Fiction, n°300

L'HOMME QUI N'AVAIT
AUCUNE IDÉE
Thomas M. Disch



Thomas Michael Disch a surgi tel un météore dans l'univers de la science-fiction en 1962 avec une nouvelle intitulée. The double timer publiée dans Fantastic. Depuis, son immense talent et sa profonde originalité, qui le tiennent à l'écart de toute mode et de tout courant, ont fait de lui un écrivain apprécié dans le monde entier dont la réputation s'étend bien au-delà du cercle restreint des amateurs de science-fiction. D'ailleurs, peut-on encore vraiment parler de science-fiction à propos d'une nouvelle comme L'homme qui n'avait aucune idée ? Ce récit à la fois tendre et amer, ironique et introspectif, offre un parfait exemple de ce dont Thomas M. Disch est capable. Rappelons, avant de vous abandonner à votre lecture, que Patrice Duvic a réalisé une fort intéressante interview de cet auteur publiée dans les numéros 88 et 89 de GALAXIE (septembre-octobre 1971) et que George Barlow lui a consacré une étude pertinente parue dans FICTION n° 247 (juillet 1974) sous le titre de La cage de Thomas l'incrédule.



Tout d'abord, il avait supposé avoir échoué. Hypothèse fort raisonnable puisqu'il avait gaspillé sa première chance en n'obtenant que 43 points. Mais deux semaines plus tard, la Commission des Examens ne lui ayant toujours pas écrit, il se dit qu'il n'était peut-être pas recalé. Il ne voyait guère comment cela se serait pu. L'examinateur, un vieux type très tatillon dont Barry avait immédiatement oublié le nom, s'était tout de suite montré hostile et agressif en lui disant qu'il trouvait sa poignée de main bien trop franche. En premier lieu, il avait orienté la conversation sur les graves dangers inhérents à de trop fortes insolations, manière indirecte de critiquer le bronzage estival de Barry et tous les loisirs que cela impliquait ; puis, il avait poursuivi en affirmant que selon toute probabilité les dauphins étaient aussi intelligents que les hommes. Entré dans la cabine résolu à jouer son va-tout avec la carte de la franchise absolue, Barry avait répondu que, premièrement il était trop jeune pour se tracasser à propos du cancer de la peau, et deuxièmement il ne s'intéressait pas aux animaux excepté sous forme de viande.