Heureusement, le livre est court. Je me suis donc tenue à mon habitude de terminer tout livre commencé, gardant toujours espoir de me familiariser au style ou de découvrir tardivement une intrigue originale…Le moins que l'on puisse dire est que la lecture n'est pas fluide, car l'auteur croit pimenter la chose en adoptant une narration par chapitres non chronologiques. Il ne reste donc plus qu'à se dépêtrer entre les dates, les époques et les prénoms de tous les membres de ces deux familles, bien évidemment soigneusement suranés.
Dans un style extrêmement précis, assez emphatique, lourd d'une surenchère d'adjectifs, au cas où le lecteur n'aurait pas compris, l'auteure nous raconte comme s'il s'agissait de l'affaire du siècle, une très banale histoire de famille. Férue sans doute de psychogénéalogie, elle fait tourner deux
histoires familiales autour de deux évènements : le frère jumeau de Paul mort accidentellement en 1908 à l'âge de 5 ans, dont on ne parle pas dans la famille, ou par ellipses, et la « fille-mère" Gabrièle qui vit une vie pseudo libre à Paris, a un enfant avec Paul (lien ignoré entre les deux familles) mais se décharge de son éducation sur sa soeur et son beau-frère. Ces deux évènements sont censés faire subir un poids, une injonction à
Paul D abord, puis à André, chacun en tant que fils, d'où le titre du roman.
Tout cela se passe en « province », entre le Lot et le Cantal, entre familles de petite et moyenne bourgeoisie. Armand, le jumeau de Paul meurt en 1908 à l'âge de 5 ans. Quant à Paul Lachalme, il fait de brillantes études de droit, monte à Paris, devient avocat Boulevard ARAGO, vit une vie de célibataire polygamique et instable alors qu'il est le père sans le vouloir et peut-être sans le savoir d'André. Les jumeaux ont un troisième frère, Georges, plus jeune qu'eux.
De la rencontre passagère de Paul avec Gabrièle, l'infirmière de son lycée, est né André, paré de tous les atouts intellectuels et physiques de son père, qu'André ne rencontrera pas malgré quelques vains efforts sans conviction. le récit de sa tiède tentative de rencontrer son père laisse pantois : Imaginons que l'on ait identifié et localisé un cabinet d'avocat, le plus simple, pour le rencontrer est évidemment de prendre rendez-vous, plutôt que de s'asseoir pendant une demi-journée sur le boulevard, en face du cabinet et de regarder les personnes entrant ou sortant de l'immeuble, sans tenter d'autre approche que de sonner benoitement à la porte du cabinet fermé en fin de journée…
Donc André, le fils sans père, ou plutôt dont il sait un peu et ne veut pas savoir plus, connaissant l'identité et l'adresse, surmonte néanmoins placidement la situation. Il est marié avec Juliette dont il a un enfant, Antoine. Depuis sa plus tendre enfance, André a été choyé par sa tante Hélène, laquelle s'est comportée comme sa vraie mère aurait été supposée le faire. Il fait l'admiration de ses cousines, sans parler de Léon, mari de sa tante qui l'adore visiblement.
A 20 ans, André s'engage dans la résistance et en sort en héros, alors que les oui-dire situent son père du côté de la collaboration, l'ayant obligé à prendre ses distances en se faisant oublier quelques temps dans une maison familiale avant de reprendre ses activités d'avocat.
En trois générations, le niveau socioculturel s'élève, mais il en a été ainsi d'une manière très répandue en France entre les générations 1880 et 1980. Pas besoin de sous-entendre que les petits ou grands drames familiaux en seraient le moteur caché.
Cette histoire familiale, et en particulier du fils sans père est bien loin de briller par l'originalité, nombre de familles ayant traversé les deux guerres ayant, au fil des générations, des secrets plus ou moins hermétiques. le livre se contente de tourner en boucle sur qui se marie ou pas avec qui, qui sont les enfants, évoquant bigrement les commérages de petites villes... de certaines province...
Ce sera Antoine, fils d'André, le fils sans père, qui fera une brève visite à son cousin, neveu d'André, fils de Georges pour le faire parler et se délecter de cette histoire familiale, supposée le délier, lui et sa descendance, du poids du passé, parce que le contact entre les familles de Gabrielle et de Paul aura ainsi eu lieu. Dès lors que ces deux familles auront eu ce contact unique et fugace, tout va sans doute aller très bien, pour toutes les générations suivantes… ? C'est ce que l'auteur semble croire…Toutes ces
histoires d'enfant mort en bas âge et/ou d'enfant caché existent dans de nombreuses familles. Pas besoin d'en faire toute une histoire… sauf si l'on est ardemment convaincu de la réalité et des bienfaits de la psychogénéalogie qui permet de trouver des explications sur mesure et sans doute trop simplistes, aux relations entre générations .