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« Bois de fer » résistance-écorce, Mireille Gagné vacille, se fissure. Ses jours déracinés après les tempêtes intérieures à cris et à pensées.
Mireille Gagné écrit l'ombre du végétal, le furtif d'un bourgeon qui éclot prêt à accorder la guérison plausible.
Elle marche dans la clairière des mots-mousse. le monde médical comme oreiller, le versant-vie mis à rude épreuve.
Bois de fer, « je voudrais tant devenir l'arbre miniature qui vient d'être planté chez les voisins pour remplacer celui qui faisait relever les bardeaux du toit...Parfois la jeune fille vient lui parler au retour de l'école. Que lui confie-t-elle ? »
L'écriture végétale est liante, spéculative, attendue jusqu'à la dernière feuille qui refuse la chute. Les paraboles sont signifiantes. « Les séismes s'enchaînent les uns après les autres. C'est peut-être dû au fait que je pousse sur du roc. »
Femme-arbre, confondue dans l'orée des bois, qui cherche de toutes ses forces et convictions l'orientation de ses regards-mêmes. Intuitive et dévouée, confiante, elle pressent ici, la fin de la chute d'Icare. le berceau qui couronnera sa renaissance.
« Il faut garder espoir qu'une partie de soi puisse être sauvée. »
la transaction est noble, écologique et poétique. Les fragments comme des morceaux d'étoiles accrochés aux branches invisibles. Elle quête et écoute. Dans les bois endormis qui craquent dans leur sommeil et répondent à Mireille Gagné, l'écho de ce qui persistera toujours.
« Leurs souches continuent de s'abreuver en nutriments et en eau grâce à leurs voisins. »
« Bois de fer » dont la dernière page ouvre la voie, l'essence de fer salvatrice : L'Ostryer de Virginie. Cet écrin poétique est la Canopée. Intime et vaste, lumineux et essentiel. le miracle du bois avec un B majuscule qui révèle le monde. Publié par les majeures éditions La Peuplade.
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Des poèmes mettant en scène une femme-arbre métaphorique qui tente de soigner son mal-être, ses angoisses et autres maux modernes, de se reconnecter à ses racines et de réapprendre à danser au gré du vent.

On y retrouve les thèmes et le style propres à Mireille Gagné, soit une poésie narrative créative illustrant la dissonance profonde qui existe entre nos modes de vie modernes et la nature qui nous entoure, de laquelle nous faisons pourtant intrinsèquement partie.

J'aime la poésie de Mireille Gagné, originale et toujours limpide. J'ai aimé l'idée de la métaphore filée, même si le concept s'essouffle un peu par moment. J'aime son imaginaire et, surtout, j'apprécie le message nécessaire porté par son écriture. Une belle lecture!
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"Bois de fer", le petit dernier de Mireille Gagné, raconte l'espoir d'une guérison, le cheminement entre jeunes bourgeons et fils électriques entravant, l'inquiétude de l'élagage et du sempiternel retour des noeuds, l'accueil et la protection d'un nid de corneilles.

"Mon écorce tire entre l'omoplate et la clavicule."

Ce livre d'une petite centaine de pages mérite qu'on s'y attarde longuement. En entretenant une curieuse ambivalence sur la nature du narrateur, Mireille Gagné raconte l'espoir d'une guérison, son combat contre l'horizontalité et sa recherche de perspective(s). Chaque page est comme un morceau d'écorce, fait de crevasses et de sinuosités, toutes pleines de sens cachés. Patiemment, à force de relecture, alors que l'oeil s'use sur les phrases et en gratte la surface, dévoilant sa vulnérabilité, se révèlent de nouvelles essences...

"J'ai toujours cru que pour maintenir l'équilibre une part d'ombre s'avérait indispensable."

