Bichette Cournot courait à travers le siècle comme un pauvre plésiosaure, échappé d'un muséum. Elle était de feu, mais les hommes fuyaient ses étreintes démesurées. De là, grande neurasthénie. Comme personne ne s'occupait d'elle, elle se croyait toujours seule ; à la table des Barbinais, elle en venait à gratter par moments, par-dessus la soie de sa robe, ses longs seins en peau de serpent.
Il acheva son verre. Il paya. Il sortit. Dehors c'étaient les Champs-Elysées, les flaques de lumière, les glaces infinies. Des autos, des femmes, des fortunes. Il n'avait rien, il avait tout. Le whisky et la drogue se poursuivaient et se chevauchaient en vagues brûlantes et froides, mais régulières. L'habitude. Au fond, un rythme tranquille.
- Dubourg, sortons ensemble ce soir. Nous téléphonerons à une amie de Lydia qui est assez belle.
- Non, ce soir j'écrirai deux ou trois pages sur mes Egyptiens, et je ferai l'amour avec Fanny. Je descends dans son silence comme dans un puits, et au fond du puits, il y a un énorme soleil qui chauffe la terre.
Les drogués sont des mystiques d'une époque matérialiste
J’aimerais mieux mourir que crever.
Figurez-vous que je suis un homme ; eh bien, je n'ai jamais pu avoir d'argent , ni de femmes. Pourtant, je suis très actif et très viril. Mais voilà , je ne peux pas avancer la main, je ne peux pas toucher les choses. D'ailleurs, quand je touche les choses, je ne sens rien
Le suicide, c’est la ressource des hommes dont le ressort a été rongé par la rouille, la rouille du quotidien. Ils sont nés pour l’action, mais ils ont retardé l’action; alors l’action revient sur eux en retour de bâton. Le suicide, c’est un acte, l’acte de ceux qui n’ont pu en accomplir d’autres.
Les regards ne l’atteignaient plus : il ne s’occupait plus de plaire, pas plus aux femmes qu’aux hommes ; il avait plu.
Et il retombait toujours dans les mêmes groupes d'oisifs. Ceux-là commencent à se droguer parce qu'ils ne font rien et continuent parce qu'ils peuvent ne rien faire.
Désintoxiqués nous nous retrouverions tels que nous étions auparavant: désespérés.