Qui a dit que le latin était une langue morte ? Certainement pas
Nicola Gardini, écrivain italien et professeur à Oxford. En une vingtaine de chapitres, il nous fait (re)découvrir tous ces auteurs qui ont marqué l'histoire littéraire romaine, d'Ennius à
Saint Augustin en passant par les incontournables
Virgile,
Cicéron et
Tite-Live. Enrichi de références françaises judicieuses, cet essai montre la portée du rayonnement du latin à travers les siècles.
À une époque où il est de si bon ton de fustiger le latin, "langue morte" pour les uns, "inutile" pour d'autres, "apanage d'une élite, et donc à bannir" pour d'autres encore, l'ouvrage de
Nicola Gardini fait figure d'exception en rappelant les charmes et les beautés de cette langue complexe, présentée comme rebutante et poussiéreuse par ses détracteurs, qui la réduisent si facilement à l'austérité de ses déclinaisons, à la prétendue froideur de son ablatif absolu, à la rigidité de sa grammaire.
Et pourtant, en 250 pages, Gardini démontre brillamment que le latin, c'est aussi l'élégante syntaxe de
Cicéron, qui combine à la perfection rigueur, clarté et musicalité, la concision sublime de Tacite, l'art de l'enjambement de
Virgile, la simplicité sentencieuse de
Sénèque. Les chapitres, qui ne sont pas organisés dans une perspective chronologique, présentent les plus grands auteurs de la littérature latine, et ont moins pour but de constituer une histoire littéraire que pour nous faire partager l'admiration de Gardini devant ces maîtres de l'écrit.
Au fil des pages, il analyse avec une finesse remarquable et un enthousiasme communicatif le style des grands auteurs latins, s'attardant sur des points de détail toujours pertinents et excellemment commentés, comme l'emploi du mot "ombre" chez
Virgile, ou l'imparfait, temps de la durée et de l'inachèvement, utilisé par César à la place du simple parfait pour évoquer la construction d'un pont, comme si ce dernier était non pas achevé mais en train de se faire sous nos yeux, à l'image de l'oeuvre littéraire elle-même.
Et c'est peut-être là la plus grande réussite de Gardini : pouvoir évoquer chiasmes, hyperboles et autres procédés stylistiques sans jamais lasser son lecteur, sans jamais le noyer sous des listes fastidieuses de procédés ou des références obscures et pédantes, mais en lui faisant percevoir, de manière limpide, jamais ampoulée, les beautés particulières de cette langue. Rares sont les commentateurs à donner autant envie de se replonger dans les textes antiques, preuve que Gardini a gagné son pari : nous pousser à lire et relire les textes latins, à nous confronter à leurs difficultés, leur distance culturelle, leur étrangeté parfois, pour mieux en saisir les splendeurs. On peut le dire, il n'est guère de plus bel éloge moderne de la langue latine, langue non seulement utile, mais tout simplement indispensable.
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