En somme, dans la ville, ce samedi-là, la routine fait parfaitement son métier de routine, et la banalité son métier de banalité.
Les morts vivent constamment à nos côtés, nous accompagnent au quotidien; leur dernière demeure, davantage que leur tombe, est notre mémoire.
Je vais écrire sur Denise. Ecrire pour que la justice se mette à son tour à écrire. Des mots comme "crime", par exemple, au lieu "d'agression" et "meurtre" au lieu de "décès". Même si elle ne met pas la main sur le coupable, elle est seule à pouvoir laver nos vies du sang versé. Si la police a échoué, c'est à elle, la justice, de reprendre le flambeau. A elle d'agir, maintenant, à elle de dire, à elle d'écrire, à elle de remettre de l'ordre dans ce chaos. Il est simple, cet ordre, les humains le connaissent depuis la nuit des temps. Les vivants chez les vivants, les morts chez les morts.
Le crime est un langage, nous dit Poe, son message s'étale sous nos yeux mais notre perception est brouillée.
Page 108 « Le silence donne prise à l’imagination. »
le plus souvent, j’ai cheminé dans la pénombre. Rien n’a changé, j’y suis toujours, à tâtonner, espérer, désespérer. Voilà pourquoi j’écris.
Je dois aux livres ma victoire contre le silence. Ce sont des passeports. Ils abattent les murs, les remparts, les frontières, toutes les barrières que les humains ont inventées pour s’ignorer, se déchirer.
D'ailleurs, à quoi bon s'agiter ? Parce que le temps qu'ils trouvent le-type-qui-a-fait-ça... Encore heureux s'ils le trouvent, ils ne trouvent jamais.
Ces phrases là, le jour de l'enterrement, je les avais entendues dans le cortège qui nous menait au cimetière. [...] Le "ils" m'avait aussi amusée : par une étrange inversion linguistique, ce pluriel désignait plus les voyous mais les policiers.
Il y avait enfin l'inavoué : un meurtre de vieille dame, faut-il vraiment qu'on s'y arrête ?