Ouvrir un livre de
John Irving, c'est plonger dans un monde foisonnant d'histoires atypiques et de personnages cocasses et attachants.
Au fil de ses romans, depuis plus de quarante ans, l'auteur parsème ses textes d'éléments récurrents que le lecteur assidu se plait à reconnaître comme si l'auteur lui lançait un clin d'oeil pour le remercier de sa fidélité.
A chaque fois, ce sont des univers différents, de nouveaux territoires avec leur culture et leurs coutumes mais les thèmes chers à
John Irving sont toujours présents. La quête du père bien sûr, l'orphelin qui se construit dans un milieu hostile mais où il trouve néanmoins des amis secourables, le métier d'écrivain, le travesti au grand coeur et mais aussi le cirque, ce milieu fascinant lieu de tous les dangers mais aussi de plaisir que procure le dépassement de soi.
Le jeune héros Juan Diego grandit à côté de la décharge publique d'Oaxaca au Mexique. Il trouvera son salut dans les livres, dans la protection d'un Jésuite et deviendra un auteur célèbre aux Etats Unis. Alors que l'âge le contraint à des traitements médicamenteux invalidants, il se rend aux Philippines pour respecter une promesse faite dans son enfance et au cours de ce périple entre Manille et les îles, il revivra en rêve les moments forts de sa jeunesse tout en se soumettant de bon coeur à l'emprise de deux femmes mystérieuses.
Au fil de ce parcours onirique dans son passé, on fera connaissance avec tous ceux qui ont compté pour lui et surtout sa soeur Lupe, la jeune voyante qui lit dans les pensées et voue une haine farouche à la Vierge Marie qui, selon elle, a très injustement détrôné la Vierge de Guadalupe, véritable protectrice du Mexique.
Ce roman joue délibérément la carte du mystère, rappel malicieux du titre choisi et il bouscule le lecteur car il fait la part belle aux miracles, aux esprits mais aussi à la foi.
Il faut chasser tout raisonnement cartésien de son esprit pour entre pleinement dans cette histoire et se laisser emporter par les émotions suscitées par la foule bigarrée des personnages qui gravitent autour de Juan Diego, témoin fasciné de leur danse endiablée.
Au delà de la piété populaire suscitée par les Vierges rivales, on évoque les danses macabres joyeuses du jour des morts, produit d'une culture mexicaine foisonnante de vie qui transforme en fête débridée, les hommages présentés aux disparus.
Un roman, riche, puissant, qui témoigne une fois de plus,
John Irving est vraiment un très , très grand auteur contemporain et que les années qui passent ne font que renforcer son talent.