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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Serge Halimi livre avec Les nouveaux chiens de garde un livre critique à la vision corrosive et accusatrice sur le journalisme français.

Avant de débuter cette critique, un mot sur l'auteur. Serge Halimi est le rédacteur en chef du journal Le Monde Diplomatique.

Le livre comporte une introduction et un postface de Pierre Bourdieu ( le célèbre sociologue), et se divise en quatre chapitres pour finir par une conclusion.
Sur le plan formel, le livre est bien construit, l'introduction permet de bien présenter le projet de l'auteur qui se veut l'héritier de Nizan qui dans son livre critiquait le rôle des philosophes qu'il considérait au service de l'oligarchie bourgeoise. Serge Halimi applique l'analyse grinçante de Nizan aux journalistes français d'aujourd'hui qu'il considère comme les serviteurs et partie prenante de l'élite qui dirige la France.
Le livre est un ouvrage sérieux qui s'appuie sur de nombreuses références ( experts et extraits de conversations télévisuelles et d'articles de presse ).
La progression logique dans les chapitres est intéressante : le premier est une démonstration du fait que la liberté de la presse, loin de connaitre un essor depuis la fin de l'ORTF, est réduite par la précarisation et l'emprisonnement des journalistes au sein de groupes de presse privés
avec des actionnaires qui y font respecter leurs intérêts.
le deuxième chapitre montre les liens des journalistes avec l'argent qui créent une dépendance financière de la profession et bloque tout journalisme indépendant. Jusqu'ici, rien de très inédit. Mais les deux autres chapitres vont plus loin.
Le troisième chapitre est le plus intéressant, et le plus polémique; il s'attache à démonter que la presse française est orientée par l'idéologie des élites et est donc acquise à la défense du libéralisme et de l'Europe, causes qu'elle n'hésite pas à défendre en promouvant auprès de la population une information partiale et orientée, en organisant un débat d'idées circonscrit et en occultant une partie de l'information.
le quatrième chapitre enfonce le clou en prouvant que la presse est idéologique car les journalistes agissent en tant que composante de l'oligarchie et ont un rôle de chiens de garde de celle-ci.
Un plus est aussi le fait que Serge Halimi expose pour chaque chapitre un cas concret : Alain Minc, Bernard Henri-Lévy, le référendum européen...

Ce livre est intéressant car Serge Halimi met impitoyablement en cause les journalistes français qui se révèlent au mieux incompétents au pire manipulateurs, alors qu'ils s'abritent et se complaisent dans le mythe d'une presse indépendant et détachée du pouvoir. Cela est grave car la presse doit en démocratie constituer un contrepouvoir capable d'informer l'opinion. Ce livre est une mise au point des travers de l'information journalistique en France : manque d'indépendance par rapport à l'oligarchie économique, primauté d'une élite journalistique en consanguinité avec les politiques, orientée en faveur du libéralisme, qui se moque du peuple. C'est un constat sans concession qu'Halimi dresse de ses confrères, quelques titres et figures sont d'ailleurs pilonnés avec force ( ce qui m'a plutôt réjoui, je 'avoue ). le seul bémol est peut être que Serge Halimi ne fait pas de propositions susceptibles de faire changer cet état de fait, ni qu'il ne met en avant les rares journalistes qui font leur travail ( il y en existe tout de même...)

Au final, Halimi livre un petit essai sur le journalisme français pertinent et noir, qui ne manque pas d'interroger le citoyen que nous sommes, et sonne comme une dénonciation et une mise en garde. Très intéressant !
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Pour beaucoup d'observateurs, la première guerre du Golfe a marqué un tournant dans la perception qu'ils avaient du journalisme français. Non pas qu'ils se soient nourris d'illusions jusque là, mais l'unanimisme malsain de 1991, cet espèce d'enthousiasme obligatoire pour une opèration qui consistait, et tout le monde le savait, à tuer des milliers de civils innocents avait de quoi glacer le sang. En 1997, Serge Halimi publie ces "Nouveaux Chiens de garde", complètés et augmentés en 2005.

Halimi montre comment le milieu journalistique français s'est petit à petit rapproché des cercles du pouvoir, briguant honneurs et avantages, se targuant de tutoyer l'un ou l'autre présidentiable, les nervis de l'information lissée et complaisante ont construit une bulle consensuelle où l'esprit critique n'a pas droit de Cité: Halimi montre, exemples à l'appui, comment tous sont touchés, à droite comme à gauche, dans la presse d'opinion comme dans les médias généralistes, dans les canards satyriques autant que dans les hebdos dits de référence. Il décrit aussi le phénomène de concentration capitaliste qui a conduit à ce que tous les journaux appartiennent aux 15 plus grosses fortunes de France, conduisant à une autocensure des plus pernicieuse et à une complaisance constante vis-à-vis des puissances d'argent. Si le livre date un peu, on peut évidemment appliquer les éléments d'analyse proposés par Halimi à ce que nous vivons aujourd'hui, notamment en ce qui concerne la situation grecque. le constat est cruel et sans appel, il nous invite plus que jamais à exercer notre esprit critique à peine de danser comme dansent les puissants.
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Il n'est pas rare de nos jours d'entendre parler de la presse en des termes peu élogieux, des termes tels que désinformation et orientation de l'information sont des leitmotivs dans la bouche de ses détracteurs. Serge Halimi semble bien placé pour juger de l'état de la presse française, il a lui-même un pied dans la profession. Il est même devenu, et ce depuis Mars 2008, directeur du journal le Monde. Il critique pourtant, avec Les Nouveaux chiens de garde, certains de ses collègues haut placés. Ce pamphlet a pour but d'initier le lecteur aux dérives ayant cours dans les milieux médiatiques, notamment dans les hautes sphères de notre presse nationale matérialisés par la trentaine de « barons » qui pèsent de leur influence sur toute la profession. Loin de décrier la profession, Serge Halimi s'attache à fournir, à l'aide de documents d'archives et par conséquent volatils, l'état catastrophique dans lequel est plongé le journalisme français. Si l'image des journalistes ressort ternie après lecture des Nouveaux chiens de garde, on est en droit de s'interroger sur le statut même de l'auteur, journaliste et qui pis est bénéficiant d'un poste relativement en vue. Pour ne pas discréditer Serge Halimi, car les faits semblent influer en sa faveur, il convient donc de narrer brièvement l' « histoire » qui entoure ce pamphlet. Tout d'abord, Serge Halimi a tenu a ne pas faire de promotion pour son livre, il s'est contenté laisser le bouche à oreilles faire le travail ; une décision qui a porté ses fruits semble-t-il, puisque Les Nouveaux chiens de garde fut un best-seller, avec 150.000 exemplaires écoulés. de plus, l'ouvrage fut très froidement accueilli et dépeint par ses confrères, ce qui m'incite encore plus à admettre dans les grandes lignes les affirmations de Serge Halimi, lequel cherche avant tout à montrer les écarts d'une profession qui, malgré son influence sur l'opinion, n'a de compte à rendre à personne. Et pour attester ses dires, il n'hésite pas à faire appel à des documents d'archives, car en matière d'information, le public comme les journalistes souffrent d'amnésie.

