La Colline aux esclaves est un roman émouvant et fertile en rebondissements.
Kathleen Grissom ménage bien le suspense.
Le prologue commence en 1810 où Lavinia, guidée par une forte odeur de fumée, se précipite vers sa maison, sa fille Elly sur les talons. En haut de la colline, elles aperçoivent un corps inanimé pendu à un chêne et vêtu d'un fichu vert. Qui est-ce ?
Le chapitre suivant renvoie le lecteur en 1791 où Lavinia, jeune orpheline irlandaise de sept ans, est recueillie par le capitaine Pyke, après le décès de ses parents sur le bateau qui les amenait aux États-Unis. le capitaine la confie à Belle, jeune femme noire qui vit dans une dépendance à côté de la maison du maître. Lavinia travaillera avec les domestiques de la grande maison. Belle porte un fichu vert. Est-elle vouée à mourir en 1810, elle qui est la fille métisse du capitaine Pyke ?
Lavinia, bien qu'elle soit blanche, va grandir avec une famille noire à laquelle elle s'attache, elle aime Belle, Mama Mae et Papa George comme s'ils étaient ses parents, Beattie et Fanny comme si elles étaient ses soeurs et, petite fille, elle est amoureuse de Ben, le fils de Mama Mae, mais elle est vouée à un autre destin que sa famille de coeur. Grâce à sa couleur de peau, elle aura peut-être d'autres opportunités dans la vie.
Kathleen Grissom est une Canadienne qui s'est installée en Virginie dans l'ancienne dépendance d'une plantation. Elle y a retrouvé une carte de l'endroit datant du XVIIIe siècle et intitulée «
La colline aux esclaves ». Ses recherches lui ont inspiré ce roman riche de nombreuses scènes poignantes, parfois un peu trop mélodramatiques, qui donnent l'impression d'une accumulation de péripéties pour maintenir le lecteur en haleine.
Néanmoins, la douloureuse période de l'esclavage dans les États du Sud est très bien reconstituée, les personnages sont tous attachants même si certains sont un peu caricaturaux : les méchants sont très méchants.
J'ai beaucoup aimé Mama Mae qui s'occupe de Lavinia comme le ferait une maman et essaie de lui expliquer les dures réalités de l'existence, le statut particulier et difficile à comprendre, pour une enfant de sept ans, des Noirs dans la société. Lavinia, à son tour, s'occupera des bébés de la famille de Mama Mae, surtout de Sukey, comme s'ils étaient les siens.
Kathleen Grissom fait ressentir avec acuité au lecteur moderne ce qu'était la privation de liberté. Même si Mama Mae et les siens ont de meilleures conditions de vie que les esclaves des cases qui travaillent dans la plantation, ils peuvent être vendus à tout moment et éloignés à jamais de leur père, mère, conjoint, enfant, bébé… La violence et les châtiments cruels voire fatals pour désobéissance ne sont jamais loin. Les femmes noires ne sont pas non plus propriétaires de leur corps et doivent accepter d'être violées par le maître. Elles s'occupent alors avec amour et dignité des enfants que cet acte génère. Quant aux épidémies, elles déciment Blancs et Noirs confondus. Lavinia, jeune femme pauvre, n'est pas non plus entièrement libre. Elle dépend de la charité de Mme Madden, la belle-soeur du capitaine Pyke, jusqu'à ce qu'elle parvienne à faire un riche mariage qui l'établira.
J'ai trouvé ce roman captivant. le final rend un hommage émouvant au courage de Belle et Lavinia, qui se sont relevées maintes fois après de dures épreuves, grâce à leur force de caractère, et ont tenté de rester unies, malgré le contexte racial.