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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Annie Ernaux revient sur son parcours personnel, ce qui a déterminé son entrée dans le monde de la littérature. Au travers de différents entretiens avec la réalisatrice Michelle Porte qui a réalisé un documentaire sur elle en 2011, elle porte un regard plein de tendresse sur son milieu familial et social.
Elle vient d'un milieu simple, comme elle aime à le rappeler. Ses parents venaient d'un milieu ouvrier et tenaient un bar épicerie en Normandie.
Elle évoque longuement sa motivation pour les études et la fierté de ses parents de la voir réussir dans la vie.
Une réussite qui sera aussi la cause d'une fracture sociale comme le souligne l'auteur: son père, même s'il est fier d'elle, reconnaît qu'elle a en quelque sorte "trahi" son milieu d'origine; comme il le dit par ces mots si terribles : "Les livres c'est bon pour toi, moi je n'en ai pas besoin pour vivre."
Annie Ernaux va rester malgré tout, comme elle le dit, une fille de la terre et une fille de la province, même si l'essentiel de sa vie adulte va se dérouler en région parisienne et notamment à Cergy-Pontoise.
Les personnalités de ses parents, telles qu'elle les décrit, sont très attachantes: le père doux avec ses enfants, la mère, une femme de tête qui avait une réelle vénération pour les livres.
Elle revient ensuite sur ses succès littéraires, le Prix Renaudot pour son roman "La Place", les années d'Education Nationale qui lui ont inspiré le remarquable "La femme gelée", l'engagement pour la cause des femmes, que l'on retrouve dans "Les armoires vides" , ses romans où elle intègre dans l'Histoire l'existence d'une femme ("Les années").
Au coeur de son engagement pour la cause des femmes et pour la littérature, c'est l'affirmation d'une femme fidèle à elle-même et à ses idéaux.
Un ton authentique.
Un livre à lire absolument pour ceux qui veulent découvrir cette auteure ou ceux et celles qui, comme moi, en sont une inconditionnelle.
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Je n'ai pas eu besoin d'attendre son prix Nobel de littérature pour lire et aimer l'oeuvre d'Annie Ernaux.
Une fois de plus je suis sous le charme avec ce livre judicieusement intitulé "Le vrai lieu" qui est celui de l'écriture pour la première femme française nobelisée.
C'est avec grand plaisir que je retrouve Michèle Porte pour ces entretiens car elle excelle dans ce domaine. Déjà avec Marguerite Duras j'avais été séduite par ses questions laissant la parole à son interlocutrice. Elle est présente et on le sent mais sait s'effacer dans ses films où on ne la voit jamais à l'image.
Dans sa maison de Cergy où elle se sent à sa place, Annie Ernaux raconte la nécessité d'écrire.
Issue d'un milieu social modeste, elle devient professeure agrégée de lettres modernes. Elle commence à écrire dans les années 1960 en s'inscrivant dans la mouvance du nouveau roman alors que les mouvements de femmes des années 1970 vont constituer un moteur, une incitation à écrire. Mais c'est quand elle questionne son vécu, son avortement clandestin ou la mort de sa mère par exemple qu'on la reconnaît.
Annie Ernaux dit que l'écriture n'est pas une activité miraculeusement séparée des autres. C'est une chose de tout à fait solitaire en pratique mais qui a forcément des liens avec l'époque et avec les autres personnes qui écrivent. Cette idée on la retrouve dans ses livres notamment dans "Les années" dont elle parle beaucoup dans ces entretiens. Elle précise qu'écrire c'est descendre dans la réalité sociale, la réalité des femmes, la réalité de l'Histoire de ce que nous avons vécu de façon collective mais au travers de ce qu'elle a vécu personnellement.
Cette écriture-là me touche profondément.


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Fluide et passionnant, j'ai adoré !

J'ai presque eu l'impression que c'est à moi qu'Annie Ernaux parlait.
L'entretien permet une spontanéité de paroles qui permet de toucher au plus près la pensée d'Annie Ernaux. Elle évoque plusieurs de ses livres, ses buts, son rapport à la littérature, à la réalité, à l'autofiction, et bien sûr, à l'écriture.

