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Avec une écriture méthodique et inventive Agota Kristof révèle dans ces trois récits la brutalité audacieuse et déconcertante du mensonge, mais aussi de la vérité qui alimente certaines preuves rapportées par les victimes de guerre. Dans cette trilogie, les jumeaux se révèlent des êtres stupéfiants de cruauté ou l'humour noir fait passer la pilule...Cette indéniable tendresse qui relie les deux frères devenus grands, retrouvant la liberté de leurs faits et gestes dans leur pays délivré. Tout n'est qu'apparence, les chagrins sont imprégnés dans les tréfonds de leur cerveau marqué par les traumatismes de leurs infamies dont la guerre est la seule responsable dans les territoires occupés. Comment redevenir des êtres humains dits normaux? ils sont condamnés toute leur vie au silence et la tristesse, car en avouant leurs exactions d'hier dont leur survie en dépendait, à leur tour ils auraient été emprisonnés. Aux lendemains de la guerre, la haine tenace et omnibulante contre l'ennemi les auraient précipité dans un jugement hâtif et partisane en une humiliante condamnation à mort.
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Afin de ne pas dévoiler les surprises de cette trilogie, je ne résumerai que le début de son 1er volet. En effet, impossible d'évoquer le 2ème tome sans révéler la fin du 1er, ni de parler du 3ème sans… vous m'avez comprise !

Dans un pays en guerre, la mère de jumeaux nommés Claus et Lucas les confie à la garde de leur grand-mère, une femme méchante, avare et malpropre, surnommée "la sorcière" par le reste du village. Les deux garçons, âgés de 5 ans à leur arrivée chez cette mégère, font preuve d'une intelligence et de ressources hors du commun. Dispensés d'école, ils pourvoient eux-mêmes à leur instruction, qui va de l'étude de la Bible à l'observation des comportements humains les plus abjects. Comme exercice, ils s'astreignent à écrire, dans "Le grand cahier", des rédactions devant relater de la façon la plus objective leurs expériences diverses. le roman est la compilation de ces rédactions.
Il en résulte un style froid, dénué de tout apport émotionnel, mais néanmoins glaçant, car les scènes décrites sont souvent empreintes de violence, et le fait de s'imaginer qu'elles le sont par de jeunes enfants ajoute à leur noirceur.

Tout au long de la trilogie, l'auteure gardera cette distance vis-à-vis des sentiments : ses personnages, qui ont décidé de ne plus rien ressentir dans le but de pouvoir faire face à un monde injuste et cruel, subissent ensuite comme un handicap cette carence émotionnelle, porteuse dans les 2ème et 3ème volumes d'une immense mélancolie.

La relation ambiguë qu'entretiennent Claus et Lucas au bien et au mal est troublante pour le lecteur, qui est de plus déstabilisé par les rebondissements de l'histoire, que l'on pourrait qualifier d'histoire "à tiroirs". En effet, Agota Kristof nous plonge dans une réalité qui se dérobe pour en révéler une autre, elle-même enrichie d'un nouvel éclairage qui rend caduc le récit qui précède... et finalement, ne s'agit-il pas d'une seule réalité abordée sous divers points de vue plus ou moins fantasmagoriques, mais tous recevables ? Sur quoi est-il vraiment nécessaire et intéressant de s'attarder : sur ce qui est, ou sur ce que la souffrance, les désirs, nos mécanismes d'autoprotection, nous poussent à imaginer ?

De même, l'action se déroule dans un lieu et un temps qui ne sont jamais vraiment précisés : il est question du "village", de "la ville", de "la guerre" et de "la révolution", le quotidien est celui d'un pays totalitaire, où sévit la censure… là aussi, on a l'impression d'être à la fois dans un monde imaginaire mais inspiré de la réalité, appréhendé à partir de diverses perspectives, selon que l'on se place d'un côté ou de l'autre de la frontière.

