Je l'avoue, je n'ai jamais lu
John Irving dont j'entendais beaucoup parler et à propos duquel je lisais maints commentaires enthousiastes. J'ai commencé par un livre un peu à part puisqu'il s'agit de nouvelles, sept en tout. Toutes ne m'ont pas charmée mais toutes m'ont intéressée. La première qui donne son titre au recueil est étrange, désarçonnante avec ses quelques phrases qui soudain suspendent la lecture. La suivante "Un énergumène passe à table", par le biais d'une parabole, répercute la douleur de la différence. La troisième "L'espace intérieur" m'a beaucoup plu, les lieux, les personnages se mettaient à vivre et contentaient les "lecteurs-voyeurs" que nous sommes. A regret, l'histoire s'arrêta, limitée par le genre (même sensation pour "Un royaume de lassitude", la cinquième). Elles renferment une telle force de vie, une telle présence qu'on en sort frustré et plein de questions. La quatrième "Dans un Etat proche de l'Iowa, ou l'itinéraire qui mène à l'état de grâce" nous conte une fugue partagée entre un homme et sa voiture : miracle de l'écriture, même en passant par des phases d'étonnement, on y croit et on se prend à être désolé de ce qui lui arrive. On se promène d'états américains en états américains, on attrappe des noms qui sont au fond de nous, on voyage de motel en motel, des images de films montent à nos yeux, les grands espaces éblouissent. Les deux dernières sont autobiographiques. L'avant-dernière nous montre la naissance de l'écrivain, les fondements de la fiction/réalité. La dernière "Mon dîner à la Maison-Blanche" nous fait faire connaissance avec un
John Irving démocrate, un Clinton porteur d'espoirs, un Bush!!! (le père)"dégueulis" (anecdote amusante et répugnante, mais chut! à vous de lire!), un Reagan dont on se souvient que l'Europe, moqueuse, regardait ce cow-boy sorti tout droit d'un western de série B, en se demandant dans quel mauvais feuilleton donnait l'Amérique; bref, rien que ce dernier écrit vaut le détour.