Avec un recul qui pourrait presque s'apparenter à du détachement, ou bien une certaine forme d'innocence ou de fatalisme assumé - mais qui de fait nous arrache d'agréables sourires - sont abordées les thématiques de la maladie, de l'inconnu, et donc de l'inquiétude qui en résulte ("La douleur est ailleurs. Voire ne signifie pas toucher à l'essentiel" / "je crains que l'ennemi ne se cache déjà à l'intérieur"). le flou narratif entretenu tout au long du livre donne à ces passages graves une étrangeté légère qui bouscule la lecture et nous oblige à nous y arrêter un moment pour cerner les véritables questionnements de l'auteure, les démons qui lui tournent autour et dedans. Alors que la femme-arbre s'enfonce toujours plus profondément dans ses tourments, rongée par un envahisseur inconnu, un fragile optimisme émerge de ses nombreuses inspections et introspections, de ses confrontations avec les chiropracteurs et horticulteurs, de ses observations du microcosme alentour pour s'inspirer ici de la communication des acacias ou là de l'entraide des épinettes, pour peut-être y déceler une main-branche tendue ("Vus d'en haut, qu'est ce qui nous différencie des pylônes électriques? En apparence, eux se tiennent par la main"). Mais en s'interrogeant sur la pluralité du vivant, elle creuse avant tout profondément en elle-même, pour y déceler, dans le pli d'un organe abîmé, l'espoir "qu'une partie de soi puisse être sauvée", le voeu secret de devenir "ce bois de fer rare, impossible à fendre sous la hache".

Ainsi, en dévoilant ses failles et en exposant ses cicatrices, Mireille Gagné écrit un texte poignant à la beauté fragile, parcouru par le doute mais où l'espoir n'est jamais feint.

"Il faut garder espoir qu'une partie de soi puisse être sauvée"

A l'image de son somptueux roman "Le Lièvre d'Amérique", l'oeuvre de Mireille Gagné se construit sur deux constantes fortes : un lien singulier et indéfectible avec le vivant dans lequel nous nous fondons (au point d'être une femme-arbre, et avant cela une femme génétiquement amplifiée) ; et ce qui selon moi est le plus évocateur et rare : son absolue sincérité envers nos vulnérabilités/nos "altérabilités", qui donne à ses livres une puissance qui transcende l'espace et le temps, et résonne fort fort fort.
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« Heureusement, en de rares moments, mes feuilles s'alignent et me permettent d'entrevoir une trouée lumineuse. L'espace d'une fraction de seconde, un rayon de soleil jaillit et transperce l'inatteignable. »

122 fragments dans lesquels Mireille Gagné raconte une femme devenue arbre. Cette femme-arbre nous embarque dans son intimité et ses pensées. Elle assiste au déploiement de ses branches, aux étourneaux qui prennent place en elle, à son écorce dont les meurtrissures se creusent. Comme si les années passent subitement et laissent en elle une sorte d'anxiété.

« Voir ne signifie pas toucher à l'essentiel »

Elle essaie de traiter l'anxiété avec des thérapeutes dont les conseils mettent en lumière ce qu'elle cache sous son écorce et ça l'effraie. Il y a aussi ce conseil de la coiffeuse : « j'émonde les extrémités juste avant l'apport de sève - une coiffeuse m'a dit que ça aide à les fortifier ».
Mais l'anxiété est bien plus vaste : les élagueurs coupent ses arbres voisins, elle a parfois l'impression de déranger le monde du vivant. La dimension écologique est insidieusement installée dans les fragments.

Le lexique végétal est omniprésent et Mireille Gagné réussi à rendre plausible cette femme-arbre grâce à un savoir puissant sur les arbres et forêts. le langage est cru et nous ressentons une sorte de douleur, d'angoisse palpable, celle de perdre son essence même. La poésie se mêle au brut, donnant un combo inédit.
Ce livre mérite plusieurs lectures pour y saisir les subtilités nombreuses et les thématiques diverses comme la maladie, l'écologie, la souffrance mentale, l'être soi.
Comme souvent avec les éditions La Peuplade, c'est un livre qui se vit, qui ne laisse pas de marbre.

