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Citations sur Que ma joie demeure (354)

— Tu sais quel est le plus vieux métier de la terre ?
— Oui.
— C’est berger.
— Oui.
— Et il est resté toujours pareil.
— Oui.
— Depuis mille, mille et mille ans, on garde les moutons toujours de la même manière, et le chien court comme il courait dans ce temps-là, et le berger a le même repos sur le bâton.

Chapitre 23
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Depuis longtemps, il attendait la venue d'un homme. Il ne savait pas qui. Il ne savait pas d'où il viendrait. Il ne savait pas s'il viendrait. Il le désirait seulement. C'est comme ça que parfois les choses se font et l'espérance humaine est un tel miracle qu'il ne faut pas s'étonner si parfois elle s'allume dans une tête sans savoir ni pourquoi ni comment.
Le tout c'est qu'après elle continue à soulever la vie avec ses grandes ailes de velours.
"Moi je crois qu'il viendra", se dit Jourdan.
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C'était agréable de regarder le temps, se dire "non, pas encore aujourd'hui" et puis, savoir qu'on n'est pas pressé et que tous les moments de la vie sont bons à vivre, même ceux pendant lesquels on n'a rien et qu'on attend d'avoir, même quand on a quelque chose à faire et que c'est pressé. Pourqoui pressé ?
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Honorine avait préparé le repas du soir. Elle mettait le couvert sur une table demi-ronde, appuyée au mur. Elle allait chercher les assiettes dans le placard et chaque fois elle dérangeait le berger, le Noir, assis sur des sacs vides, devant l'âtre et qui radoubait les lanières d'un fouet de bergerie.

    - Qu'est-ce que tu penses ? dit Randoulet.

Il y eut un moment de silence. puis Honorine dit : 

   - Qui, moi ?

   - Non, dit Randoulet, le Noir.

   - Moi ? dit le Noir.

   - Oui

Il s'arrêta de tresser les lanières.

   - Penser quoi, de quoi ?

   - Les moutons ?

   - C'est des moutons comme les autres fois.

   - Le bélier ?

   - C'est un bélier.

   - Étant mené au printemps, dit Randoulet, tu crois qu'il va remplir les brebis ?

   - Il les remplira, dit le Noir.

Il recommença à tresser sa longe.

   - Et les agneaux ? dit Randoulet.

   - Ça sera des agneaux, dit le Noir.

   - Venez, dit Honorine. Voilà la soupe.

 Le Noir mit son fouet dans le coin de l'âtre, poussa les sacs, prit la chaise, s'assit.

   - Qu'est-ce que tu veux dire ? dit-il.

   - Rien, dit Randoulet

 Il coupait du pain dans sa soupe. Il ouvrit son couteau, il l'essuya à ses pantalons.

   - Savoir, dit-il, si on gardait les bêtes au lieu de les revendre tout de suite ; si on les gardait un peu plus ?...

   - À ton idée, dit le Noir.

   - Mais qu'est-ce que tu penses, toi ?

   - Tu les garderais comment ? demanda Honorine.

   - Ce que je pense, dit le Noir, c'est difficile. Il faudrait savoir ce que véritablement tu veux faire.

   - Véritablement ? Q'est-ce que tu veux que je te dise ? Ce que j'aie envie de faire, c'est les garder, faire remplir les brebis, avoir les agneaux, attendre. Avoir peut-être un autre bélier, l'acheter ou n'importe. Attendre peut-être qu'un jeune soit capable. Encore faire remplir et attendre, voilà. Les garder, quoi !

   - Pourquoi faire ? dit Honorine

   - On verrait par la suite.

   - Bien sûr, dit le Noir.

   - Attendre quoi ? dit Honorine.

   - Tais-toi, dit Randoulet.

" Ce que je veux dire, dit-il, est facile à comprendre. Si on regarde ici tout ce qui est à nous, ça va de la route jusqu'au rebord de Chayes et c'est tout en prairies, les plus grasses du plateau. Est-ce la vérité ?

   - Oui, dit le Noir, sauf derrière l'étang où l'herbe est farcie de joncs.

   - Bon, dit Randoulet, mais de ce côté-ci ?

   - De ce côté-ci, dit le Noir, je t'ai toujours dit que c'était magnifique.

   - Et combien ça peut porter de moutons ?

   - À perte de vue, dit le Noir.

   - Ne parlons pas de perte de vue. Tu vois loin toi, mais tout en restant dans la chose humaine, cent cinquante, deux cents ? ...

   - Cinq cents avec aisance, dit le Noir.

   - Voilà, dit Randoulet.



Il chercha la salière. Il poivra sa soupe. Il la goûta. Elle était tiède. Il mangea deux ou trois cuillerées.

   - Des moutons libres, dit-il, j'ai envie de belles bêtes. 

   - Et, dit le Noir, tu as vu le cerf de Jourdan ?

   - Oui.

 Randoulet resta un moment à regarder l'ombre. Il n'y avait presque pas de bruit dans la maison, sauf le bruit du feu. Honorine écoutait le rêve des hommes...
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Les hommes, au fond, ça n'a pas été fait pour s'engraisser à l'auge, mais ça a été fait pour maigrir dans les chemins, traverser des arbres et des arbres, sans jamais revoir les mêmes; s'en aller dans sa curiosité, connaître.
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L’homme, on a dit qu’il était fait de cellules et de sang. Mais en réalité il est comme un feuillage. Non pas serré en bloc mais composé d’images éparses comme les feuilles dans les branchages des arbres et à travers desquelles il faut que le vent passe pour que ça chante. Comment voulez-vous que le monde s’en serve s’il est comme une pierre ? […] Je ne dis pas que la pierre est morte. Rien n’est mort. La mort n’existe pas. Mais, quand on est une chose dure et imperméable, quand il faut être roulé et brisé pour entrer dans la transformation, le tour de la roue est plus long. Il faut des milliards d’années pour soulever le fond des mers avec des millimètres de boue, refaire des montagnes de granit. Il ne faut que cent ans pour construire un châtaigner en dehors de la châtaigne et, quiconque a senti un jour de printemps sur les plateaux sauvages l’odeur amoureuse des fleurs de châtaignes comprendra combien ça compte de fleurir souvent.
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Les joies du monde sont notre seule nourriture.La dernière petite goutte nous fait encore vivre.
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- Nous avons peut-être, dit Jourdan, un gros avantage sur les autres. Nous n'avons pas quitte la terre de dessous les pieds. Au fond, être joyeux c'est être simples.
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"Dans tout le monde entier les hommes seuls sont tristes"(...)
-"Il regarde dit Bobi. Et, voyez, tous les deux, comme ce qui est pur et sauvage éclaire l'ombre. Voyez qu'il a les yeux de la même couleur que les bourgeons, et voyez comme notre regard à nous ne sert plus à rien quand nous sommes en pleine ombre mêlés aux choses sauvages, comme nous n'avons plus que des pierres mortes sur les paupières parce que nous avons perdu la joie des saisons et la gentillesse naïve .Regardez comme il a les yeux luisants!"
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Madame Hélène ne pouvait plus respirer. Son corsage la serrait. Elle venait de se tâter le ventre. Il était dur et tout vivant. Elle sentait une vie qui montait de la terre le long de ses jambes, à travers son ventre, sa poitrine, jusque dans sa tête où cette vie tourbillonnait comme parfois le vent dans les granges vides.

Chapitre 8
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