En parlant, on se trompe parfois de mots. Ce ne sont pas ceux que l'on voulait employer. Trop tard. Ce sont ceux qui ont été entendus et ne peuvent s'effacer.
Camille Desmoulins sort de son pas souple. L'arrondi de sa redingote salue la compagnie bien bas. Ses cheveux noirs, mi-longs, flottent tel un drapeau sur sa nuque.
O liberté, que de crimes on commet en ton nom !
S'il croit qu'il va y arriver tout seul ! Il est trop amoureux pour ça. C'est bête, un amoureux, ça pense pas avec la tête. La preuve, il est jaloux d'un ci-devant qui a l'age d’être son père !
Avec la Révolution, on sera heureux qu'il paraît! Tu parles! Le bonheur c'est toujours pour demain.
Il ne cherche pas à les dissimuler: un homme a aussi le droit de pleurer
La tête de Lucile est tombée. Elle est montée, sereine, à l'échafaud, comme pressé de retrouver son Camille. Elle avait coupé elle-même ses cheveux, et entouré sa tête d'un foulard rouge. Sur son passage, la foule s'était tue devant cette belle jeune femme en robe blanche. Nulle insulte, pas de crachats.... La citoyenne Desmoulins avait réussi à forcer le respect des spectateurs, jusqu'à la dernière seconde.
Tu n'empêcheras pas nos têtes de s'embrasser dans le panier
Là-haut la machine attend le moment d'entrer en action.
-Lucile ! Hurle Camille.
Lucile est d'une famille riche. Elle a rencontré Camille lorsqu'elle avait treize ans.... Coup de foudre ! Seulement Lucile était très jeune et Camille un étudiant diant sans le sou. Ils ont attendu sept ans pour se marier. Sept ans d'amour fou, de rencontres en cachette, de lettre enflammées....
Leur passion est digne d'un roman. Aujourd'hui, ils ne se quittent plus, ils se disent tout, ne vivant que l'un pour l'autre. Camille n'a pas honte de proclamer à la face du monde qu'il n'y a que deux choses qui emplissent ses jours et ses nuits: Lucile et la Révolution. Et, maintenant, Horace est arrivé, le plus merveilleux des bébés, ce petit être qui est à la fois la moitié de l'un et la moitié de l'autre