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160 pages
Regain (01/01/1963)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Deuxième recueil de poèmes de Bertin B. Doutéo, publié en 1963 à Monte-Carlo par les éditions du Regain, dans la collection des « Cahiers des Poètes de Notre Temps ». Il rassemble cinquante-deux poèmes composés entre 1953 et 1955 et a été achevé lors d'un séjour à Bouaké. Illustré par Henry Auger, d'après des dessins de l'auteur.
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« Sont-ce les vacances ? »

Sur nos toits, sur ceux de là-bas,
Le ciel morne verse déjà
Des langueurs
Et des pleurs !
Au bahut, la rouille fait grincer
Des volets et des pupitres les charnières,
Tandis que la mousse ouvrière
Dans les bouquins se met à pincer
L'oubli
Sans répit.
Dans les cours verglas et silence
En perpétuelle audience
Chargent sans cause un dortoir muet,
Une salle, un triste chevalet !

L'abeille a déjà son essaim
Dans le verger au sein
Du vieux manguier,
L'herbe qui bouillonne
Dans les sinueuses allées,
L'insecte qui papillonne
Dans l'inerte cheminée
Traduisent bien les vacances
Avec impertinence !
Aucune âme qui vive dans les classes,
Dans ces classes jadis vouées aux ivresses.
Sont-ce déjà les vacances ?
Où sont-ils tous les oiseaux ?
Sont-ils tombés dans l'eau
Par folle imprudence ?

Jadis, quand ils guettaient le bahut
Que les études transforment en prison,
Ils venaient habiter ma maison
Qui s'accommodait à leur chahut.
Où sont-ils ces frêles arbrisseaux ?
Sont-ils noyés dans le ruisseau ?
Au bahut, la rouille fait grincer dur
Des volets et pupitres les charnières,
La poussière ternit les murs,
Le rat languit dans la cuisinière,
Pourtant je n'entends
Point de ces moineaux volages les cris.
Sont-ils tombés dans un étang
Après un insecte, un petit cri-cri ?
Ont-ils préféré la musique de quelque villa
Au bruit de ma douce pétaudière ?
Je voudrais les revoir, ces gars
Dans le badinage de mon ornière.
Sont-ce déjà les vacances ?
Où sont-ils tous les oiseaux ?
Sont-ils tombés dans l'eau
Par folle imprudence ?

L'on dit qu'ils sont innocents
Comme au ciel les anges,
Doux comme les petits agneaux
En extase dans la grange
Cependant que leurs tours méchants
Font entrevoir les tombeaux.
Sont-ce déjà les vacances,
Temps de sotte vengeance !
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« Valseurs éphémères »

À la dernière heure
De la vie qui leurre,
La fleur quitte la feuille
Qui chute de la tige
Lentement s'endeuille
Puis au néant voltige.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !

À la caresse du zéphyr
S'éteint tout désir
Mollement au sillage
De l'oubli qui voltige
Aux accords volages.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !

À la voix de l'étreinte,
Gens et choses sans plainte
Modulent des complaintes
Au morne et dernier matin
Au chemin du destin.
Dansez poussières !
Dansez comme des poussières
Valseurs éphémères !

L'oiseau et l'abeille
En quête de butin,
À la valse s'éveillent
Ne sachant où faire pause
À la valse des lutrins,
Fête morose.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !

Grain par grain la bise
Soulève la montagne
À tête grise
Solitaire en campagne
Qui valse sans répit
Au chemin de l'oubli.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !

Valse aussi sous l'arbrisseau
Le gai et doux ruisseau
Qu'égare de son cours
Le rocher qui s'en va à tour
Molécule par molécule.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !

Valseur diabolique
De la voûte cosmique
Le trépas chute de vertige
Sur l'homme, dernier vestige
Lui clos les lèvres,
Le fait cadavre
À la valse des ivres.
Dansez poussières !
Dansez comme des chimères
Valseurs éphémères !
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« Chanson des vagues »

L'Océan s'étale dans le lointain
Cachant dans ses flots le mystère.
Soucieuse, elle s'accroche à mon bras d'airain
Sanglote et pleure sa misère.
L'Océan s'agite
Son cœur palpite.