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Lors de la rentrée littéraire de 2020, un roman m'avait particulièrement marqué. le livre de Mireille Gagné, le lièvre d'Amérique, m'a complètement surprise et réjouie. Après avoir traité de notre animalité, l'autrice explore notre lien avec le végétal. Je me suis promené dans ce texte énigmatique, où le flou est maintenu sur la nature du narrateur, avec délice.

Une femme se métamorphose en arbre. Progressivement le végétal s'empare de son corps. L'écorce se durcit, les bourgeons éclosent et les branches se tendent vers le ciel. Les considérations médicales et arboricoles se mêlent. La narratrice observe ses transformations, se détache progressivement des soucis humains pour se fondre dans le végétal.

Composé de courts paragraphes, le texte joue avec les codes. Entre poésie et récit, entre texte écologique et fantastique, Mireille Gagné nous plonge dans une ambiance singulière où des odeurs de mousses humides et de bois morts nous montent aux narines. Elle nous propose une anthropomorphisme végétal saisissant qui dit à la fois l'urgence écologique et la condition féminine. L'arbre-femme est rongée par des parasites multiple, soumise à la volonté des hommes et de leur hache. Forte par la rudesse de son tronc mais néanmoins vulnérable par son immobilisme, elle prend conscience de son ambivalence face à la finitude. Plane sur le roman l'angoisse de la déchéance, du déclin. Alors que court sur elle des champignons et des maladies végétales, le narratrice se demande comment pourrait se soigner, comment lutter avec des armes inégales.

L'écriture fragmentaire fonctionne comme les pensées de la narratrice qui se bousculent dans sa tête. Des images, des angoisses et des fragments de vie se mêlent les uns aux autres tel des rhizomes. Au fil du roman, le corps se délite, les branches se brisent mais l'espoir demeure toujours présent. Dans le bourgeon qui renaît ou la mésange qui se pose sur une branche, subsiste l'élan vital. Souffle immortel, volonté farouche, au sein du végétal la vie subsiste. Je me suis laissée porter par ce texte organique, j'ai été surprise par sa force et l'impact qu'il a eu sur moi. Par ses mots d'une grande poésie, par l'univers mystérieux qu'elle déploie autour de nous, Mireille Gagné nous propose une expérience saisissante. le lecteur plonge dans ce qu'il y a de plus intimiste au sein de l'arbre et fait l'expérience improbable et unique du végétale.
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Alerte beauté !
Un arbre à l'oeil bois de fer bois clair bois la chair goulue craquelle sauvage et enlace. Peut-on ressusciter végétal ?
J'entoure de ma langue l'écorce et murmure la vision étoilée s'étiole sur ton corps des milliers de rainures explose vain.
Une splendeur mélange de don de soi de recherche écologie mêlés corps aux végétaux l'un dans l'autre l'un sur l'autre.
Une pierre à l'intérieur pèse d'injonctions, bientôt les racines s'étendront sur les mots, un soutien à l'âme de celui qui devient arbre, une allégorie viscères encordées.
Et puis la fin, puisque tout prend fin, en espérant le devenir "outil qui résiste à l'usure" "impossible à fendre" en combat face oubli.
L'âge en cerne débité le coeur dur l autrice plonge avec force et délice dans les sous bassement terre.


Pour pousser plus autour du devenir écorce :
Un hybride :
Comment je suis devenue un arbre de Sumana Roy
De la poésie pour enfants mais pas que :
L'arbre m'a dit de Jean-Pierre Siméon
Ces gens qui sont des arbres de David Dumortier

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Ce petit livre est très étonnant. D'une délicatesse rare, il a su me donner du plaisir à la lecture. Les mots sont très bien choisis. Les paragraphes courts même très courts apportent vraiment du rythme à la lecture. C'est très interessant de se retrouver à la place d'un arbre et globalement s'est vraiment une réussite. Une expérience inédite très poétique mais
sans en oublier les enjeux liés à notre nature qu'il faut savoir protéger. Une lecture simple, dynamique qu'on ne peut éviter.
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