Qu'il s'évade d'une ruelle froide et moite de Paris, ou d'un quai du port de Procida, bruyant et assomé de soleil, l'amour ne vous demande pas s'il peut s'asseoir à votre table en terrasse. Il vient poser son voile sur votre tête, avant de vous enserrer le cou, puis de vous emprisonner les bras. Alors il est trop tard pour faire marche arrière. Il vous possède. Et si vous tentez de vous libérer de ce voile, alors il vous prive d'air.
Un amour d'été au goût d'inachevé, un démarrage amoureux pétri d'éraflures, mille femmes se reconnaîtront dans le dessein d'écrire sa propre histoire de contes de fées, avec son initiale gravée aux côtés de celle de cet homme, dans un coeur griffant l'écorce. Mais personne ne sortira de ces amours sans être cabossé. Encore faut-il que les bosses sur le capot de votre histoire personnelle soient anecdotiques. Encore faut-il qu'elles ne vous empêchent pas d'avancer.
Le cadre idyllique d'une île du sud de l'Italie pose la scène du théâtre tellement humain qui se déploie sous nos yeux. Alba se laisse emporter dans un tourbillon sombre ; jeune mère d'un bébé qui bouleverse son corps et sa vie de couple, elle arrive avec son mari Valentin et leur fille,... et sa propre crise identitaire dans la maison de son enfance, celle de des vacances innocentes et sucrées. Il n'est jamais bon de confronter une photo sépia d'un amour de jeunesse, fut-il encore très vif dans votre mémoire, et l'album des joies et déboires d'un quotidien qui s'installe.
Gabrielle pour sa part illustre le bras de Nino, ami italien du couple, qui remporte la palme de tous les clichés de l'italien dragueur. Mais si Gabrielle se sent déstabilisée, ce n'est pas à cause de cette langue qu'elle ne parle pas ; ce n'est pas à cause de sa timidité parce qu'elle ne connaît pas ce couple ; ce n'est pas parce que toute l'île s'enflamme pour la coupe d'Europe de football, alors même qu'elle ne suit pas ce sport. Non, ce qui déstabilise Gabrielle, c'est son inaptitude à comprendre comment servir au mieux les hommes qui entrent dans sa vie, et en ressortent aussi vite.
Ce roman m'a de nouveau, après
Mamma Maria, emportée dsns une ambiance complète, parfaitement dépeinte par
Serena Giuliano. Un moment de détente, un roman d'été mais pas seulement. La narration alternée des deux jeunes femmes nous emporte dans les questions très actuelles du dictature de l'apparence, mais surtout de ce que nous sommes prêts à sacrifier de nous pour être aimés. Un thème que j'avais déjà trouvé dans le précédent roman, abordé avec beaucoup de sérénité et une façon de poser délicatement les points sur les i.
Serena Giuliano me réconcilie réellement avec un genre de littérature qui ne m'apportait pas ce que j'en attendais jusqu'ici et c'est un vrai bonheur ! Les parfums et les couleurs de la botte italienne y sont probablement pour beaucoup, j'avoue !