Sur la grève, la vague qui s'allonge
Prise de fureur, se tord, se casse.
Devant le drame, dans mon cœur plonge
Le doute noir qui crie de détresse.
Soucieuse, son cœur frémit
Blessée, la vague gémit.

Dans ce hameau où la mer crie,
Mon cœur sur mes lèvres s'évanouit
À vertigineuse allure de cascade
Qui pleure dans ses ballades.
Angoissée, elle s'accroche
À mon cou de roche.

La déesse descendue sur plage,
La mer fascinée cesse ces clameurs.
Tous les oiseaux venus à la nage
Entonnèrent une ode en son honneur.
Grâcieuse, elle se balance
Amoureuse, la mer danse.

À l'appel de son nom, les cieux entonnèrent
Au rythme des vagues, une sérénade
Que les lames, le sable, interprétèrent
Tout doucement en tendre aubade.
Mon cœur connut un déchirement
Continu, sans apaisement.

Le temps est d'argent sur cette grève
On s'amuse, on s'oublie, car on rêve.
Son charme a gagné l'Univers
Je lui dédie ces vers !
Au cri des bravos
Les morts sortirent des tombeaux.

Après tant de grâce, elle a gagné sa cabane.
Devenu vieillard et m'appuyant sur ma canne,
J'ai sangloté comme une veuve sans soutien
Ayant perdu à tout jamais l'entretien
Des jours de délice où sa tête sur ma poitrine
A fait retentir d'espoir ma narine.

Les belles choses ont de commun l'inconstance
Les nuits troubles font naître la somnolence.
La douceur des lunes appartient à d'autres.
Je ne serai du souvenir, que le fidèle apôtre.
Mon cœur serré comme dans un étau,
Connut de douloureux coups de rabot.

Une nuit que je me débattais avec mon âme,
J'entendis comme un ouragan le sinistre tam-tam.
Le jour succédait au jour et déjà
L'écho colportait ailleurs et là-bas
La rumeur irrévocable de son union
Avec son autre Amour Dynion.

Oui ! Je me souviens
Encore de nos liens.
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« Mélange sanguin »

À mes pieds, hypocrite, mystérieux, perfide,
Le sinistre Océan étale ses eaux sournoises et limpides
À l'interminable et diabolique clameur,
Chez nous riverains, symphonique terreur.

Lugubre, insatiable, il se dresse altier
En dauphin, seigneur, empereur fougueux,
Fait des veuves dans les hameaux côtiers,
Crée de tristes tableaux langoureux.

Pleure-t-il seulement le nombre
De marins dans ses flots engloutis ?
Ses tristes exploits dans l'ombre
Rendent plus méchant son sournois clapotis.

Son fatal écho vient gémir au hameau
Qui par contagion, se fait de la mort le héraut.
Partout, d'ignobles cabanes prêtes à crouler,
Des ruines graves de choses et d'animaux mêlés.

La présence humaine est d'or en ce lieu,
Par moments, une vieille ou un vieux
Qui n'attendent plus que le gong brutal
Sont les seules figures de ce lieu fatal.

Voici longtemps que les masures sont muettes,
Œuvre de la vétusté dans le temps accomplie.
Sur leurs flancs qui s'effritent, point d'espérance,
Elles s'en vont miettes par miettes sans répit.
Elles se dressent en rempart contre l'adolescence,
Le passé et les sombres mouettes.

L'on n'y voit point des punaises les frêles squelettes.
Est-ce qu'elles se cachent pour mourir ?
A-t-on besoin pour finir
De tant de farces, de tant de saynètes ?

Entre le village pensif et l'Océan rageur,
Le cimetière est là, grave, sauvage
Adossé à l'oubli, éclos de fleurs
À l'interminable mouvement de tangage.

On dirait qu'elles ventent ceux qui reposent
Là depuis, les lèvres à jamais closes.

Les tombes ne portent point d'épitaphes.
Chez nous, les légendes en tiennent place
Quand, inattendue, tragique, la glace
De la mort vient grêler le cœur philosophe.

