AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,19

sur 922 notes
5
35 avis
4
38 avis
3
12 avis
2
1 avis
1
0 avis
Traité critique sur l'absolutisme, intemporel et lucide
---------------

Que dire de plus par rapport aux commentaires existants ? Pas grand chose, si ce n'est que j'ai été frappé par la modernité de son "Discours", où à chaque page on pourrait faire des liens avec une actualité plus ou moins récente, plus ou moins nationale.

La version "traduite" en français moderne des Éditions Mille-et-une-Nuits est très fluide, précise, efficace. Si la légende dit vrai, ce livre aurait été écrit à l'âge de 18 ans...(les historiens en sont un peu moins sûrs) D'autant plus que le jeune La Boétie semble jonglé aisément avec les références de la Grèce classique : Homère, Xénophon, Thucydide, etc.

Ce livre, en peu de pages, va à l'essentiel et traite de l'asservissement volontaire du peuple au(x) dirigeant(s), de sa peur, de ses habitudes ancrés mentalement (l'habitus de Bourdieu), de son absence de révolte, de volonté individuelle ou collective. Des formes de la tyrannie, de la clique de sangsues collabos qui profitent du pouvoir pour acquérir un petit pouvoir local, de la gestion pyramidale des individus. Et donc en fin de compte d'une l'importance de la prise de conscience, de la désobéissance civile (Thoreau). Que ce soit des tyrannies sanglantes où des formes plus modernes d'un despotisme doux (Tocqueville), la servitude se montre toujours volontaire, établit dans les mentalités et dans les gestes.

L'ouvrage a l'intelligence de n'être qu'une critique acide, ne proposant ou n'avançant aucun moyen concret. Sa force en aurait été diminué, sa modernité également. Dans sa forme actuelle, ce discours rejoint le patrimoine mondiale des traités et essais capitaux, au côté de Platon, Aristote, Machiavel, Thoreau, Rousseau ou Tocqueville. Excusez du peu.