Un style extrêmement simple qui sert un récit à la structure complexe, et une lecture qui ne laisse pas indifférent… à tel point que "Le grand cahier" a souffert de la censure : il a été interdit dans certaines bibliothèques (notamment au Québec) et l'enseignant de français d'un collège d'Abbeville a été soumis à une garde-à-vue et à une perquisition à son domicile pour avoir fait travailler une classe de troisième sur ce roman (les parents des élèves ont porté plainte en raison des scènes de zoophilie et de pédophilie qui y sont décrites).
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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La trilogie des jumeaux est un ensemble de romans qui en réalité ne font qu'un seul récit. Agota Kristof publie "Le grand cahier" en 1986 (directement en français). le roman forme un tout et l'histoire semble s'arrêter là. Sauf que les publications de "La preuve" en 1988, puis du "Troisième mensonge" en 1991 remettent en cause ce qu'on a lu dans le premier livre.
Si l'univers reste le même (cette petite ville hongroise, bien que jamais citée ou située), les personnages réapparaissent, mais le point de vue différent et les distorsions du récit obligent le lecteur à questionner ce qu'il a déjà lu. Pour preuve le changement de narrateur, selon les récits : « nous » dans "Le grand cahier", « je » (mais un « je » différent) dans les deux autres romans.
Au départ, donc, des jumeaux sont confiés par leur mère à une grand-mère qu'ils n'avaient jusqu'alors jamais connue, dans une petite ville de province. La femme est sale, haineuse, fait travailler les enfants et les insulte constamment. Pour survivre les enfants vont faire des exercices pour s'endurcir et leur attitude se révèle étrange, troublante voire inquiétante.
Tout sentiment ou empathie leur semble inconnu. Ce qui ne les empêche pas d'aider la voisine handicapée et leur fille… comme un devoir.
Un sentiment trouble, voire un malaise, s'empare du lecteur au fil des pages et pourtant impossible de lâcher le livre, tant la destinée tragique des jumeaux intrigue. Capables de violence comme de gestes d'entraide envers leur entourage et tout cela avec une logique qui leur est propre.
Les romans suivants ne feront qu'accentuer cette attitude, avec l'interrogation supplémentaire sur l'existence réelle ou supposée d'un jumeau, les années qui passent, les blessures qui perdurent. Sans oublier l'évolution sociale et politique du pays : la guerre, puis l'occupation par le « libérateur », une frontière fermée vers l'Ouest.
Un ouvrage, trois romans, une lecture souvent dérangeante, un style sec et incisif comme taillé au couteau, "La trilogie des jumeaux" a propulsé à juste titre l'auteure parmi les grands écrivains de la fin du XXe siècle. du grand art.
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oubler le lecteur en alternant sans crier gare de narrateur ou de points de vue, se jouant presque de temps qui passe ; ses racines catalanes donnant à ses histoires leur saveur si unique, et son goût exquis pour l'art, notamment la peinture ici, qui a une place centrale dans plusieurs nouvelles, et vous obtenez cette oeuvre dans laquelle on replonge avec un plaisir coupable de voir les mauvais gars l'emporter.



Le Grand Cahier, d'Agota Kristof (Points)

Mais que recèle donc ce grand cahier, qui fait perdre la tête à Lucas comme à Klaus, aux enquêteurs comme au lecteur. Cette trilogie est un véritable piège, un gouffre de la raison, dans lequel on tombe, tombe, tombe... Ne vous y méprenez pas, l'écrivaine sait ménager ses effets, et lorsque vous pensez avoir réuni suffisamment d'éléments pour ne serait-ce qu'apercevoir une trame ou une issue possible, elle se dérobe à votre raisonnement pour mieux vous égarer. Mais comme c'est plaisant d'être baladé comme ça. Rarement une oeuvre aura provoqué autant de rush de dopamine en moi.

De surprise en fausses pistes, de mensonges en queue-de-sac, cette histoire évoque aussi les traumas de la guerre, le maniement de la vérité et du mensonge pour assurer sa propre survie, dans un monde qui ne vous offre rien et qui vous prend tout. Quand il n'y a plus rien à perdre, pourquoi se soucier de la vérité?

Déstabilisant. Une lecture qui vous hantera.
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Absolument bouleversant. Addictif aussi, on ne lâche rien avant la dernière page du troisième volume.
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Cette trilogie est une oeuvre bouleversante, violente et dans laquelle l'auteure perd son lecteur comme jamais.
Magnifique
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Un livre, trois tomes.

Le premier tome est excellent. Il y a tout ce que j'aime dans le roman noir.

Par contre, les deux autres, j'ai beaucoup moins aimé. J'ai eu un peu l'impression que tout a été mis dans le premier tome. Ça m'avait un peu fait ça aussi avec la trilogie New-yorkaise de Paul Auster.
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(...) Déroutant, en effet. Voire perturbant. Mais tout simplement brillant. Ces trois livres sont singuliers et servis par une langue à la fois brute et aiguisée, sans fioriture, qui va à l'essentiel et touche là où il faut. Une lecture qui pourrait bien être indispensable et au sujet de laquelle je ne vois pas ce que je pourrais rajouter. (...)
L'article complet sur Touchez mon blog, Monseigneur...
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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Je viens de terminer ces 3 livres réunis en UN et heureusement je ne pense pas qu'il soit possible d'en lire un séparé des 2 autres.......ce qui est suprenant c'est que l'auteure a écrit ces 3 livres de 1986 à 1991!! je me demande ce que les personnes qui a l'époque ont lu "le grand cahier" à sa sortie en ont pensé......quoique ils doivent avoir été aussi perplexe que je le suis, finalement, à la fin de cette lecture.
C'est pas possible de vous la résumer ou de vous la raconter.....c'est l'histoire de frères jumeaux , au départ du moins après on s'y pert un peu .....dailleurs en lisant je me disait parfois "j'y comprend plus rien", mais en même temps c'est tellement bien écrit et les personnages si attachants qu'on a du mal a lâcher le livre pour faire autre chose ;-) pourtant l'ambiance y est souvent morbide et le paysage soit gris, soit noir !!
J'ai jamais lu un livre aussi prenant/marquant et "construit" de cette façon là.....vraiment je vous le conseille !!

lu en 2006.
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J'ai été complètement sous le charme de cet auteur que je voulais lire depuis très longtemps. Je me suis laissé porter par son oeuvre et le charme ne m'a pas quitté. Cependant, ce n'est pas une lecture facile. C'est très dense comme contenu.

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