Ce tome regroupe 2 miniséries de 3 épisodes chacune.
The itsy-bitsy spider (1999, scénario de
Devin Grayson, illustrations de JG Jones) - Quelque part dans un désert du Rhapastan (un pays fictif du Proche-Orient), un général et un scientifique observe avec attention un combat à main nue opposant un soldat à une dizaine d'autres. Il n'en fait qu'une bouchée, s'écroule par terre, mort et complètement décharné. À New York, Natalia Romanova contemple les vestiges de ses vies passées sous forme de souvenirs. Elle répond à un appel téléphonique pour lui confier une mission : récupérer l'arme bactériologique qui a permis au soldat de disposer d'une force surhumaine pour un court instant. Une autre espionne est sur le coup : Yelena Belova, apparue pour la première fois dans The Inhumans (nom de code : Black Widow).
Breakdown (2001, scénario de
Devin Grayson &
Greg Rucka, illustrations de
Scott Hampton) - Yelena Belova se fait enlever dans son petit appartement. Une équipe de médecins du SHIELD effectue une intervention de chirurgie esthétique pour donner le visage Yelena à Natalia, et vice-versa, sous la surveillance de Nick Fury et de Daredevil. le jeu des identités inversées peut commencer pour un enjeu à découvrir. le face à face entre les 2 Black Widow aura à nouveau lieu avec une inversion des rôles perverse.
Il s'agit de 2 miniséries parues dans la branche Marvel Knights sous la supervision de
Jimmy Palmiotti.
Devin Grayson, la scénariste, mélange avec un certain savoir faire les aspects superhéros de Black Widow avec son métier d'espionne. Les 2 séquences d'ouverture sont d'une efficacité remarquable : en 2 pages l'enjeu lié à l'arme biologique est fixé, en 1 page de 5 cases, tout le passé de Natalia Romanova est rappelé sans un seul mot. La première histoire est rapide, nerveuse, droit au but, avec un mélange d'action et de coups en traître bien équilibré.
Grayson oppose avec intelligence les 2 Black Widow en faisant ressortir leurs points communs et leurs différences au travers d'une course au trésor (l'arme bactériologique) qui fait aussi bien saliver l'oncle Sam que l'ours russe.
Grayson ne se contente pas de filer une suite de péripéties palpitantes, elle sait glisser des remarques discrètes et naturelles qui donnent une personnalité suffisante aux 2 Black Widow.
Cette première aventure bénéficie également des dessins très passionnés de JG Jones. Il sait rendre sexy Natalia et Yelena sans les mettre dans des poses de magazines de charme (ou pire). Il prête une attention impressionnante aux détails techniques et aux décors. Son sens du découpage augmente la vivacité des actions.
Grayson et Jones délivrent un récit d'action rondement mené, avec des personnages assez étoffés pour ne pas tomber dans le divertissement édulcoré, pour que les lecteurs puissent ressentir quelque chose pour les 2 femmes.
Le deuxième récit commence tout aussi magistralement : en 3 pages l'échange d'identité est plié le lecteur se trouve déjà au beau milieu du récit. Mais ce dernier s'avère très ténu. J'ai lu ces 3 épisodes 2 fois plus vite que ceux de l'histoire précédente en ayant l'impression de toujours rester à la surface, sans pouvoir m'intéresser à cette variation de volte-face. Les pages se tournent et les auteurs n'arrivent pas à faire croire à l'inversion d'identité. Dans l'ombre, Natalia Romanova se joue de sa contrepartie, tire les ficelles et triomphe de tous les obstacles, sans réelle mise en danger. de son coté, Yelena Belova se débat pour savoir qui elle est vraiment, mais le lecteur n'a pas accès à son flux de pensées, il lui est impossible de croire que Yelena a aussi rapidement perdu pied dans son rôle d'agent double ou triple. du coup toute l'intrigue tombe à plat et il n'y a plus qu'à attendre patiemment que le scénario aboutisse à sa conclusion prévisible dès le départ.
Il est facile de comprendre pourquoi les éditeurs ont proposé à
Scott Hampton d'illustrer ces jeux de l'esprit pratiqués aux dépends de Yelena Belova. Son style à l'encre et à l'aquarelle génère un climat légèrement décalé empreint d'onirisme. Sauf que pour une raison mystérieuse, Hampton choisit d'accentuer l'encrage et le réalisme de ses illustrations. du coup le décalage onirique ne se produit pas de manière assez importante, les dessins n'accentuent pas le trouble psychologique de Yelena et l'histoire tombe encore plus à plat.
La première histoire de ce tome constitue un divertissement grand spectacle mâtinant une touche de superhéros avec une bonne dose d'espionnage et d'action sur une trame classique, mais avec de vrais personnages, une légère ironie et des illustrations détaillées, dans une mise en page efficace. La deuxième histoire apparaît d'autant plus comme une déception par comparaison avec un scénario trop gros pour être cru et des illustrations trop conventionnelles pour pouvoir faire croire au principe de l'histoire.