L'histoire d'un bourreau qui tuait en ricanant
Contre l'histoire polie de la destruction des juifs et des juives d'Europe, contre un certain philosémitisme culpabilisé de passés inavouables, contre le consensus mou commémorant les atrocités et l'oubli des conditions d'émergence de la destruction industrielle et des bourreaux ordinaires, voici l'histoire pas politiquement correcte de Max deve
nu Itzig, génocidaire transformé en sioniste.
Avec une ironie dévastatrice, un talent de narrateur peu commun,
Edgar Hilsenrath nous entraine dans une fiction, celle d'un quelconque assassin en uniforme SS, d'un copain d'école d'un juif coiffeur, fils de coiffeur. Un allemand ressemblant à l'image « racialisante » projetée sur les Juifs, et un jeune juif blond au nez droit.
Fiction, sarcasme, parodie, les moyens de l'auteur nous font toucher du doigt les réalités de ce passé, mieux que ne le feraient de multiples livres. Car l'auteur, grâce à son inventivité, dit ce que certains historiens cachent, nous bascule dans ce rouge et gris de haine, dans cet existant qui ne fut ni n'est indicible ou inexplicable.
C'est la force de la littérature de procéder par collages, de donner vie à des personnages et de dresser la table de l'horreur, de la banalité du mal, dans de grands éclats de rire…
Et
Edgar Hilsenrath nous prouve, une nouvelle fois, qu'il est un de ces écrivains qui entraine la lectrice et le lecteur dans ses fantaisies, qui les « attachent » aux pages blanches et noires, qui les poussent à suspendre leur quotidien pour aller jusqu'au bout de l'invention littéraire.