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Récit d'un écrivain albanais en Union soviétique, qui fréquente une femme russe jusqu'au refroidissement des relations entre Albanie et Russie. La splendeur du titre désigne les dirigeants soviétiques, que l'on n'entrevoit qu'à la fin, distants et figés. le roman n'est pas exaltant, reflétant une vie morne et contrôlée, celle des écrivains communistes des pays frères à Moscou. On y perçoit d'une façon feutrée la critique du régime, sans apprendre grand chose.
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J'ai eu la chance de rencontrer Ismaïl Kadaré en Albanie à l'époque communiste. le traducteur Arben Leskaj m'avait organisé une rencontre pour prendre le thé avec lui et sa femme sur la plage de Durrës. J'avais déjà lu plusieurs de ses livres, dont l'extraordinaire Avril brisé, et j'ai admiré alors le côté prudemment sarcastique qu'on retrouve dans ses livres, mais je ne pouvais pas encore deviner son brillant parcours ultérieur. Ses écrits sont traduits dans 29 langues. Il a souvent été cité pour le prix Nobel de littérature sans jamais l'obtenir, mais a obtenu quantité d'autres prix, et aujourd'hui, à 85 ans, est Grand Officier de la Légion d'Honneur. Son livre le Crépuscule des Dieux de la steppe, au titre subtilement provocateur comme tout son oeuvre, annonce la rupture entre l'Albanie et la Russie, mais pas encore la rupture avec le communisme puisque Enver Hoxha s'est ensuite allié à la Chine contre l'URSS. Un moment, cette situation lui a permis une certaine liberté dans la critique du système soviétique, mais plusieurs de ses écrits ont été interdits et, se sentant menacé, Kadaré a été contraint de s'exiler, et a obtenu l'asile politique en France.
Après le lycée, il avait obtenu une bourse pour l'institut Gorki de littérature à Moscou, passage obligé pour tout intellectuel des pays satellites qu'il faut russifier à la fois sur le plan linguistique («Ce Letton n'a pas encore renié sa langue, mais on y travaille» (p. 117) et idéologique, en formatant la pensée car il n'y a qu'un seul parti communiste, le «parti père». Les autres sont des «partis fils» (p. 186). Il fallait aussi éradiquer le folklorisme, le conformisme, le stalinisme, le nationalisme bourgeois le chauvinisme des petits républiques, etc. (p. 59). Et gare aux dirigeants des pays satellites qui s'écartent du chemin, comme le hongrois («C'est avec ces ongles qu'il voulait écorcher la Russie, mais nous les lui avons arrachés» (p. 207).
Kadaré étudie donc ce qu'il ne faut pas écrire, mais fera le contraire. le Crépuscule des dieux de la steppe relate précisément ce séjour à l'Institut Gorki, et une idylle entre le narrateur albanais et une Russe. La fin du livre annonce sarcastiquement la rupture entre les deux pays: l'ambassadeur d'Albanie à Moscou convoque de toute urgence les étudiants albanais pour leur dire simplement que les relations entre les deux pays étaient bonnes (p. 198), et chacun comprend d'autant mieux le contraire que les étudiants sont invités à cesser tout contact avec les jeunes filles russes «pour éviter les provocations».
Pendant ce séjour, le Prix Nobel de Littérature est décerné à Boris Pasternak pour le Docteur Jivago. Khrouchtchev avait chargé les écrivains de dénoncer les crimes de Staline, mais après un moment, ça s'était retourné contre Pasternak. «La radio, de cinq heures du matin à minuit, la télévision, les journaux, les revues, jusqu'aux publications pour enfants étaient remplis d'attaques contre l'écrivain renégat. On publiait des télégrammes, des lettres, des déclarations de kolkhoziens, d'unités militaires,... » (pp. 143-144) «Après une lettre envoyée par la population d'une certaine région de Qipstap,… le speaker lut la déclaration du clergé de Tachkent» (p. 151). La campagne continuait avec «une déclaration… émanant peut-être des pêcheurs de baleine de la mer du Nord» (p. 152), puis la campagne s'interrompit brutalement et sans explication, on parla plutôt des succès des kolkhoziens de l'Oural, de la pèche, et d'une poétesse cinghalaise (pp. 170-171).
Ce livre est fort intéressant car c'est un témoignage sur le fonctionnement du système soviétique de l'intérieur, au quotidien, et je terminerai par une dernière citation typique : «Ces derniers temps… on avait vu des comités centraux évincés, des groupes se livrer à une lutte implacable pour le pouvoir, des complots, des manoeuvres de coulisse, et rien de tout cela, ou presque, n'état évoqué… On n'y trouvait que le bruissement des bouleaux » (p. 151).