A vous de choisir, vivre en homme livre ou sous les fers des esclaves politiques.
Lien : https://www.amazon.fr/gp/cus..
Commenter  J’apprécie          50
Ce discours paru, de façon posthume, en 1576 a été écrit vers 1546-1548 (selon Montaigne) par un jeune homme âgé de 16 à 18 ans, à l'époque où abreuvés de culture gréco-romaine les jeunes cerveaux savaient réfléchir, analyser, synthétiser, douter et critiquer (cela a bien changé depuis !).
Étienne de la Boétie (1530-1563) a écrit une oeuvre majeure, d'une modernité et d'une actualité plus vraies que jamais, véritable leçon éthique et morale éternelle.
Il est à regretter que de tels textes ne soient plus ni étudiés, ni même mentionnés au cours des études de nos jeunes esprits qui gagneraient beaucoup à méditer dessus, à s'en inspirer dans le déroulé de leur vie (qu'elle soit privée ou publique) ; jeunes esprits que notre époque façonne volontiers en béotiens (i.e. Personnages lourds, peu ouverts aux lettres et aux arts, qui ont des goûts grossiers).
Commenter  J’apprécie          70
L'actualité du texte est impressionnante et s'impose dès le début du propos. A ces lignes, qui ne pense aux dictateurs passés, présents et à venir.
Qui ne pense au peuple russe aujourd'hui, serviteur de Poutine. Ou encore au peuple chinois.
Comment ne pas penser à la résignation du peuple juif pendant la montée du nazisme.
Dans un autre registre, ne peut-on affirmer, comme le fait La Boétie, que l'habitude est vecteur de tyrannie, cette habitude aujourd'hui est aussi celle de l'emprise médiatique et des objets connectés.
La tyrannie pyramidale est parfaitement démontrée avec pour fondations jeux, favoritisme et corruption.
Alors suffit-il de dire non et de désobéir pour assister à l'implosion littérale d'un régime autocratique? Est-il si facile de dire non quand l'intégrité physique est en jeu?
Le diagnostic est implacable mais les moyens de lutter au delà du « non » individuel sont explicitement limités.
Toute l'ambivalence du texte est là.
Commenter  J’apprécie          10
Etienne de la Boétie, passé à la postérité pour sa célèbre amitié avec Montaigne, que l'on a bien évidemment tous en tête, est devenu un peu moins célèbre que son grand ami car mort trop jeune, à 33 ans, mais il fut tout de même dans ce cours laps de temps sur terre, magistrat et homme de droit. Toutefois ce texte, qui est son unique et lui a valu sa renommée posthume, fut écrit bien avant à seulement 18 ans !
Car selon Montaigne, c'est en 1548 lorsqu'une révolte populaire contre la gabelle éclate et qu'elle se trouve réprimé dans le sang, que La Boétie aurait commencé à écrire son discours.
Dans ce texte, somme toute très court, une quarantaine de pages à peine, ce qu'il cherche à comprendre et à expliquer c'est pourquoi nous, les Hommes, acceptons-nous l'asservissement. Oui, pourquoi ? Vaste question qui pourrait remplir une bibliothèque entière, mais à laquelle La Boétie tente d'apporter quelques réponses. Il va le faire en puisant ses source de réflexion principales dans l'Antiquité. D'ailleurs ce texte aurait pu s'intituler « Discours de la servitude volontaire dans l'Antiquité » tant elle est omniprésente ! Si c'est un procédé qui a l'avantage de fournir un grand nombre d'exemples et de conférer à ses observations une aura intemporelle, il a en revanche l'inconvénient de devenir rapidement obscure pour quiconque n'aurait pas, comme lui, une vaste culture antique. Ce qui fut en l'occurrence mon cas, et bien que La Boétie explicite plutôt clairement ces anecdotes, j'ai déploré qu'il n'ait pas utilisé plus d'exemples contemporain pour étayer ses propos (car ce n'est pas les tyrans qui doivent manquer en ce milieu de XVIe siècle dans le monde !).
Quoi qu'il en soit de tous ces exemples greco-latins, il en tire un certain nombre de pistes : tout d'abord — et c'est ce que j'ai trouvé le plus intéressant —, il y a selon lui trois types de tyrans. Celui parvenu par les armes, celui parvenu par l'hérédité et enfin celui parvenu par élection. Encore une fois j'ai eu l'impression qu'il parlait davantage les deux premiers cas que du dernier, j'ai trouvé ça dommage car en tant que lecteur d'aujourd'hui c'est ce dernier qui nous parle le plus.
Quoi qu'il en soit, dans le fond, les conclusions qu'il en tire s'appliquent aux trois formes.
Et quelles sont donc ces conclusions ?
La Boétie estime que si les tyrannies perdurent et prospèrent c'est principalement du à l'habitude qui se forment chez les populations asservis. Autrement dit une forme d'accoutumance qui endort et ramollit toute velléité de résistance ou de réveil. Et pour peu que le régime tyrannique dure sur plusieurs générations, voilà toute notion de liberté réelle perdue, oublié dans le fond des âges, et la servitude transmise, collectivement et volontairement acceptée. Dans un phénomène paradoxale la masse en théorie plus forte que quelques uns, voit sa volonté faiblir et annihilée. Et effectivement, c'est à la fois très juste et très vraie, l'habitude chez l'homme, qu'elle soit collective ou individuelle, est la source de bien des maux et ce qu'il y a de plus difficile à corriger. L'aborder ici du point de vue de la société est original pour le siècle je trouve, en plus d'être extrêmement pertinent.
Cela dit, La Boétie nous montre que le pouvoir des tyrans repose sur de fragiles fondations ; l'adhésion par la peur (ou le mensonge), la longévité par l'habitude, l'abrutissement par les jeux et les plaisirs, des êtres pas ou peu aimé, toujours craint et bien moins protégé qu'on le croit. Finalement ce que l'on comprend entre les lignes et qui passe quasiment pour évident c'est qu'il suffirait de se soulever.
La Boétie ne le dit pas vraiment pas plus qu'il ne propose d'alternative, car ce texte est effectivement comme son titre l'indique, un discours, un plaidoyer plus qu'autre chose, l'amorce à une réflexion et à un recul sur notre propre condition.
La Boétie estime, tout comme Rousseau, que la liberté est l'état naturel des hommes, alors forcément toute entrave y serait par définition contre nature et effectivement on peut se demander si le fait même d'avoir des dirigeants, aussi lointains soient-ils de nos vies quotidiennes, n'est-ce pas une forme d'asservissement ? Je dis volontairement dirigeants et non tyran comme La Boétie car beaucoup de ce qu'il décrit et dénonce s'applique aisément de nos jours à ceux que l'on appelle simplement « dirigeants » ou « présidents ».
C'est pourquoi c'est un texte dont la résonance est intemporelle, hormis les références antiques, sa substance et les des idées qui y sont développées sont terriblement actuelles, et le seront, je pense, tant que les hommes vivront sur terre.
On lit et l'on ne peut s'empêcher de penser, pourquoi acceptons par simple habitude, par résignation, par passivité, le pouvoir de ceux qui ne nous font aucun bien ? Et combien de dictateurs dans le monde pourraient être renversés en moins de temps qu'il ne faut pour le dire si seulement leurs peuples se rendaient compte qu'ils leur sont supérieurs en force et en nombre ? C'est vertigineux.
Bref, c'est un texte qui ouvre une quantité de réflexion sur la nature de l'homme et sur nos sociétés, un texte passionnant, fondateur et que tout citoyen éclairé, ou qui veut l'être, devrait lire !
Commenter  J’apprécie          172
Le "Discours de la Servitude Volontaire" de Étienne de la Boétie, oeuvre philosophique d'une profondeur remarquable, demeure un texte incontournable de la pensée politique. Ce traité offre une réflexion saisissante sur la nature du pouvoir et de la soumission. La Boétie n'avait il me semble que 23 ans lorsqu'il l'a écrit, impressionnant!

