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N.N. ( initiales de “nomen nescio “, qui signifie une personne anonyme ou non définie ), le héros de cette histoire, est un de ces individus qui ayant manqués le train de l'histoire, sont restés dont l'ancien monde où les gens vivaient par plaisir. Ils ont encore une idée romantique de la femme, l'amitié leur est un serment sacré, ils portent longtemps le même chapeau et sur leur cravate l'épingle est éternelle.....
Partiellement autobiographique, ce “petit roman” recèle la nostalgie d'un temps révolu que l'auteur hongrois considére comme un Paradis perdu et où l'on y décèle un vague air de Tchekhov ou de Tourgeniev. « C'était une Hongrie heureuse,où ce qui préoccupait le plus les gens était le savoir-vivre. »
Sur fond de chant de cigale (« .....la cigale grésillant parmi les feuilles de bardane, c'était la vraie vie » ) l'auteur déploie l'image d'une Hongrie de province de la région de la grande plaine hongroise de Nyírseg du début du XXiéme siècle où le temps s'est arrêté, “Ici, chacun voulait vivre de son passé, selon que son père ou son grand-père avait jadis été. C'est ici que cette étrange Hongrie grise, vantarde, crâneuse, ostentatoire, ronflait, baillait, s'ennuyait, traînait sa misère en menant le plus longtemps possible sa paresseuse vie.” Nyirseg est le pays natal de l'auteur naquit en 1878 comme fils naturel d'un avocat de la petite noblesse hongroise et de la bonne au service de sa famille, les Krudy ( les parents se marièrent finalement quand Gyula eu 17 ans, et eux leur septième enfant 😁). Ce livre Krudy l'écrit en 1919 alors qu'il a 41 ans. Devenu éditeur et écrivain célèbre à Budapest il retourne dans les lieux de son enfance, ressuscitant un passé qu'il évoque avec nostalgie et où les femmes sont à l'honneur.
C'est son deuxième livre que je viens de lire, après « L'affaire Eszter Solymosi » que j'avais beaucoup apprécié. Ici même si le ton et l'histoire sont différentes( la palette littéraire de l'écrivain semble très large en genre) sa voix est reconnaissable et personnelle. Gorgée de poésie (« Les ruines de l'ancien moulin à vent se faisaient réchauffer au soleil dans le bonheur, après avoir oublié les fantômes de la nuit, les hiboux et les chauves-souris ») et de mélancolie, par le biais d'anecdotes, un récit qui résume « une manière de vivre, un style de vie, retrouvés, reperdus, posés en valeurs désormais probablement inaccessible: l'ancienne vie magyare ».
Un roman magnifique qui nous transporte dans « la vraie vie » celle de notre imagination qui est ailleurs dans le lointain ou dans le passé.


« ....il est nécessaire que chacun ait sa propre cigale dont les chants et les bercements lui font oublier toute sa vie. »
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Dès les premières lignes, je me suis sentie projetée dans une autre réalité, un monde à l'atmosphère envoutante, passéiste. Gyula Krùdy possède une écriture ensorcelante, musicale qui touche au monde de la beauté. Je dois sa découverte à notre amie Bookycooky et je comprends aisément l'attraction que pouvait exercer Gyula Krùdy sur Sandor Marai qui le tenait en haute considération. C'est une écriture irréelle, onirique, celle qui vous fait oublier le quotidien, le médiocre, le laid. J'ai été touchée par la poésie qui se dégage de ce texte, par la nostalgie agréable qui exsude de ce récit.

A chaque page, on s'attend à voir surgir des tziganes au son des violons, des saltimbanques passent juchés sur des carrioles, des robes virevoltent, des paysages hongrois défilent sous nos yeux, tout est magnifié ! Les amours éphémères se cueillent de temps à autre hormis l'amour de Juliska qui attend.

Quel bonheur de pénétrer dans cette auberge accueillante, l'étoile Auberge avec sa lampe à pétrole et sa cheminée fumant sans cesse où des étrangers joyeux chantent des ritournelles après avoir dégusté le vin de Tokay.

Mais ce que j'ai particulièrement savouré c'est la façon dont la nuit inspire notre vagabond, N.N., sous les étoiles.

