Louis, 18 ans, fils unique de Pascal, la quarantaine, ouvrier, qui l'a élevé seul, vient de suicider. A la faveur d'un appel sur le portable de Louis, Pascal va rencontrer, les unes après les autres, les personnes avec lesquelles son fils a été en contact régulier et qui le connaissent mieux que Pascal. Celui-ci découvre douloureusement à quel point il ignorait tout de son fils, taiseux, excellent élève et avec lequel il s'entendait bien même s'ils partageaient peu de choses.
Pascal mène une sorte d'enquête sur ce fils inconnu, en déroulant une pelote qui, à chaque interlocuteur, en révèle une facette différente et nouvelle. Il apprend, sidéré, que son fils était homosexuel, dealait, se prostituait et tournait dans des films porno mais qu'il a aussi aidé chacune de ces connaissances à aller mieux, à apprendre, à se découvrir.
Pascal ressent de la peine mais aussi une forte culpabilité de n'avoir rien vu et de n'avoir pu aider Louis. Cette rentrée littéraire nous offre plusieurs personnages de parents seuls, qui face à un drame qui touche leur enfant, se posent cette terrible question : "mais qu'est-ce que j'ai raté?". C'est le cas, entre autres, de Rosa dans "
Rosa Dolorosa" de
Caroline Dorka-Fenech, du père dans "
Ce qu'il faut de nuit" de Laurent Petit-Mangin.
Ce primo-roman est aussi une peinture sociale des Ardennes, de sa désindustrialisation, de sa paupérisation et des différences marquées entre les classes sociales; Louis est fils d'ouvrier et sa rage de sortir de son milieu en fera un élève brillant, ce qui ne suffit pas, mais aussi un délinquant cherchant à amasser le plus d'argent possible, le plus rapidement possible afin de partir faire ses études loin.
Ce roman, m'a rappelé, à nouveau, "
Ce qu'il faut de nuit" de
Laurent Petitmangin car ils présentent, tous deux, plusieurs points communs : un père ouvrier, militant, qui élève seul ses deux fils, dans une région, la Lorraine, fortement impactée par les problèmes économiques où les jeunes n'ont pas de perspective à part partir et qui découvre un fils aîné qui lui est inconnu.
Malgré la force dramatique du sujet, je n'ai pas été touchée par Pascal, qui mène son enquête rigoureusement, accumulant les informations, sans que j'ai ressenti la douleur qui le guide; je me suis sentie étrangère au parti pris de l'auteur de situer sa narration uniquement dans le registre familier même si la description des paysages ardennais donne lieu à des moments de poésie.