pour répondre comme autrefois à un besoin, mais pour vendre...), l'engrenage de la déconcentration mentale dans lequel nous entraîne la multiplication des tentations (internet et les tsunamis d'images que colportent les médias) et bien d'autres évolutions de notre mode de vie qui contribuent, via l'extinction des espèces et des ressources naturelles, à notre propre disparation.
Quand l'être humain prendra conscience qu'il n'a pas la nature à exploiter, mais que son sort et celui de la nature sont intimement liés, que son environnement n'est pas un décor mais le milieu sans lequel il n'existerait pas, alors il pourra construire un récit moins incohérent que celui qui l'a conduit à surexploiter la Terre et, finalement, à stériliser son potager. Mais cette vision globale et à long terme s'oppose à des intérêts puissants et de court terme.
Bien qu'il soit important pour la propagation du nouveau récit que chacun à son niveau renonce au superflu et veille à l'harmonie, il est évident que ce n'est pas par la juxtaposition des seuls engagements individuels que l'on modifiera significativement le comportement de l'humanité. le système démocratique pourrait-il aider ? L'auteur en doute, car les lobbies (intérêts à court terme) neutralisent et contrecarrent rapidement les aspirations des électeurs.
le mécanisme de la création monétaire est dénoncé en trois pages : il pousse à la consommation, il a besoin de la croissance et crée de la spéculation : le rein ne filtre plus, il fabrique du poison. D'autres mécanismes à l'oeuvre sont également dénoncés : l'emprise insidieuses des "outils" culturels (Hitler et Staline l'avaient compris ; les Américains également qui imposèrent leur industrie cinématographique dans les négociation du plan Marshall ...).
Nous avons tous entendu "il faut changer les mentalités et les comportements" en sachant pertinemment que le temps de réponse nécessaire pour que cela infléchisse durablement la politique mondiale est bien trop long par rapport à la vitesse actuelle de dégradation de notre biosphère. Alors que faire ? D'abord, s'inspirer de ce qui a fonctionné lorsque qu'une minorité a obtenu gain de cause après s'être organisée et avoir commencé par de petits pas. Ensuite, s'appuyer sur des actions mobilisant les émotions et la sensibilité, actions plus efficaces que celles mobilisant la connaissance approfondie et le raisonnement scientifique. Enfin, viser des objectifs suffisamment modestes pour avoir des chances d'être atteints mais, en même temps, assez visibles pour en entraîner d'autres. L'exemple de Gandhi qui s'est d'abord attaqué à la taxe britannique sur le sel avant de réclamer l'indépendance, et d'autres exemples viennent renforcer cet argument.
Satish Kumar, en citant
Martin Luther King,
Nelson Mandela et
Greta Thunberg, tient le même propos.
Grâce à son ton mesuré et au socle documentaire sur lequel elle s'appuie (une bonne centaine de références bibliographiques), cette lecture interroge sans nécessairement convaincre. Elle sera particulièrement utile à la jeunesse qui, parce qu'elle peut être inquiète, voire angoissée en face de l'avenir, doit impérativement poursuivre la réflexion sur ce thème vital et trouver une issue au labyrinthe dans lequel nous sommes empêtrés.