L'Océan taciturne, le morne village
Et le cimetière font là un triste étalage.
Au tendre bébé il faut un doux berceau,
À notre dépouille un morne tombeau.
S'il faut au petit oiseau la graine
Pourquoi pas au cimetière la gangrène ?
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« Langoureux vestiges »

Où sont-elles les nuits de mon île,
Les nuits de mon île au léger babil ?
Mon âme se consume, se consume sans espoir !
Le dépaysement est une mélancolie
Avec l'abattement dans le gris et le noir,
Aux grincements des tristes mélodies.

Aux grincements des vagues mélodies,
Vents qui mugissez, où sont-ils
Les soirs anciens, les soirs chéris de mon île ?
Grelets ! petits grelets ! vous qui flûtez
Du sein des fourrés, silence ! Écoutez !
Où sont-ils mes crépuscules d'antan ?
Sont-ils noyés dans le temps ?

Aux grincements des tristes mélodies,
Nuages ! Vous du ciel méchant les paravents,
Où sont-elles les tendres nuits envolées ?
Vous allez et vous venez au gré des vents,
Mais est-ce là toute votre destinée ?
Répondez, sombres phénomènes !
Pourquoi me faire des scènes ?

Phénomènes et météores, pourquoi impertinence
À l'appel de ma voix, de ma voix qui s'élance ?
Vous qui portez l'oubli, jusque dans vos chants,
Qui frôlez de la mort le pied exigeant,
Sont-ce vos clameurs, ces cris de là-bas ?
Sachez que vous ne m'effrayez pas !
Entendez-vous bien, entendez-vous vents ?
Aux grincements des tristes mélodies,
Où sont-elles les nuits de mon paradis ?

Danseuses étoiles ! Vous du ciel les aînées,
De la sombre terre les maîtresses,
Voici cette nuit mon âme en détresse !
Aux accords des tristes chants,
Dans le tombeau ou dans l'ouragan,
Où sont-elles les nuits cachées ?

Vainement je les cherche : mon front se ride,
Se ride profondément. Est-ce que le ciel est vide ?
L'espérance fugace qui de cause s'est plu
À m'écouter, à sa façon, m'a répondu :
— Homme angoissé ! Que cherches-tu dans la plaine
À te fondre le cerceau, à te rompre les veines ?
Pleures-tu la trace d'une amie fugitive ?
Pourquoi cette nuit sereine, ton âme plaintive ?
L'existence, c'est tout ce qui grignote l'âme.
La vie est un géant métier à tisser
À fragiles fils de trame.
Le problème est de pouvoir s'y glisser.

Je ne recherche point la gloire encore moins une amie !
Le son de mon tam-tam n'est pas mondain
Car, de vos ballades à travers la vie,
Le seul gain, c'est l'étonnant réveil soudain
Et l'usure qui, tard, fait songer au repos.
Je ne viens point m'éparpiller en vain écho.

Je m'effare de ne point retrouver
Les doux enfants de mon île !
L'espace vient tout entraver.
Je les revois encore,
J'entends leur voix sonore :
Ils venaient souvent chez moi à la file,
Simples, doux, pareils à toute chose pure.
Leur fidélité est bouclier et diaprure.

La distance masque tout dans le noir !
Je languis aussi de ne plus revoir
De mon île, se lever comme une fée,
La lune, au son du léger babil,
De ne plus entendre les aveux sacrés,
Les causeries, les serments fertiles,
Naître, flotter aux lèvres des dunes,
Et gaîment frissonner la marine !

Nombre de malheurs sont de la part du méchant.
Mon âme est desséchée comme la paille des champs.
Chaque nuit, ma couche est remplie de mes larmes.
Et mon cerveau à ce bruit inquiétant des lames.
Aux grincements des tristes mélodies,
Où sont-ils les soirs anciens de mon paradis ?
Au son des langoureux accords,
Où sont-elles de mon île, les nuits d'alors ?

Je suis ivre de vertige !
Revenez vieux vestiges !
Revenez dès l'aurore !
Revenez encore,
Choses ailées,
De sitôt envolées !
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