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"Le crépuscule des dieux de la steppe" est un excellent roman sur le dilemme de l'écrivain derrière le rideau de fer à la fin des années cinquante qui serait peut-être difficile a suivre pour le lecteur qui ne connait pas le contexte. Il plaira certainement à ceux qui connaissent l'oeuvre de Boris Pasternak, Joseph Brodsky, Milan Kundera, Alexandre Soljenitsyne, Bohomil Hrabal, et Joseph Skvorecky. Si on ne connait déjà deux ou trois auteurs de ce group, on aura beaucoup du mal a suivre "Le crépuscule des dieux de la steppe".
Le roman qui est autobiographique décrit les expériences de Kadaré entre 1958-1960 quand il a été inscrit à l'Institut de littérature Maxime-Gorki à Moscou. Pendant cette période Kadaré fréquentait surtout d'autres étudiants étrangers qui comme lui qui étaient là pour apprendre à écrire dans le style du réalisme-socialiste exigé dans les pays communistes.
Ces étudiants pour la plupart trouvaient la situation stressante. Ils se méfiaient mutuellement parce qu'ils savaient qu'il y avaient beaucoup d'espions parmi eux. En plus les Russes ne leur faisaient pas confiance. Les loisirs proposés (les randonnées du ski par exemple) étaient souvent des calvaires surtout pour ceux qui n'avaient jamais vu de neige afin d'arriver en Russie.
Malgré les inconvénients, le protagoniste qui est l'alter ego de Kadaré accepte assez bien la situation. Il veut faire la carrière dans un pays communiste et son seule passe-temps est de courir après les jupes. Il est troublé néanmoins par la peur qu'il va commettre une trahison à un moment critique.
Peu à peu son enthousiasme pour l'URSS s'effrite. Il n'aime pas que les Russes lui dit comment écrire. Convaincu que Homère était Albanais, il ne croit pas que la culture Russe est supérieure à la sienne. Quand il tombe sur une version samizdat (clandestin) du docteur Jivago de Boris Pasternak, il commence à poser des questions sur la censure Stalinienne.
Peu après, le comité Nobel accorde son prix littéraire à Pasternak et le régime monte une compagne féroce de salissage contre Pasternak. Quand ses amis se mettent à dénoncer Pasternak, le protagoniste est outragé. En même temps il a peur qu'il sera forcé à ajouter sa voix aux autres qui attaquent Pasternak.
À ce moment on annonce que le régime Albanais d'Envers Hoxha a décidé d'effectuer une rupture avec l'URSS et se l'allier avec la Chine populaire. On convoque le protagoniste à l'ambassade Albanais où on lui dit qu'il devra quitter l'URSS dans les plus brefs délais et de renoncer immédiatement à tout rendez-vous avec des filles russes .
Le protagoniste pense à une jeune fille qu'il avait beaucoup aimé mais qu'il perdu à cause de sa manque de maturité. Il décide de la voir pour une dernière fois afin de faire ses excuses convenablement. Pourtant dès qu'il la voit, il se souvient de ses ordres de ne pas rencontrer des filles russes. Il coupe court la rencontre et fuit. Ainsi, il effectue la trahison dont il avait eu longtemps peur.
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J'avais découvert à travers ce livre simple et facile d'accès les relations franco-albanaises et la vie dans les pays de l'est. En même temps il réside dans ce livre un étrange sentiment d'universalité. Pas un grand livre mais un bon moment
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Si ce n'est vraiment pour ses qualités romanesques, ce livre mérite et même vaut d'être lu pour son aspect documentaire sur la vie intellectuelle dans l'URSS stalinienne (je sais que Staline était déjà mort, mais je vous assure que la vie de tous les jours était encore bien stalinienne) par quelqu'un qui tente de dire les choses sans émettre en même temps son jugement. C'est très intéressant.
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Une espèce d'autobiographie de l'auteur durant son séjour à Moscou après la mort de Staline, au coeur de la littérature soviétique qui émerge pendant la présidence de Kroutchev, et donc juste avant la mise à l'écart de l'Albanie.
L' écriture caustique, riche, décapante d'un grand écrivain, qui au delà de ses intrigues amoureuses plutôt cocasses et savoureuses, nous documente sur le contexte socioculturel de l'époque.
A noter que l'édition récente de cet ouvrage chez Laffont, avec deux autres romans parus ultérieurement "L'hiver de la grande solitude" et "Le concert" semble être la seule disponible maintenant.
Un très beau livre très solide et maniable avec un papier proche du papier-bible.
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