A travers ce pamphlet, Serge Halimi dénonce la collusion politique et médiatique ; une profession qui se proclame contre-pouvoir, « porte-parole des obscurs et des sans voix, forum de la démocratie ». Rien de mieux lorsqu'on se targue de la sorte de constater l'évolution effectuée depuis les années de l'ORTF, un détachement vis-à-vis du pouvoir étatique rendu possible grâce à la privatisation. Voici néanmoins un argument des plus faux, car s'il est vrai, sur le plan formel, que les journalistes ne sont plus soumis à l'Etat, la pratique infirme ce jugement. Lors d'une interview du Président de la République, par exemple, c'est l'Elysée qui tranche le choix du journaliste, en fonction du profil souhaité. Quant aux émissions politiques, où la parole est donnée au peuple, si elles ne plaisent pas aux gouvernants, ces derniers se permettront d'amputer le budget d'une chaîne publique d'une centaine de millions d'euros. Lors de la réforme des retraites en 1995, un tel programme avait déplu. Les journalistes à l'origine de l'idée avaient simplement répliqué que ce genre de défouloir jouait le rôle de soupape de sécurité, une décompression en quelque sorte. Quant au CSA, sacro saint garant de la neutralité des médias, on est en droit de s'interroger sur leur neutralité à eux. Les membres sont nommés par le Président de la République (UMP depuis 1995), le Président du Sénat (UMP depuis toujours), et par le Président de l'Assemblée Nationale (UMP depuis 2002). Et d'après Hervé Bourges, ancien président de l'institution, « Jamais le CSA ne pourrait se permettre de nommer quelqu'un qui serait à l'avance rejeté par l'actionnaire », en d'autres termes l'Etat.

La suite sur mon blog :
Lien : http://foudre-olympienne.ove..
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À l'instar de Paul Nizan qui dénonçait, en 1932, avec "Les chiens de gardes", la collusion des philosophes avec « l'actualité impure de [leur] temps », Serge Halimi interpelle journalistes et lecteurs pour lutter contre l'amnésie qui autorise en permanence les incohérences et les inconséquences et appelle à une logique de responsabilité. le contre-pouvoir s'est assoupi et s'est retourné contre ceux qu'il devait défendre. Multipliant les exemples (qui datent du milieu des années 90 pour la première édition de cet ouvrage), il décrypte la société de connivence qui s'est mise en place, avec ses affrontements factices, ses notoriétés indues, ses services réciproques, ses omniprésences à l'antenne. (...) La démonstration est redoutable, la dissection des mécanismes précise, rigoureuse et nécessaire. Indémodable !
Article complet sur le blog de la Bibliothèque Fahrenheit 451.
Lien : http://bibliothequefahrenhei..
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« La lucidité est une forme de résistance », c'est par cette phrase que ce termine le livre. Celui-ci est en effet une critique lucide et nécessaire des médias et de ses rapports avec les sphères économique et politique. C'est un ouvrage assez court, qui se lit vraiment facilement en tout cas. Il fourmille de citations des principaux intéressés : patrons de presse, éditorialistes, rédac-chefs, intellectuels et journalistes de renom. Ceux-ci expliquent eux-même le fonctionnement de tout un système dont il ont appris les codes et les rouages : conflits d'intérêts, renvois d'ascenseur, lancés de fleurs, auto-célébration, ménages, promo des copains... Tout ça fait parti du quotidien de nombreux journalistes à succès.

C'est tellement connu et banal que ça en deviendrait presque une fatalité si il n'y avait cette exigence morale (parfois plus grande à l'étranger), de séparation nécessaire des pouvoirs politiques et médiatiques afin que de vrais contre-pouvoir puissent équilibrer la balance et qu'il n'y ait plus deux poids deux mesures entre ceux qui ont les réseaux d'influence (et qui sont alors honorés, décorés, récompensées, incriticables) et les autres qui peinent à se faire une place au soleil médiatique. L'auteur incarne à merveille cette indépendance, lui qui n'a fait aucun plateau télé pour assurer la promotion de son livre. Cela n'a pas empêché son succès. Une lueur d'espoir dans un monde de brutes cyniques et sans scrupules.
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