Le Faubourg mystérieux. Le Vampire du Val de Grâce

Lieu splendide et mystérieux, l'hôpital du Val-de-Grâce est, en 1849, engorgé de livides malades du choléra.
Une abondance de bons cadavres encore frais pour l'énigmatique docteur Kanali, idéal pour mener à bien ses expériences.
Une formule redonnerait vie aux cadavres, en apparence uniquement, mais assez pour redorer les traits d'un visage, à la manière d'un embaumement.
La première expérience concluante doit se faire au vu de tous et sur une célébrité récemment décédée, mais récupérer le cadavre d'une personnalité n'est pas chose facile et l'infortuné Docteur Kanali subira plusieurs échecs après des plans loufoques.
Son acolyte et complice, César Caseneuve, lui paraît lâche, maladroit, peur de tout, même du choléra ! Et il se prétend médecin ! Pouah ! Il n'aura jamais la main de sa fille...

Et ce vampire alors ?! Il s'agirait d'une malédiction familiale venant de l'épouse du Docteur et qui se transmettrait de génération en génération. Un seul et unique vampire tourmenterait le mariage de chaque fille dans la famille. Un Don Juan parmi les vampires se présente, la fille est dupée, un mariage est conclut puis il se provoque une mort subite, en apparence et ne revient que pour exécuter son habituelle tâche de vampire chaque soir : planter ses dents pour y sucer un peu de sang. Et cela, continuellement, sur la même femme, sans même la tuer, jusqu'à se métamorphoser en un autre homme afin d'embêter sa fille successive.
Les hantises nocturnes du vampire ont cessé mais l'épouse est convaincue qu'il rôde désormais autour de sa fille, au travers du galant César Ceseneuve, le jeune médecin.
Même expulsé de l'hôpital, il reviendra sans cesse la nuit pour l'adorable fille du docteur et de façon bien étrange (la famille réside à l'intérieur), à moins que ce ne soit là que d'héroïques bravoures inspirées par la flamme de l'amour interdit « quand on veut opiniâtrement qu'une seule chose, on l'obtient : grande puissance des inventeurs et des amoureux ! »

On l'attend ce vampire ! On le pressent, il est dans l'air mais on ne le voit jamais ! Pourtant il a bel et bien existé au travers des légendes familiales racontées par l'épouse du docteur… L'auteur nous dit « peut-être en effet » mais lui voit le fantastique dans le banal et mieux encore en pleine pandémie de choléra « On cherche le fantastique bien souvent là où il n'est pas, et on oublie de le demander là où il vient naturellement, comme l'herbe dans les plaines et le sable au bord de la plage ».
N'y voyez aucune angoisse dans ce récit qui se déroule en pleine pandémie de choléra, c'est tout l'inverse, l'intimité s'accroît, le cadre est idyllique pour les amours naissants « ils s'aimaient avec l'abandon des dernières heures, car chacune de ces heures pouvait être, en effet, pour eux la dernière ».

L'originalité de cette famille est intrigante, touchante et cela ressort d'autant plus que Léon Golzan a l'intelligence de nous la faire voir à travers les yeux d'un simple infirmier, Monsieur tout le Monde, tout juste assez curieux pour en découvrir davantage au fil du roman.
Le contraste est amusant entre le docteur Kanali, cartésien mais déjanté dans ses expériences funèbres, lugubres et l'épouse du docteur, hantée par ses vampires et protectrice pour sa fille unique.