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65 pages
FATON EDITIONS (28/03/2023)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Entretien avec Isolde Pludermarcher, conservatrice générale peinture au musée d'Orsay, et Stéphane Guégan, conseiller scientifique auprès du Président des musées d'Orsay et de l'Orangerie, commissaire de l'exposition Manet Degas au musée d'Orsay.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
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« Il vous faut la vie naturelle, à moi la vie factice. On devrait fusiller les peintres qui plantent leur chevalet en plein air ».

Curieux personnage cet Edgar Degas ! surprenant propos ! Heureusement que ses amis avant-gardistes connaissaient l'humour de celui qui participait à toutes leurs expositions des peintres impressionnistes. Leur crédo était justement le plein air, la lumière changeante, la vibration de l'éphémère.
Pour Degas, le paysage n'est vraiment pas son truc ! Il ne supporte pas la peinture en plein air, en dehors de la fréquentation des hippodromes et des chevaux. Ce qui l'intéresse est le dessin. Il recherche la forme héritée des grandes traditions antiques et conçoit la peinture comme une construction intellectuelle : « Faites des lignes… Beaucoup de lignes, soit d'après le souvenir, soit d'après nature », lui disait Jean-Auguste-Dominique Ingres, qu'il admirait.
Degas détonne parmi ses amis qui, malgré tout, ne lui en veulent pas de parler ainsi. Il affirme avec bon sens : « Cela ne signifie rien l'impressionnisme. Tout artiste consciencieux a toujours traduit ses impressions ». À l'observation de la nature, Degas oppose l'exercice de la mémoire et l'imagination uniquement en atelier. Ce qu'il aime le plus : les rampes artificielles éclairées des théâtres, des cafés-concerts, des beuglants, du cirque, des boudoirs discrets des maisons closes. Il ne cesse de croquer des danseuses en mouvement dans des scènes de ballets parisiens. Il les traque, les capture partout. Il ressent également beaucoup de plaisir à pasteller les femmes à leur toilette.

Un autre grand peintre, Édouard Manet, a, lui aussi, un goût modéré pour le grand air. Ses toiles les plus impressionnistes sont réalisées durant l'été 1874, l'année de la première exposition du groupe, dans le jardin de son ami Claude Monet où il se retrouve avec Renoir, les deux peignant la femme de Monet, la jolie Camille, assise avec son fils Jean allongé contre elle.
Manet a une obsession : réussir par la voie officielle alors que le jury du Salon le rejette systématiquement chaque année. Ses « Déjeuner sur l'herbe » et « Olympia » ont été conspués par les critiques, mais il ne se décourage pas et se représente chaque année au Salon dans l'espoir d'être accepté par ses pairs. Les « refusés », ses amis impressionnistes, ne comprennent pas son refus de participer à leurs expositions.

On peut se demander pourquoi Edgar Degas et Édouard Manet sont définis comme « Impressionnistes » alors qu'ils vont à l'encontre des théories de ceux-ci. Ces deux peintres sont proches intellectuellement et esthétiquement, ce qui les agace parfois. La même génération : naissance dans les années 1830. Leur milieu social et culturel est semblable : la grande bourgeoisie parisienne. Ils se seraient connus au Louvre, par hasard, devant des toiles de maîtres. Régulièrement, ils se réunissent au café Guerbois aux Batignolles où ils retrouvent un groupe d'avant-gardistes composé d'artistes et écrivains. Édouard Manet en est la vedette depuis ses esclandres dans les Salons qui l'ont rendu célèbre. Les discussions sont animées, on s'échauffe, on échange diverses théories sur l'art, sur le métier, dans un choc d'opinions perpétuel.

Parmi tous les peintres brillants de l'avant-garde, Degas et Manet affirment leur différence par leur conception de la peinture moderne. Une rivalité s'installe et leur relation est complexe. Ils s'admirent, pourtant une toile « Monsieur et madame Manet » de Degas va causer une importante fâcherie entre ces deux artistes essentiels des années 1860 – 1880. Venu chez Manet, Edgar Degas le saisit dans une étrange attitude : vautré dans un canapé, jambe droite repliée, une main dans la poche et l'autre soutenant son visage pensif. Sa femme Suzanne joue du piano face à lui. Amicalement, Degas fait don du tableau à Manet, mais ce dernier, estimant sa femme enlaidie, découpe la toile pour faire disparaître cette « déformation des traits de sa chère Suzanne ». Degas, très en colère, reprend son oeuvre déchirée et lui renvoie une nature morte.

La femme du peuple et la bourgeoise sont les thèmes qui rapprochent les deux peintres : femmes du monde, blanchisseuses, couturières, modistes, prostituées.
Ils peuvent se mesurer l'un à l'autre dans la thématique des scènes de café et de café-concert. Les mêmes modèles sont parfois utilisés. La comédienne Ellen Andrée pose à un an d'intervalle pour eux dans une vision différente. Sur la toile « Dans un café » de Degas, une femme est attablée devant une absinthe au côté d'un homme, les deux apathies, abrutis par l'alcool. Manet montre Ellen Andrée dans « La prune ». La femme est avachie sur une table, seule face à un verre d'eau-de-vie dans lequel une prune trempe. Vêtue d'une jaquette rose, le regard mélancolique, elle suit des yeux les clients, ou ses clients, car une femme seule au café est suspecte.

Malgré leurs divergences amicales avec les peintres impressionnistes, Degas et Manet vont arriver parfois à des résultats peu éloignés de ceux de Monet et ses amis : recherche de couleurs lumineuses, dissolution des formes, effets spontanés, touche libre.
Degas sera très affecté par le décès de Manet auquel il survivra d'une trentaine d'années.

Plus que quelques jours pour découvrir la brillante exposition Manet-Degas qui se tient au musée d'Orsay jusqu'au 23 juillet.

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Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
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Il y a deux siècles, j’aurais peint des « Suzanne au bain », je ne peins que des femmes au tub.

Edgar Degas

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