« Les nuits de pleine lune, les nuits des grues, des hérons, des oies sauvages, des canards pèlerins, lorsque les coups de fusil du chasseur Vencel parviennent du marais jusqu'à Sosto, les étoiles restent en retrait, les chalets « suisses », les maisons de plain-pied de la station balnéaire se cachent derrière des rideaux bleus comme pour veiller sur la tranquillité des dormeurs. C'est le silence, c'est la nuit, sous un chêne, à la clarté d'un bougeoir en verre, des ombres noires devisent pour savoir comment être heureux tout au long de la vie … Ces nuits de pleine lune, je rôdais, solitaire, autour du lac. L'ombre du poirier sauvage qui poussait au bord de la route était mon amie ; le noisetier sous lequel je m'étais jadis assoupi dans l'herbe ne m'avait pas encore oublié ; les roseaux chuchotaient avec douceur, comme s'ils attendaient leur cher ami, le canard sauvage ; la chauve-souris qui zigzaguait au-dessus de l'eau à la manière d'un esprit égaré, s'est arrêtée d'aplomb au-dessus de ma tête : indiquait-elle quelqu'un, semblable à une fusée noire, que j'errais là dans la roselière, le long de l'étroit ruisseau, dans le silence, la solitude douloureuse ? …. Si quelqu'un voulait me trouver, il fallait me chercher par là, traverser la passerelle moussue, ne pas s'effrayer des grenouilles faisant des culbutes dans le fossé, du bruissement du vent qui, dans son demi-sommeil, donne le signal, du scintillement d'outre-tombe du lac, du cri venant d'un autre pays des oie s sauvages hantant la plaine, de l'aspect fantomatique des lointaines rangées d'acacias, du chant des moustiques de la nuit qui résonne parfois comme une litanie funèbre devant un mourant ? … Je suis là. »

Je me suis promenée dans la Hongrie du début du XXème siècle et dans ses souvenirs perdus au fin fond de sa mémoire. J'y ai retrouvé, en sa compagnie, les rues enneigées de son enfance, son adolescence, ses premiers émois amoureux, ses parents et aussi Jella, femme d'un autre temps, courtisée par trois générations d'hommes, le grand-père, le père et le fils.

Dans la région de Nyirség, pays de bouleaux situé au nord-est de la Hongrie, le temps donne la sensation de s'être arrêté. Les gens vivent au rythme des saisons et du travail des champs. Ils sont heureux dans la simplicité et cette humilité lumineuse donne des passages d'une poésie qui – je présume – révèle l'âme hongroise.

Si N.N. nous confie les réminiscences d'un passé magnifié, il nous confie aussi son insatiable désir d'évasion, d'aventures, ce besoin de trouver ce petit quelque chose qu'on appelle « absolu » tant il ne peut se satisfaire de sa vie au quotidien. Perpétuel insatisfait, il quittera ses bouleaux pour Pest dont il reviendra à l'âge mur. Toujours en quête, le regard qu'il posera sur son enfance sera sublimé et c'est ainsi qu'il nous offrira son chant des cigales dans cette autobiographie.

« La lumière de la lune traverse les champs. Et les somnambules errent désemparés. La cigale fredonne leur chanson, chef d'orchestre de l'au-delà dont toute la mission tient en ces nuits uniques où le clair de lune aspire à l'âme des êtres ».

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N.N. héros anonyme, enfant anonyme, ce roman est, on le sait largement autobiographique. Il est poignant. Besoin d'exister, besoin de reconnaissance, besoin d'amour et d'amitié, N.N. quête, mais dans sa quête il brûle ses ailes, ses yeux et sa bouche.
Le roman s'ouvre sur des pages, "la cigale'"... la cigale fut ma nourrice, la demeure de la cigale, etc..., les images de la cigale sont magnifiquement géniales, la cigale on a compris est l'auteur lui même, cigale et non fourmi.
Les chapitres suivants montrent toute la quête d'amour de la part de l'auteur. Amour de la femme, amour d'un passé qui s'est fondu, amour d'une famille qui a disparu ou n'a jamais existé, le narrateur, Krudy lui-même sans doute, promène sa quête d'amour, sa tristesse, sa joie car il est toujours optimiste, sa nostalgie, donc ses paradoxes, à travers des paysages magyars absolument magnifiés sous sa plume.
Krudy est un amoureux éperdu de son pays, il ne nous épargne rien des couleurs changeantes à chaque saison, des sons, des parfums.
Lire un roman de Krudy c'est d'abord accepter de se transporter dans la Hongrie d'avant le traité de Trianon. Et pour comprendre la Hongrie, il faut en passer par ce traité.
Lire un roman de Krudy tel que celui-là c'est accepter d'osciller entre magie et réalité, entre féérie et quotidien, entre sublime et sordide.
Lire ce roman de Krudy, c'est se rendre à l'évidence que sa plume est hors de tout, hors du temps, hors de tous les temps, telle que celle de Proust,.
Lire ce roman de Krudy plutôt qu'un autre, c'est se plonger dans un univers "hongrois" ou "magyar" qui ouvrira sur les autres grands écrivains de ce peuple d'une beauté et d'une culture inouïes.
Lire ce roman c'est se délecter dans un monde qui n'existe plus, partager l'oeuvre d'un écrivain qui a disparu prématurément car il a consumé sa vie, mais c'est se régaler d'une écriture imagée à en rire, précise à en pleurer, colorée à en redemander, épicée à vouloir en relire.
Mais c'est un autre monde. Lire Krudy c'est se transporter dans un autre monde, un autre univers, une littérature différente, une littérature qui amène à une forme de pureté, une littérature qui nous élève. Et le plus, c'est qu'on en redescend pas.
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Gyula Krudy raconte dans ce livres ses souvenirs d'enfance. Son père, son grand-père, sa grand-mère, et plus discrètement sa mère apparaissent. Mais évidemment à la façon de l'auteur, impressionniste. Peu d'événements, et alors à l'arrière plan, révélés comme par inadvertance. Ce qui compte ce sont les sensations, les ambiances, les ressentis, et la nostalgie qu'ils éveillent, le regret fugitif de choses passées. Jusqu'à essayer de créer une suite, un présent au passé, dans lequel la réalité et le rêve s'entrecroisent.