Dans un style éloquent, La Boétie expose la question centrale de la servitude volontaire, démontrant avec une clarté remarquable comment les peuples, par leur consentement tacite, peuvent se soumettre à des régimes tyranniques. À travers une analyse minutieuse des mécanismes de domination, l'auteur met en lumière la complicité des gouvernés dans leur propre asservissement, dévoilant ainsi les fondements psychologiques de la soumission.

Le discours de la Boétie transcende son contexte historique pour offrir une réflexion intemporelle sur les rapports de pouvoir et les dynamiques sociales. Sa pensée, d'une lucidité saisissante, résonne encore aujourd'hui dans les débats sur la liberté individuelle et la résistance à l'oppression.

Oeuvre d'une rare pertinence, le "Discours de la Servitude Volontaire" continue d'exercer une influence profonde sur la pensée politique moderne, invitant les lecteurs à questionner les fondements de l'autorité et à défendre les valeurs de liberté et de dignité humaine. L'avoir étudié en classe préparatoire m'a beaucoup apporté!
Commenter  J’apprécie          70
Ce texte de la Boétie est étonnant. Au coeur d'un 16ème siècle où la royauté est omnipotente, cet auteur proclame en gros, libérez-vous du joug du tyran. Si une, 100 ou mille personnes cèdent au pouvoir d'un, voire de plusieurs dictateurs, un million de citoyens peuvent faire tomber ce pouvoir omnipotent.

Aujourd'hui, quelques personnes, possédant la presque totalité des richesses, font la loi sur toutes les autres, minoritaires en matière de biens mais largement majoritaires en nombre de citoyens. Ces conquérants des biens matériels, donc politiques, ne s'intéressent ni aux gens, ni au réchauffement climatique, ni à la perte de la diversité. Qu'attendons-nous pour appliquer les préceptes de la Boétie ? Comme Stéphane HESSEL auquel j'assimile ce jeune homme du 16ème siècle, "Indignons-nous !"
Commenter  J’apprécie          190
Donc, si je résume, M. de la Boétie étale son mépris de ceux qui s'inventeraient des histoires pour ensuite y croire sur des générations (il cite les Israeliens et les Egyptiens). Il affirme également qu'il ne faut jamais avoir de roi, même bon, car ce souverain aura le pouvoir d'être mauvais dès lors qu'il le souhaitera.

Et ensuite il nous pond ceci: "Nous avons toujours eu des rois si bons en temps de paix et si vaillants en temps de guerre, que même s'ils sont rois de naissance, il semble qu'ils n'ont pas été faits comme les autres par la nature, mais plutôt qu'ils ont été choisis par Dieu tout-puissant avant leur naissance, pour le gouvernement et la conservation de ce royaume"

Et à aucun moment il ne semble envisager qu'il y a peut-être une contradiction. Que peut-être le christianisme n'a pas de raisons d'être plus vrai que les autres religions. Que peut-être les rois de France n'ont pas de raisons d'être fondamentalement et perpétuellement bons, mettant le peuple français à l'abris de la servitude, sans nécessiter aucune de se révolter contre la servitude, contrairement aux autres peuples.
Les Français servent leurs rois parce que ces rois sont bons. Les autres servent leurs rois parce qu'eux-mêmes sont lâches et faibles. Les chrétiens croient en Dieu et le servent parce que c'est la vérité. Les autres (p.ex. les Juifs, d'après l'auteur) s'inventent eux même un tyran et sont donc des êtres méprisables.

Logique !
Commenter  J’apprécie          10
"Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres." Qui ne connait pas cette fameuse citation d'Etienne de la Boétie, figure humaniste majeure du 16ème siècle ? Deux siècles plus tard, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen entérinera ces propos dans son premier article: "Les hommes naissent et demeurent égaux et libres en droit."
Encore deux siècles plus tard, La Boétie est toujours d'actualité. La liberté, la vraie, est toujours un enjeu pour les peuples, une lutte coriace et continue. le véritable citoyen se doit de la défendre et déjouer les pièges de la servitude.

