Pour un de ses derniers scénarios, Hubert (
Peau d'homme, Les ogres-dieux, Beauté) s'est attelé à une véritable biographie (sa première !), celle de Marion Barbara Carstairs.
Très tôt, dès son enfance, celle-ci s'aperçoit qu'elle est différente et fait preuve d'un fort caractère. Envoyée dans un pensionnat, elle y trouvera une certaine liberté et pourra y affirmer sa personnalité. Engagée volontaire comme ambulancière durant la Première guerre mondiale, elle y découvrira son homosexualité, puis après devient chauffeuse de taxis, navigatrice, conductrice de bolide des mers, avant d'acheter une île dans les Seychelles où elle régente son petit monde.
De nombreuses maîtresses (dont une certaine
Marlene Dietrich), une vie tumultueuse, des scandales à répétition, des ennemis face à sa liberté revendiquée à une période « où ça ne le faisait pas », la fortune héritée de son grand-père, actionnaire de la Standard Oil (la plus grosse société américaine de l'époque au point où elle fut démantelée), ainsi que son caractère bien trempé l'aideront à traverser les nombreux épisodes de sa vie.
Mais Hubert et Virginie Augustin n'en ont pas fait pour autant une hagiographie : s'ils nous la montrent souvent joyeuse, généreuse, frondeuse, balayant d'un revers de main les carcans de son époque, elle peut être également égoïste et exaspérante. Et de se demander si sa poupée (le major Wadley) n'est pas finalement son seul grand amour.
Le dessin noir et blanc de Virginie Augustin (Alim le tanneur,
Monsieur désire, 40 éléphants), tout en rondeurs, parfois épuré, parfois proche du croquis, souligne le tumulte et la sensualité d'une vie bien remplie. Et est sans doute le travail le plus abouti de la dessinatrice.
Au final, une bande dessinée particulièrement agréable à lire et à relire.