Annelise Heurtier est une autrice capable d'aborder tous les sujets et de donner l'impression à ses lecteurs qu'elle en est une spécialiste tant il y a un souci du détail dans ses récits historiques. J'ai adoré
Sweet Sixteen et j'attendais beaucoup aussi de cette histoire inspirée par Kathrine Switzer, qui a été la première femme à tenter de courir le marathon de Boston en 1967. Je n'ai pas été déçue sur le plan de la restitution de l'époque : l'autrice a fait ses devoirs, interrogeant des femmes, visionnant des émissions de l'époque, lisant beaucoup, et ça se sent dans les détails, dans une description de magazines, dans les références culturelles et de mode. On croit instantanément au contexte dans lequel se trouve Catherine : une époque, oui, aussi un petit village, où c'est un exploit d'avoir une douche, alors l'accès à l'information et les idées nouvelles, il ne fallait pas y penser. « J'avais l'impression d'être un chat caché dans une petite souris : c'était très inconfortable, un peu étouffant et il fallait rentrer ses griffes. »
C'est la course qui sert de fil conducteur et offre une tension dramatique parce que c'est davantage un récit d'ambiance, qui met les femmes, et les barrières autour d'elles, au centre du récit : au fil de la lecture, on se rend compte (avec effroi quand même parce que ça ne fait même pas 60 ans) que c'était une époque où les hommes décidaient de tout, où les femmes avaient peu d'options, peu de liberté et, surtout, peu d'accès à l'information, donc elles étaient forcées de croire ce qu'on leur racontait. « La barbe. L'utérus. Comment vérifier ? »
C'est une histoire forte, mais j'ai parfois eu l'impression que la voix de la narratrice était trop actuelle (ce qui peut être expliqué par le fait que c'est la grand-mère qui raconte, a posteriori, mais quand même).
Comme si son regard était un peu trop critique quand même pour son environnement immédiat. Néanmoins, le propos est nécessaire et servi par la plume magnifique d'
Annelise Heurtier, qui ne fait pas de concession sur la langue, racontant son histoire de façon fluide et glissant des perles au fil des pages, notamment dans les descriptions : « Les jours s'égrenaient donc, stricts et identiques, et bientôt novembre fut là, à nous corseter de brume et de froid. »
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