Quelques temps encore auparavant, Miles partageait son sac de couchage avec Lara, il avait enfin sauté le pas, il s'était décidé à sortir avec Lara au délicieux accent.
Maladroit l'un et l'autre, ils restaient un peu ignorants des usages pour se témoigner correctement affection et plus comme le faisaient les autres, au pensionnat de Culver Creek.
Son colocataire Chip "le Colonel" et la belle Alaska ne s'étaient pas privés de chambrer leur pote Miles baptisé le "Gros".
Son père, encore imprégné de ses jeunes années à Culver Creek, l'avait bel et bien préparé à ces moments de grandes récréations, avec ses histoires de jeunesse redondantes et potaches.
Rien ne l'avait vraiment vraiment préparé à l'amour néanmoins. le sexe était une toute autre affaire. Lorsqu'il se trouvait lové dans ce sac avec Lara, Miles ne pouvait détacher ses pensées d'Alaska. Lara était jolie, honnête, sincère... Alaska pourtant si directe, imprévisible, mystérieuse, railleuse.
Ils avaient un soir partagé un long baiser. Miles s'était senti si proche et si éloigné à la fois par ce geste volé d'Alaska. Elle était insaisissable dans tous les sens du terme.
Il l'aimait. Mais à présent, elle n'était plus.
Miles qui notait de mémoire chaque dernière parole des grands hommes avant l'inéluctable fin, tentait de retenir celle d'Alaska, de retenir son image.
Le Colonel ne pouvait s'empêcher d'en vouloir à cette fille qui les avait laissé tombé, comme ça, si expansive et si secrète. Qui étais-tu Alaska? Miles saurait-il répondre à cette grande interrogation?
: Pour qui n'a pas encore lu "
Qui es-tu Alaska?", ce titre entre bel et bien dans la collection des grandes aventures estudiantines adolescentes que son auteur
John Green aime à raconter, les mémorables expériences de vie où l'on est jeune et fou, rock'n'roll et potache, ce tournant loin des parents à vivre pleinement pour la mémoire avant que la vraie vie des responsabilités vous attrape.
John Green aime à mettre en scène des héros très geeks et peu populaires avec les filles, comme dans le "Théorème des K" et
la face cachée de Margot", des jeunes dégingandés à la recherche de l'amour avec un grand "A". Ces jeunes, férus de culture pop ou de sciences, sont des rêveurs qui vont au fil de l'aventure s'encanailler, faire les quatre-cent coups avec ceux qui pourraient être les amis pour la vie et se trouveront fascinés par des beautés charismatiques, des muses rebelles ou marginales souvent, des étoiles inaccessibles qui vont magnifier l'idéal du moment. "Les étoiles contraires" inversent la distribution des rôles.
Ces récits à la frontière de l'âge adulte font aussi une place à un événement lourd et tragique qui fera grandir un peu durement le personnage, éclatant momentanément la bulle de joyeuse folie et d'insouciance.
John Green bâtit des récits initiatiques où les personnages se cherchent, se trouvent, sont à un carrefour de leur adolescence où des émotions fortes de vie, d'amour et de mort viendront les éprouver dans le même temps.
Les fins d'histoires sont douces amères pour les protagonistes, pleines de joies nostalgiques et de larmes d'avoir vécu à son niveau, d'avoir perdu aussi et l'obligation de grandir sonne son heure mais ces jeunes héros, fraîchement sortis du foyer douillet quelques temps encore auparavant, se trouvent équipés et fin prêts comme de futurs jeunes adultes en herbe.
L'auteur n'hésite pas à charger ses personnages de doutes, les questionner, les pousser dans les retranchements des déceptions pour les surprendre finalement alors que les choses semblent jouer. le thème de l'amitié est omniprésent. Celui de l'amour tout autant pour faire du ver geek un magnifique papillon empli de la confiance d'avoir été choisi par une fille d'exception. L'auteur décrit bien une forme de fascination, d'obsession adolescente dictée par les hormones et des sentiments nouveaux. Margot et Alaska sont loin d'être des princesses charmantes, chacune avec une part aventureuse intrépide, une part d'ombre les rendant encore plus mystérieuses et désirables. Elles sont les meilleurs "potes" avec une poitrine.
L'histoire d'Alaska est sans doute un peu plus écorchée, d'où le doute omniprésent sur les circonstances de sa mort. Et c'est là que le doute intervient avec ce deuil difficile à réaliser, sur la sincérité des sentiments, la valeur des choses qui restent et de l'amitié dans de telles circonstances. Entre ces batailles potaches au pensionnat de Culver Creek contre les weekenders et les jeux du chat et de la souris avec le proviseur Starnes "l'Aigle", Miles "le Gros" et Chip " le Colonel" ont-ils manqué d'attention, de profondeur dans la relation qui les attachait à la belle Alaska Young?
Les deux vont se fâcher, se rabibocher, enquêter sur les circonstances de l'accident pour pouvoir faire leurs adieux à leur meilleure amie au mieux.
Poignant, subversif, drôle et émouvant, ce titre antérieur aux autres est à découvrir.