On pourrait dire de ce roman qu'il est une version moderne de la tragédie
grecque, tant ce qu'on appelle le destin est inéluctable dans la vie des
personnages. Il y a quasiment unité de lieu et de temps. Quant à l'action, elle se resserre autour des deux protagonistes principaux, comme un étau dont le mécanisme ne permettrait plus de le desserrer.
Maben et sa fille avancent, tant bien que mal, sur les routes de Louisiane, avec pour horizon un centre d'accueil qui a existé autrefois, si la mémoire de Maben est bonne. Elles marchent, tombent, se relèvent, au gré des rencontres pas toujours bonnes qui ont jalonné la vie de la jeune femme. On découvrira peu à peu son parcours, quel fut le tournant terrible pris par sa vie, un beau soir où, pourtant, tout semblait lui sourire.
Russell sort de prison, rentre chez lui et commence par se heurter de plein fouet à deux frères qui l'attendent, patiemment, pour se venger de la mort de leur petit frère, dont Russell est responsable.
La rencontre de ces deux-là, qui portent sur leurs épaules tous les malheurs du monde, va à la fois boucler une boucle et ouvrir peut-être une perspective plus lumineuse. L'alcool, la drogue, la violence font partie de leur univers et malgré une volonté farouche de s'en sortir, ils ont toujours le poids d'une fatalité qui les malmène, tels des insectes qu'on remet sur le dos dès qu'ils se sont remis à l'endroit.
Leur horizon se heurte à l'image qu'ils ont d'eux, faible, impuissante, et pourtant Maben et Russell ont chacun à leur façon, une âme pure. C'est peut-être ce qui leur permettra de ne pas disparaître encore, malgré le désir de certains. L'écriture de l'auteur donne à voir des personnages dans leur plus simple appareil, si l'on peut dire : langage, gestes, actions, tout nous paraît vrai, nous parle, nous touche.
Les paysages, écrasés de chaleur, humides de la dernière pluie d'orage, dans la moiteur de la nuit, ont quelque chose d'hallucinant.
On avance dans cette histoire comme si l'on marchait ou roulait aux côtés de Maben et Russell, on éprouve, et c'est rare, de l'empathie pour ces adultes encore jeunes dont la vie a volé en miettes à cause, finalement, d'un comportement banal à pleurer : Russell avait trop bu, et l'accident qu'il provoque enclenche la machine à broyer.
Tragédie grecque ai-je dit au départ, mais peut-être pas absolument. En effet, deux personnages vont prouver que l'espoir est permis : la petite fille de Maben, Annalee et le flic Boyd, ami d'enfance de Russell. L'un, Boyd, permettra la rédemption, et l'autre, Annalee, aura la chance de trouver ce qu'elle réclame , à savoir se poser, se reposer, et grandir, aller à l'école, devenir une petite fille comme les autres.
Roman poignant, saisissant, dont on peut penser qu'il dit de manière assez
universelle la douleur de vivre.
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Très bon moment de lecture.
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Un roman noir à l'américaine qui se lit très bien. Des personnages attachants et d'autres moins. Une noirceur omniprésente et un très bon moment de lecture. Recommandé.
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Un excellent roman que j'ai dévoré en un rien de temps !
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