Rarement j'ai ressenti autant d'angoisse à la lecture d'un roman...
Il ne s'agit pourtant pas d'un thriller, mais d'un récit tiré d'une histoire vraie, celle d'une école pour enfants sourds où certains élèves sont régulièrement agressés et violés par des adultes de l'établissement, torturés, dans une assurance d'impunité totale, un silence absolu.
Cette angoisse vous prend dés l'arrivée dans cette ville soumise à un brouillard sinistre qui semble vouloir cacher cette école et ses pratiques amorales. On est là dans un décor de film d'horreur !
le protagoniste principal, petit à petit, malgré ses doutes, les pressions sociales gigantesques, va participer de l'éclosion de la vérité, rendre possible les témoignages des petites victimes.. Déjà le roman a la très bonne idée de nous faire grâce de tout manichéisme (on aimerait se dire que les violeurs vont être punis mais on n'est pas ici dans un roman où l'on tient compte de la volonté puérile du lecteur, on est dans dans un roman qui se sert de ce qu'a été une réalité, dans l'un de ces lieux d'enfermement)
Pourtant, quand on a travaillé dans ces lieux où des êtres fragiles sont à la merci de personnes toutes puissantes (prisons, orphelinats, écoles, maisons de retraite, accueil pour personnes handicapées, colo, structures sportives, lieux de cultes, crèche........) la violence est infailliblement là. Il n'existe par exemple pas d'école maternelle sans violence. J'ai travaillé dans nombre de ces lieux, jamais jamais je n'ai trouvé un lieu sans violence : ça fait partie intrinsèquement de ces structures en huis clos, ça fait partie infailliblement de ce qu'est l'être humain.
Régulièrement sortiront des témoignages sur l'une de ces structures (comme dernièrement "les fossoyeurs" de Castanet) des reportages façon Cash Investigation sur France2, on s'épouvantera ailleurs qu'une femme fasse boire à un bébé du Destop pour le faire cesser de pleurer, mais tant que ces structures existeront, tant qu'il n'y aura pas de regard extérieur permanent, de caméra vidéo dans toute salle de classe, on donnera à certains un pouvoir absolu sur d'autres.
Il y a là une telle naïveté chez l'être humain ; je m'étonne de la propension incroyable de chacun à oublier ce dont il est capable. Parce que même si il l'on a pas travaillé dans l'un de ces lieux, la littérature depuis au moins
Sade nous a dit ce qu'était l'humain au plus prêt.