Citations sur La rivière noire (74)
La scène se passait en milieu de journée et peu de gens étaient présents. Elinborg n'avait jamais mis les pieds dans ce genre de salle de torture afin d'améliorer son apparence physique et elle ne se voyait vraiment pas dans ce rôle-là. Elle se considérait en excellente forme, peut-être aurait-elle pu perdre quelques kilos, mais elle n'avait jamais fumé et s'alimentait sainement.
J’avais honte. J’avais honte d'être à cet endroit. D'y être arrivé sans me souvenir comment et d'être allongée nue dans cette maison inconnue. J'avais honte d'avoir été violée. J'ai tout de suite compris ce qu'il m'avais fait. Je trouvais.... cela me faisait honte. Je voulais que personne ne l'apprenne. Je ne voulais le dire à personne . Je trouvais cette chose-là abjecte et dégoûtante. J'ai vu le préservatif sur le sol. Je me suis imaginée ce qu'allaient dire les gens? Et si c'était moi qui lui avais fait des avances? Et si je portais ma part de responsabilité? Et si c'était entièrement ma faute ? Était-ce moi qui avais appelé cette chose là sur nous?
- Le plus triste, c'est que cela ne prend jamais fin, nous ne pouvons pas faire notre deuil correctement car nous ne savons rien. (...) Une chose que nous ne retrouverons jamais a disparu avec Lilja.
Elle passa sa main dans les cheveux.
- Et cette chose, c'est peut-être nous-mêmes.
Personne ne leur prêtait une attention particulière dans le bar et ce ne fut pas non plus le cas quand ils en sortirent, une bonne heure plus tard, pour aller chez lui, en empruntant des rues peu fréquentées. A ce moment-là, les effets du produit avaient déjà commencé à se faire sentir. Il lui avait offert une autre margarita.
Alors qu’il revenait du comptoir avec la troisième consommation, il avait plongé sa main dans sa poche pour y prendre la drogue qu’il avait versée discrètement dans la boisson. Tout se passait pour le mieux entre eux, il savait qu’elle ne lui poserait aucun problème.
J'avais honte d'avoir été violée. J'ai tout de suite compris ce qu'il m'avait fait. Je trouvais... cela me faisait honte. Je voulais que personne ne l'apprenne. Je ne voulais le dire à personne. Je trouvais cette chose-là tellement abjecte et dégoûtante. J'ai vu le préservatif sur le sol. Je me suis imaginée ce qu'allaient dire les gens. Et si c'était moi qui lui avais fait des avances ? Et si je portais ma part de responsabilité ? Et si c'était entièrement ma faute ? Etait-ce moi qui avais appelé cette chose-là sur nous ?
La cuisine lui permettait de satisfaire ses besoins créatifs, qui consistaient à transformer une matière brute pour lui donner une autre nature, un autre goût, une autre odeur. Elle considérait les trois stades de la cuisine comme une sorte de recette pour la vie: la préparation, la réalisation et le repas autour de la table.
Il y a ici certaines choses que j'ai du mal à saisir, même si j'y habite. J'aurais beau vous les expliquer pendant des heures, cela ne vous donnerait qu'une partie de la vérité. Et cette part de vérité serait un mensonge aux yeux de Haddi, le gars qui travaille à la station-service d'en bas. Même si vous interrogiez tous ceux qui vivent ici et que vous y consacriez vingt ans de votre vie, vous n'engrangeriez que quelques fragments de ce qui fait cette communauté. Le mode de pensée des gens. La manière dont ils sont intimement liés. Les liens de toute une année ou de toute une vie qui unissent les uns et les autres ou qui les séparent. J'ai passé toute mon existence ici et il me rete encore d'innombrables choses à comprendre. Et pourtant, c'est ici que j'ai ma place. Vos amis sont suceptibles de se transformer en salauds en l'espace d'un instant. Et les gens emportent les secrets jusque dans leur tombe.
Elinborg poussa un profond soupir.
- C'est bien la première fois que je suis confrontée à un truc pareil.
- À quoi donc?
- J'ai l'impression que tous ceux que j'interroge auraient eu des raisons d'assassiner cet homme.
Les femmes qui tombent sur ces hommes-là. Je crois que je comprends ce qu'elles traversent. On entend bien parler de ces viols, mais il y a tellement d'horreurs dans l'actualité qu'on essaie de balayer tout ça. Y compris les viols. Aujourd'hui , je sais que derrière chacune de ces informations, il se cache des histoires affreuses de femmes qui, comme moi, ont subi une violence insupportable. Et ces hommes ! Comment peuvent-ils donc être aussi abjects ?
Peut-être que nous n'en avons pas assez fait. Que nous n'avons pas consacré assez de temps à nos enfants. Un beau jour, on les retrouve transformés en de parfaits inconnus parce qu'on n'a pas passé suffisamment de temps avec eux. On ne représente plus rien avec eux. Ils apprennent à se débrouiller tout seuls et à n'avoir besoin de personne. Puis ils quittent la maison, ils disparaissent et ne nous adressent plus jamais la parole.