Si la série a bel et bien changé de nom depuis le tome précédent, ce sont toujours huit histoires courtes qui nous attendent dans ce 25e volume. On peut, cependant se demander s'il est bien pertinent de parler « d'histoires d'amour » quand certaines sont des adultères ou de simples rencontres éphémères... à titre personnel, je préfère donc le nom qui figure à l'intérieur, « Huit nouvelles érotiques et sensuelles inédites » ! ^^
Au programme cette fois-ci, des couples à la dérive ou pas, des célibataires de plus ou moins longue date... et des infidèles, donc. Mais, même si l'on n'aime pas ce « trope », les deux histoires concernées parviennent chacune à faire passer la pilule, donc, vraiment, ce serait dommage de renoncer à cause de ça, d'autant que les six autres histoires proposent des situations variées.
Dans « Le jouet », comme souvent avec
Karine Géhin et
William Tinchant, on a un couple complice, une bonne dose d'humour et un cadre totalement inattendu. Un érotisme soft et pourtant diablement efficace, pimenté par le côté public de la chose... C'est léger, comme un de ces bonbons acidulés Arlequin.
... Changement radical d'ambiance dans « Toute ma chair ». Si les histoires « body positive », c'est cool, dans la vraie vie, tout le monde n'est pas à l'aise avec son corps, d'autant que la société n'aide pas. Et c'est ce que
Paula Monty a retranscrit à la perfection. le harcèlement scolaire, les violences médicales, le sport à haute dose, les régimes plus privatifs les uns que les autres qui font plus de mal que de bien, le besoin irrépressible de se justifier, le point de « oh et puis zut ». C'est violent, douloureux, ça tape juste. En total contraste avec Raphaël, qui montre pourtant à Sarah qu'elle lui plaît. Une histoire douce-amère, qui finit heureusement bien.
« Un grand cru » met en scène un couple à la libido débridée. Présentée comme une histoire d'infidélité du point de vue de Laetitia, il s'agit en réalité davantage d'échangisme soft puisque tout le monde est conscient de ce qui se passe et on ne peut plus consentant. Il est même dommage de ne pas avoir été plus loin, d'autant que Laetitia est clairement présentée comme bisexuelle et ne cache rien de son intérêt pour Camille... Il ne s'agit pas d'une mauvaise histoire, surtout avec les savoureuses phrases à double sens qui la parsèment, mais qui laisse un goût frustrant d'occasion manquée.
« Alibi sexuel » est une vraie histoire de tromperie, par contre. Deux vieux copains, l'un qui sert de couverture à l'autre... ça annonce la couleur dès les premières lignes. Mais les circonstances, qu'il est impossible d'évoquer trop précisément sous peine de gâcher un peu la surprise, font que « ça passe ». Disons que quand tout le monde trompe tout le monde sans états d'âme, on s'amuse davantage de la délicieusement ironique situation qu'autre chose. J'avais bien aimé la plume de
Christian Dureau dans la nouvelle « Nuit d'angoisse », le découvrir ici dans un tout autre registre surprend un peu, mais il s'en sort à merveille.
Je découvre la plume de Flora de Smedt avec « Les Zampas » et, déjà, je l'aime pour nous avoir offert une histoire reverse-harem ! Oui oui : une fille, quatre gars, l'amour de la musique en filigrane. Un petit jeu qui rappelle une épreuve rigolote du Bigdil (les vieux savent), mais qui partirait en sucette (dans tous les sens du terme). Côté érotisme, c'est finalement pourtant assez light, tout l'intérêt étant surtout la façon d'arriver graduellement au plat principal. Qu'on ne verra pas, donc. Là encore, ça laisse un peu sur la faim, même c'est le format des textes qui est directement responsable.
Autre histoire d'infidélité dans « A mon tour », et là encore, circonstances atténuantes puisqu'Agathe ne prévoit absolument pas de tromper son mari. On le sait depuis Ghost, la poterie, c'est sexy. Mais de Kali, on ne connaîtra que la silhouette, les cheveux longs et quelques informations personnelles. Les traits de son visage ? Nope. Pourtant, dans d'autres histoires, le manque de détails physiques n'est pas gênant, mais là, inexplicablement, oui. Peut-être parce que la sensualité du texte accentue vraiment le côté intime de ce qui est un moment de partage. Même s'il s'agit, pour Agathe, d'un inconnu...
Florence d'Agosto signe là la nouvelle la plus bouillante du livre, avec, en bonus, une fin très positive. Impossible de ne pas pardonner son petit écart à Agathe.
Si vous n'aviez pas encore eu assez de massages dans ce tome (c'est la troisième histoire à en montrer un), « La mécanique des corps » en remet une dose, mais cette fois dans un cadre médical censé rester professionnel. Censé. Car dès les premières secondes, l'intérêt mutuel est là, tu, embarrassant, même. Grâce au double point de vue, on est témoin des efforts de Fanny et Joseph pour feindre l'indifférence et c'est presque hilarant. Là encore, la fin est parfaite, traçant de nouveau la ligne entre professionnalisme et le reste, mais sans rien sacrifier !
Je dois avouer que j'ai entamé « Un parfum d'érotisme » avec beaucoup de pincettes, n'étant généralement pas fan des textes d'
Eric Valland. SURPRISE : c'est lui qui signe l'un des meilleurs du recueil, avec un couple à l'alchimie évidente bien que tout ne soit pas rose. Réaliste, en somme. On accroche dès la première page (le coup des guillemets, c'est du génie) et l'accent est vraiment mis sur la dynamique du couple. Frank est probablement le meilleur héros que j'ai pu lire chez l'auteur, à l'écoute des sentiments de sa femme. Et côté érotisme ? C'est coquinou, ça a un petit goût de « chhht, non, pas ici, on pourrait nous voir ! », et les dernières phrases sont parfaites. On referme le livre avec le sourire aux lèvres !
S'il ne s'agit pas de mon recueil préféré dans la série, sans doute car plus ancré dans l'ordinaire et le quotidien, les huit textes sont tous bons voire très bons, chacun possédant ses propres qualités. Peut-être pas un *grand* cru, mais un *bon* cru !