Citations sur Mon désir le plus ardent (127)
J’ai fait tout ce que je pouvais. Épousseté les étagères les plus hautes avant d’être saisie de vertige, Atty me sidérant une fois de plus, proposant de finir à ma place tant mon anxiété était apparente. Il n’a pas arrêté de grimper sur son tabouret, nettoyant le dessus de la cheminée, les lampes. Il a détruit une énorme toile d’araignée dans un coin, même si, de son propre aveu, c’était un peu sa préférée.
– Elle ondule quand on ouvre la porte. Comme les vagues.
Je n’ai jamais été une ménagère modèle, et lever les yeux étant le meilleur moyen de déclencher le tournis, j’évite de le faire autant que possible. N’empêche : une toile d’araignée préférée ? Je ne m’étais pas rendu compte que les choses s’étaient dégradées à ce point.
- Il faut qu'on les prévienne, Dalt. Absolument, absolument, il le faut.
- De quoi, Mad? Les prévenir de quoi?
- Je sais pas. La vie.
- Combien elle est belle?
- Oui, voilà. C'est exactement ce que je pensais.
Il s'agenouille devant le fauteuil et me prend le menton, plongeant ses yeux dans les miens. Il faisait la même chose avec les enfants quand ils étaient petits. En temps normal, jamais je ne laisserais passer un truc pareil, mais aujourd'hui?
- Je les préviendrai, dit-il. De faire très attention au bonheur. Je leur dirai qu'il risque de les prendre par surprise, de leur couper le souffle, et qu'ils en voudront toujours plus. C'est ce que tu veux?
Ravagés. C’est le seul mot qui commence à s’en approcher. J’aimerais parler une langue étrangère, connaître un verbe que je pourrais conjuguer à l’infini. Je l’ai ravagé. Il m’a ravagée. On s’est ravagés.
Dalton nous pousse sur l'eau, et quand nous nous mettons à dériver, aucun de nous ne contrôlant les pagaies, je songe à combien cela ressemble à u mariage.
- C'est bête de cacher des choses, Mad. Crois-en ma vieille expérience. Ça ne marche pas. On fait du mal autour de soi. A la fin, personne n'est heureux. C'est un mauvais plan. Un très mauvais plan.
On va commencer le décompte de nos vies tout de suite. On a des décennies devant nous, Mad. Toi et moi, côte à côte, front contre front. Peau contre peau. Une vie entière.
- Mon désir le plus ardent, je répète, secouant la tête. C'est pathétique, non ? Il y a deux secondes, mon désir le plus ardent était d'attraper un poisson qui ridiculiserait le tien et ferait de moi la reine de ce raft. Et maintenant ton désir le plus ardent, c'est de franchir un vieux morceau de bois flotté en me portant, "une bonne chose de faite".
Ce sont peut-être les prémices d'une migraine. Selon ma mère, la crucifixion, à côté, c'est presque une partie de plaisir.
Ne nous laissons pas envahir par la peur au point de ne plus se parler. D’accord, Dalt ? Ce serait vraiment dommage. De laisser une maladie à la con nous faire ça.
Généralement, pour goûter à ce genre de privilège, il faut avoir la maladie de Parkinson. Ça porte même un nom, quand on n'a rien d'autre. La maladie de Dupuytren. Un Français, un bouffeur de grenouilles l'avait et en a guéri, enfin non, il n'en a pas guéri, on n'en guérit pas. C'est typique des Français, non ? Donner à une maladie le nom de quelqu'un qui a capitulé. Peut-on faire plus français que cela ? Tu te souviens de la Seconde Guerre mondiale ?