L'été des charognes

Le lendemain, tout le monde était de nouveau dans son jardin. La plupart comme mon père ils y passent une grande partie de la journée.
C'est quelque chose de rare où le corps fait la même chose que l'esprit, ça se construit mentalement pour nourrir la famille, comme on soigne les bêtes on soigne aussi le jardin.

Quand les parents sont bien trop bourrés, ils démarrent juste les autos en première et les enfants conduisent, comme ça c’est moins dangereux et nous ça va on aime bien conduire comme les distances sont pas très grandes.

Et puis j'ai senti ma bouche se fendre sous le sourire, tout s'est levé dans mon cœur et au plafond l'orage grondait doucement très loin sous la peinture. j'ai compris que j'étais sauvé.
Aujourd'hui, on allait bénir les animaux.

En prenant conscience de l'effroyable désolation autour de moi je commençais à me demander depuis combien de temps Kim était partie. Tout puait l'amour mort.

[...] puisqu'y croire ça suffit pas, que c'est surtout travailler dur qu'il faut et remuer sa peine pour en faire une bonne terre.

Et quand le père il a goûté alors on y a droit nous aussi , au petit morceau de tendresse morte qui vous fond sur la langue.

Nous, à chaque fois que la porte s'ouvrait on sentait cette odeur de mort un peu chaude qui vous rentre tout de suite au fond de la bouche et qui se laisse bien mâcher comme une vieille pâtisserie. (...)
Il faisait très humide et j'avais du mal à respirer, je voulais pas trop respirer l'air d'ici c'était trop mauvais.
C'était de l'air de ses poumons à elle qui était en train de crever au fond du noir de son lit d'hôpital et je voulais pas de ça dedans moi, alors j'essayais de me retenir le plus possible en aspirant que par la bouche pour pas sentir cette brûlante odeur de transpiration mélangée à celle du pot de chambre.
Je voulais pas faire entrer de sa mort à elle dans mon ventre à moi.

Ça les fait les refroidir les souvenirs. Ça fait comme un panorama froid qui me traverse, ça secoue moins que de penser dehors, se souvenir Sous l’eau c’est comme penser à rien ce qui est presque comme pas penser du tout, comme quand on dort des fois pendant que la voiture roule.

Et quand le père il a goûté alors on y a droit nous aussi, au petit morceau de tendresse morte qui vous fond sur la langue.

Je commençais à croire que c’était ça le brouillard, l’esprit de tout les animaux morts ici qui flottait dans l’air.