A lire :)
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Dans un film documentaire achevé en 2013 puis diffusé sur France 3, Annie Ernaux parlait de son métier d'écrivain au cours d'un entretien avec Michelle Porte. Dans de longues réponses très détaillées et très intéressantes, l'auteure révélait quantité d'informations permettant de connaître au plus près le travail d'écriture qu'elle mène avec beaucoup de talent.
Il était absolument indispensable de fixer tout cela par écrit, ce que "Le vrai lieu" réalise avec un intérêt supplémentaire puisque l'intégralité de ces entretiens filmés est retranscrite. Elle qui avait beaucoup de peine à parler de ses livres reconnaît finalement : « Dire ce qu'est pour moi l'écriture, j'y arrive un peu plus. Parce que, si on me pousse dans mes derniers retranchements, c'est tout de même là où j'ai l'impression d'être le plus. Mon vrai lieu. »
C'est à Cergy, près de Paris, qu'elle a écrit tous ses livres, sauf les deux premiers rédigés en Haute-Savoie. Bien qu'elle vive aux portes de la capitale, elle assure : « Je suis restée une fille de la terre par mes parents, une fille de la province aussi avec les jardinets autour des maisons. »
Son enfance et sa jeunesse, elle les a passées dans le café-épicerie de ses parents, à Yvetot mais ses études et la voie qu'elle a choisie lui font penser sans arrêt qu'elle est, en fait, un transfuge de classe. Elle qui a appris le beau langage à l'école, ne renie pas le patois du Pays de Caux car « le langage d'origine fait corps avec nous, vraiment. »
Elle parle beaucoup de ses parents : « Ma mère était une femme violente, très autoritaire… Les lois religieuses gouvernaient sa vie… C'était une femme flamboyante… qui portait haut le savoir. Mon père était doux. » Adolescente, elle était en lutte avec elle dans le domaine sexuel et avoue : « elle se comportait en gardienne, gardienne de mon corps. »
Au fil des confidences, elle cite ses principaux livres et explique les changements de style, de ton. "Les armoires vides" parle de son avortement et son écriture est violente. "La place" est plein d'une violence rentrée. "Une femme" est consacré à sa mère. "Les années" traite du temps qui passe, de cette évolution incroyable de 1950 aux années 2000.
Annie Ernaux affirme enfin haut et fort : « Je ne suis pas une femme qui écrit, je suis quelqu'un qui écrit. » et précise plus loin : « Qu'on soit homme ou femme, c'est l'origine sociale qui détermine. » Dans ce lieu immatériel qu'est l'écriture, elle excelle et "Le vrai lieu" est une belle occasion de faire connaissance avec cet écrivain et donne encore plus envie de lire ses livres.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Annie Ernaux est l'une de mes autrices préférées, et ce depuis ma lecture de la Place, des Années et surtout depuis le visionnage du documentaire de Michelle Porte, Les mots comme des pierres (grâce auquel j'ai découvert Annie Ernaux, une révélation). le vrai lieu est la retranscription de ce documentaire.

Ici, on retrouve la genèse des textes d'Annie Ernaux. Elle expose son rapport à la lecture, à l'écriture (tout comme Cris Peri Rossi, l'écriture est sa maison, son "vrai lieu"), sa sociabilité difficile, son transfuge de classe, ses parents, son arrivée à Paris et à Cergy. Annie Ernaux me parle, toujours. Elle parle de sa vie tout en nous parlant à nous, je trouve ça formidable. Son rapport à Paris, par exemple ; elle se sent toujours à la marge, en banlieue, jamais légitime d'habiter la capitale.
L'écriture est toujours dénuée de toute fioriture ; et pourtant, qu'est-ce qu'elle est puissante !
En somme, cette retranscription des entretiens avec Michelle Porte représente le manifeste de toute l'oeuvre d'Annie Ernaux. Tout ce pourquoi j'aime cette autrice, toute sa trajectoire, tout son vécu, toute sa vie qui me fascinent tant. La vie "découverte et éclaircie", selon les dires de Proust. Annie Ernaux représente cet éclaircissement. L'écriture avant tout...

Le vrai lieu restera l'un de mes livres de chevet, je m'y replongerai avec bonheur pour repenser des pans de ma vie et pour me retrouver dans une définition de la lecture et de l'écriture qui me parle tant (les livres lus au cours de notre vie en disent long sur nous, l'écriture de l'indicible qui devient politique, par exemple).
Un coup de coeur, un régal, un bonheur ! Et surtout, merci Annie Ernaux ! 💜
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Quand on connaît l'oeuvre d'Annie Ernaux, on dévore ces entretiens à travers lesquels l'auteure se dévoile.
Elle dit être toujours dans « l'entre deux » et c'est peut-être là l'essentiel.
Avant sa vaste maison de Cergy, isolée, tournée vers l'Oise, son principal lieu d'écriture depuis des décennies, il y a eu Yvetot où ses parents tenaient le café-épicerie, un commerce qui l'a privée d'intimité : « on vivait au milieu des gens et sous le regard des gens ». A Yvetot les différences sociales sont marquées, au café elle côtoie la misère sociale, à l'école privée elle découvre la bourgeoisie. Son enfance est également troublée par des évènements familiaux. Ce premier monde a laissé une empreinte chez elle. En effet, elle dit être une transfuge de classe dont la maison de Cergy est bien la métaphore, si l'acquisition du savoir intellectuel va de pair avec une distinction sociale, une « discrétion corporelle », elle a conservé des gestes brusques, marqueurs sociaux de son premier monde. Elle souligne se sentir gênée dans des situations mondaines « comme si je n'étais pas à ma vraie place, que j'étais là sans être réellement là ». Et elle s'est gardée de toute domination par l'écriture.
Pourquoi écrit-elle ? L'écriture est son « vrai lieu ».Elle écrit en tant qu'être humain, non comme femme. Elle écrit pour sauver des choses, elle dit ressentir le besoin de témoigner parce que cela s'est passé et d'écrire dans le vif. Annie Ernaux souligne l'importance de la construction qui crée un autre temps que le temps vécu.L'écriture n'est pas une confession. Et de conclure : « La littérature n'est pas la vie, elle est ou devrait être l'éclaircissement de l'opacité de la vie ». Quand le lecteur se dit « moi aussi », la lumière se fait en lui.

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Je découvre Annie Ernaux à travers cet échange entre femmes. Que dire mis à part la joie de se reconnaître dans l'histoire d'une transfuge de classe. Cet ouvrage donne envie de découvrir toute l'oeuvre autobiographique d'Annie Ernaux. Je n'ai jamais autant pris de notes et relever autant de phrases, si vraies, si bien choisies. le prix Nobel est à mon sens mérité entièrement. Il y a tant de citations que j'ai envie de reprendre, je crois que son oeuvre m'aide à mettre des mots sur une kyrielle de sentiments et de phénomènes. Retenons seulement ces deux phrases : "C'est par l'école, et surtout les livres que j'ai acquis le français légitime, correct, le beau langage” et “La littérature peut rendre heureux”.
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