On est toujours dans le même univers, et ici on entrevoit le substrat qui a pu y donner vie, dans l'enfance même de l'auteur. Peu de différences entre ses livres de fiction et sa vie, au point où l'on peut se dire que ce qu'il raconte inlassablement dans ses livres c'est la substance même de son existence. Que ses différents personnages sont des visages différents qu'il se donne, en essayant d'imaginer ce qu'une subtile variation aurait pu changer. Fascinant.
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"N.N.", ce livre précieux entre tous, je l'ai lu, relu et j'ai pensé que Krúdy était l'écrivain de la mélancolie heureuse. C'est très rare, un écrivain qui écrit pour le bonheur et non son contraire, dame Tristesse. Je pourrais vous citer des dizaines de passages à l'appui de ce que je vous écris là. Je me contenterai de glisser sous votre porte l'image de cette " aube d'été venant d'arriver comme la roulotte carillonnante des comédiens "... "Mélancolie heureuse " veut dire que l'on fait corps avec la fuite du temps au lieu de chercher à le retenir : pourquoi s'en effrayer ? J'aime infiniment que Krúdy évoque au passage "ces petites villes d'eaux qui furent si nombreuses dans l'ancienne Hongrie ". Ce monde a disparu, et pourtant j'en jouis encore.
Michel Crépu à propos de "N.N." de Gyula Krúdy dans La Revue des Deux Mondes
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N.N, enfant naturel, l'alter ego de Gyula Krudy, né d'un père de petite noblesse, et d'une servante. N.N avocat, séducteur, joueur a mené une vie décousue dans cette Hongrie bucolique, champêtre. Il décide à l'âge mur de retourner dans sa région natale, le pays des bouleaux en Hongrie Orientale. Avec des descriptions féeriques, colorées, qui nous font parvenir les senteurs de campagne, nous faisons une balade inoubliable dans sa vie, mais dans la nostalgie de l'enfance, et la jeunesse heureuse …et de cette Cigale protectrice qui nous narre ces aventures. N.N y retrouvera Juliska, la petite servante de la maison familiale ;elle aura élevé seule son fils, enfant naturel. N.N connaitra son fils, sera heureux de ses retrouvailles, mais il repartira en disant « adieu à cette période de son existence ».
Gyula Krudy est un grand écrivain hongrois ; il m'était inconnu, et avoue avoir découvert un auteur sensible, qui par son écriture imagée, colorée, a fait de N.N une découverte merveilleuse et donne envie de lire d'autres ouvrages
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De page en page, le lecteur déambule avec N.N., au gré des souvenirs de ce « voyageur égaré » : lui, ce grand solitaire inquiet, nous dresse le portrait du Nyírség, ce pays des bouleaux du nord-est de la Hongrie, région au train de vie rythmé par le passage des saisons et le travail des champs. C'est aussi toute une galerie d'hommes et de femmes au caractère d'un autre temps – la belle Jella, courtisée par trois générations d'une même famille, l'avocat Huray, Monsieur Szomjás (« un esprit fantasque, mais à peine plus flou que les seigneurs extravagants du Nyírség du siècle dernier »), les deux soeurs Ónodi, font partie de ces personnages qui émaillent le récit et prennent d'autant plus facilement d'ampleur que la vie rurale décrite en arrière-plan semble si paisible et retirée.
Lien : https://passagealest.wordpre..
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« Se laisser mordre par ce court roman est un plaisir des plus suaves. » - le Canard Enchaîné
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N. N., récit-clé de Gyula Krúdy est publié en 192?. C'est une espèce d'autobiographie, l'évocation de l'enfance et de la jeunesse de N. N., héros sans nom, la description de la campagne, l'histoire amusante d'un amour ancillaire et surtout du désir d'évasion du jeune homme, désir irrésistible qui lui fait quitter son ennuyeuse campagne. Il y revient pour retrouver son fils, déjà adolescent, et pour mesurer la vanité de ses anciens désirs, de sa fuite.
« Gyula Krúdy publie souvent le premier jet de son texte ce qui fait, au moins en partie, son charme inimitable » János Szávai
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