« Lorsque les souffrances deviennent insupportables ,
Les cris ne sont plus entendus.
Les cris, eux aussi, tombent comme la pluie en été » ….
BERTOLT BRECHT .
J'ai entrepris d'écrire ce livre quatorze mois après le meutre, quand le silence m'est devenu insupportable.
Après un suicide ou un meurtre, notre mémoire se transforme en maison hantée et le chaos envahit nos vies.
La victime, discrète, âgée, repliée dans sa maison des confins, était une invisible.
Puis, là-bas, au loin, ces tribunaux destinés précisément à juger ce pire, le Mastodonte obèse, la justice de masse, ses fonctionnaires mal payés, les tribunaux plus encombrés que les entrepôts d' hypermarché.
J'ai entrepris d'écrire ce livre quatorze mois après le meurtre, quand le silence m'est devenu insupportable.
« La lumière d’un été qui ne se décidait pas à finir, les effluves légèrement narcotiques des fleurs de lavande qui embaumaient sa cuisine , et pourquoi pas, les autres pièces de son pavillon de plain - pied sur le jardin , le plaisir qu’elle éprouvait à confectionner ses sachets —— elle projetait sans doute d’en offrir quelques - uns à ceux qu’elle aimait ——- ses dernières heures avant l’horreur , au moins ——furent paisibles, radieuses » ….
Quelle que soit son origine le silence est une agression.
Je dois aux livres ma victoire contre le silence. Ce sont des passeports. Ils abattent les murs, les remparts, les frontières, toutes les barrières que les humains ont inventé pour s'ignorer, se déchirer.
J'ai gardé une mémoire très nette de ce qui est arrivé mais le passé est une matière malléable et je suis comme tout le monde : sans m'en apercevoir, je recompose mes souvenirs, je les brasse, les façonne, les refaçonne. Il va falloir faire avec. Je suis cette mémoire, je suis ce passé.