L'obscurité qui se fit alors était de celle auxquels les yeux ne s'habituent pas.
Colie Singleton ne pouvait pas plus rester zen qu'une baleine bleue ne pouvait rester maigre ou le Bangladesh rester riche.
Pleurer, c'est soi, plus les larmes. Mais ce que Colin éprouvait était à l'exact opposé. C'était soi, moins quelque chose.
C- en algèbre mais A+ en coolitude, reprit-elle. Tu vois, le succès, c'est compliqué. Tu passes un temps incroyable à réfléchir au fait de plaire. Il faut aimer être aimé et, d'une certaine manière, également aimer ne pas être aimé.
Plutôt une déception, mais j'ai apprécié le profil d'Hassan et les relations qu'il entretient avec Colin.
C'est un peu comme quand on repère une constellation. On lève les yeux et on ne voit pas toutes les étoiles. Toutes ensemble elles sont à l'image de ce qu'elles sont : un vaste foutoir. Sauf qu'on veut voir des formes, des histoires, alors on en choisit quelques unes dans le ciel.
Ils quittèrent la grotte ensemble tard dans la nuit et rentrèrent séparément, Colin en Corbillard et Lindsey en pick-up rose. Il s'embrassèrent encore une fois dans l'allée, un baiser aussi délicieux que le sourire de Lindsey le promettait. Puis il se faufilèrent dans la maison pour gaspiller quelques heures de sommeil.
-C'est dingue ce que les gens sont capable d'inventer pour ne pas se faire oublier.
-Alors qu'est-ce qu'il faut faire pour y remédier? Comment on arrange ça?
-J'y réfléchissais avant ton arrivée. Je repensais à ton histoire de compter pour quelque chose. Il me semble que la façon dont on compte pour quelque chose est définie pas la façon dont on compte pour soi. À vouloir compter pour Colin, j'ai tout fait à l'envers. J'aurais mieux fait de m'intéresser à des choses beaucoup plus importantes comme les gens bien qui se soucient vraiment de moi, et comme cette ville. C'est facile de se faire coincer. On se laisse prendre à être quelqu'un, quelqu'un d'unique ou de sympa ou de je ne sais quoi, au point de ne plus savoir pourquoi on a ce besoin, mais on s'en persuade.
-Avant j'étais quelqu'un de bien. Mais aujourd'hui, je ne fais plus rien pour personne, à part pour des abrutis dont je n'ai strictement rien à foutre.
-Mais les gens t'aiment toujours. Tous les retraités, les ouvriers de l'usine...
-Oui, mais ils aiment celle que je suis dans leur souvenir et noncelle que je suis aujourd'hui. Honnêtement, Colin, je suis la personne la plus égocentrique du monde.