Un témoignage fort et puissant sur la famille
Kouchner, représentative d'une Gauche Caviar, et surtout une époque également où la liberté et la liberté sexuelle primaient sur beaucoup d'autres valeurs.
Camille revient chronologiquement sur son histoire, avec émotion, sincérité, avec le recul de l'âge adulte sur les souvenirs d'enfant.
Revoir son enfance et sa jeunesse avec le pouvoir de la plume, la recherche de la vérité et de la sincérité. Sans occulter ce qu'elle ressentait à l'époque.
Des mots forts, simples et puissants qui font mouche à chaque fois.
Le portrait de sa mère est empreint d'un amour exclusif et en même temps d'une rare lucidité. Il y a presque un dédoublement de personnalité : le regard de l'enfant et la lucidité de l'adulte qui se penche sur ses souvenirs.
Quand elle était enfant :
« Je dois tout faire seule, mais je sais que rien n'est laissé au hasard. Ma mère ne m'emmène pas au cinéma mais se réjouit quand j'y vais. (… )
Nous sommes un duo, mais nous sommes chacune.
Ses yeux s'ouvrent, et les questions se posent au fur et à mesure des anecdotes sur sa mère qui a eu une brève aventure avec
Fidel Castro
« Une idéaliste cédant au machisme qu'elle combat. Une contradiction sans doute. La liberté, peut-être. »
A propos de
Bernard Kouchner, son père. Elle constate déjà l'indulgence des plus grands à propos de la figure masculine
« Bernard hurlait. Il nous terrorisait, nous reprochait le malheur du monde. Ma mère et ma grand-mère nous imposaient d'être fiers de notre père et de nous en amuser : il faut le comprendre. Avec tout de qu'il voit, avec tout ce qu'il fait… (… ) Vous ne pouvez pas lui en vouloir. Ce n'est pas bien grave. »
« Pas de hurlements paternels devant les invités, mais un regard perçant, un regard qui glace les enfants de 7 ou 15 ans. La phrase cinglante, toujours quand il faut, celle qui cherche la faiblesse, la met en lumière et enfin humilie… pour des cacahuètes. »
Plus que la pseudo liberté portée en étendard par les
Kouchner, c'est le plaisir qui est recherché.
« A Paris, les parents déléguaient tout aux baby-sitter, quasiment des gouvernantes.(.. ) le week-end, c'était une autre, qui prenait le relais.
Pas question que ma mère soit asservie ! »
Le cataclysme en apprenant la vérité. Pour elle, qui connait la vérité depuis ses 14 ans et la porte comme une chape de plomb de culpabilité. Elle reprend très souvent le terme de « l'hydre », qui l'emprisonne dans ses tentacules. Mais aussi pour son frère ainé, Colin.
Tout ce qui faisait leurs fondations, leurs valeurs, s'écroule tel un château de cartes.
« Pour Colin, apprendre un tel secret à 40 ans, c'était voir toute sa vie comme un mensonge. Comme si dans son passé, il n'existait aucune vérité. C'était perdre d'un coup cette mère qu'il adorait. C'était perdre l'histoire qu'il s'était racontée, ses racines, ses choix. Tout était faux. »
La conclusion de
Camille Kouchner est forte et puissante. Elle sera également la mienne :
« Maman, toutes ces années, la culpabilité, la tristesse et la colère m'ont étouffée.
J'avais 14 ans et j'ai laissé faire. J'avais 14 ans et, en laissant faire, c'est comme si j'avais fait moi-même. J'avais 14 ans, je savais et je n'ai rien dit. (… )
Je serai toujours la mieux placée pour comprendre l'irrationnelle culpabilité de Victor. J'ai vécu avec la mienne, chaque jour, pendant trente années.
Jusqu'à ce que la petite fille alerte et amusée que j'étais, se libère de sa mère et tente d'empoisonner l'hydre en achevant ce livre ».