Courant après le prestige, les mondanités, les biens matériels, les hommes se laissent assujettir. Souvent contraints par un tiers mais toujours trompés par eux mêmes. On s'habitue, on se complait dans la servitude. C'est le choix de la facilité. On arrive même à oublier le gout de la liberté. L'habitude et l'éducation tordent nos inclinations naturelles. On pense bien évidemment à cette école et ces "grands corps" qui forment, ou plutôt déforment, aujourd'hui des petits rouages destinés à alimenter la grande machine.

"La nature de l'Homme est d'être indépendant et de vouloir le rester, mais elle est aussi de prendre naturellement le pli que lui a donné l'éducation.".

L'Homme sait justifier sa servitude, s'arrange avec sa conscience mais l'Homme avide de connaissances, l'Homme qui lit, réfléchit et agit tend vers cette liberté, ne serait ce qu'en esprit et par cela même ne peut se contenter de servir. Cet Homme est un Homme révolté. D'un autre coté, si les tyrans détiennent un semblant de pouvoir, ils ne peuvent véritablement connaitre l'amitié, la joie d'épancher son coeur, se confier. Ils ont troqué leur domination contre leur humanité.

Plus qu'une lecture enrichissante, ce discours est une véritable ode à la liberté, à la joie de résister, de combattre, à l'ardeur et au courage, à l'honneur et à la vraie gloire !



Commenter  J’apprécie          52
Je n'avais jamais lu ce classique de l'histoire des idées, c'est chose faite. Ce petit livre est très marqué par son époque dans son style d'écriture, mais le propos n'a pas pris une ride. Concernant le style, Étienne de la Boétie s'adresse à son lecteur presque comme au cours d'une conversation : il multiplie les exemples, digresse, revient à un argument déjà évoqué, au point que ces détours rendent la structure de l'ouvrage difficile à appréhender. Non que cela rende la lecture déplaisante ou le propos obscur, mais on est loin d'une démonstration au sens propre du terme. Une autre marque de l'époque, propre à sa culture dominante, est le recours systématique à des exemples tirés de l'Antiquité. de nombreux commentateurs ont remarqué que cela permettait également à l'auteur de s'éviter les foudres de ceux de ses contemporains qu'il visait plus ou moins directement.

Le Discours de la serviture volontaire est un grand texte, écrit par un tout jeune homme qui y fait preuve d'une étonnante maturité. Si je peux me permettre un conseil (de lecture), il sera utilement complété par Lune noire, petit livre de John Steinbeck qui me semble illustrer parfaitement le propos de la Boétie, quelques quatre cents ans plus tard.
Commenter  J’apprécie          132
Discours de la servitude volontaire est mon essai préféré, tout simplement parce qu'il est limpide, concis et d'une portée imparable pour les esprits qui l'ont lu. Ce petit manuel relativement court devrait être obligatoire au programme des collégiens ou des lycéens, tellement il éclaire sur les mécanismes de servitude des citoyens au pouvoir en place qui nous dirige.
C'est d'ailleurs sûrement, une des raisons, pour laquelle les politiques n'en parlent jamais, trop dangereux, le peuple pourrait décider de ne plus obéir servilement.
Le génie de ce texte est d'expliquer avec clarté les différents types de dirigeants auxquels nous pouvons être soumis et les conséquences qui en découlent :
- Les tyrans qui s'emparent du pouvoir par la violence,
_Ceux qui dirigent par succession héréditaire
- Et enfin les derniers, élus par le peuple.
Mais là ou résonne le mieux ses propos, c'est dans la croyance bête des citoyens de penser qu'une fois leurs représentants élus, ils seront bien gouvernés dans le sens de leurs intérêts. En fait l'auteur nous démontre le contraire, une fois élus, les dirigeants commandent souvent selon ce qu'ils croient bon pour nous et vont donc dans une direction néfaste pour le peuple. C'est là, que La Boétie nous tance, en arguant du simple fait, citoyens ne vous soumettez plus, ne servez plus votre chef présumé, créant la première désobéissance civile officielle de l'histoire tout en insistant bien sur la nécessité de ne pas recourir à la violence contre des dirigeants élus.
Son mot d'ordre est simple : brisons pacifiquement les chaînes que tous nous nous sommes données !
Commenter  J’apprécie          190




Lecteurs (3063) Voir plus



Quiz Voir plus

Philo pour tous

Jostein Gaarder fut au hit-parade des écrits philosophiques rendus accessibles au plus grand nombre avec un livre paru en 1995. Lequel?

Les Mystères de la patience
Le Monde de Sophie
Maya
Vita brevis

10 questions
440 lecteurs ont répondu
Thèmes : spiritualité , philosophieCréer un quiz sur ce livre

{* *}