Pour faire vivre l’industrie, il fallait toujours de nouvelles industries ; c’était comme une sorte de démence.
Il voulait passer pour un "vrai écrivain", ce qui n’était que sottise. Le vrai écrivain, c’était celui qui trouvait des lecteurs.
" Tu as quatre sortes de poils, lui dit-elle. Presque noirs sur la poitrine, alors que tes cheveux ne sont pas foncés ; une moustache dure et roux foncé, et ici, tes poils d'amour, une petite toison d'or rouge, comme du gui. Ce sont les plus jolis !"
Elle appréciait l'intériorité de ce reste de forêt, le mutisme réticent de ces vieux arbres. Ils incarnaient en même temps la puissance du silence et la vitalité d'une présence. Eux aussi patientaient, avec obstination, avec stoïcisme, dans la puissance de leur silence. Peut-être attendaient-ils seulement leur fin, seulement l'heure d'être abattus, emportés, l'heure où disparaîtrait la forêt, seulement le terme de leur univers.
L'amour n'est qu'une forme de conversation ou les mots sont mis en action au lieu d'être parlés.
Il était penché vers elle et lui caressait doucement le visage.
- Tu es un bon con, tout de même. Le meilleur petit con qui reste sur la terre. Quand tu le veux bien !
- Qu’est-ce que ça veut dire, con ?
- Comment, tu ne le sais pas ? Con ! C’est toi, là en bas.
- Alors, le con, c’est comme baiser ?
- Non, non. Baiser, c’est seulement ce qu’on fait. Les animaux baisent. Le con, c’est beaucoup plus que ça. C’est toi-même, comprends-tu ? Et tu es bien autre chose qu’un animal, même en baisant. Con ! C’est ce qui te rend si belle, ma petite !
Elle se leva et l’embrassa entre les yeux, ces yeux qui la regardaient, ces yeux si sombres et si doux, d’une ineffable chaleur, d’une insoutenable beauté.
- Tu m’aimes ? dit-elle.
Il l’embrassa sans répondre.
- Va-t’en maintenant, dit-il.
Elle s'irritait contre cette manie de tout mettre en mots. Les violettes étaient les paupières de Junon et les anémones des épouses inviolées. Comme elle détestait les mots qui se mettaient toujours entre elle et la vie ; c'étaient eux les violateurs, ces mots tout faits qui suçaient la sève des choses vivantes.
A chaque jour suffit sa peine. A chaque moment suffit l'apparence de la réalité.
- [...] Les esclaves de Néron différaient extrêmement peu de nos mineurs ou des mécaniciens de Ford. Je parle des esclaves qui travaillaient dans les mines et dans les champs. Ce sont les masses : on ne les change pas. Un individu peut émerger des masses, mais ce fait exceptionnel ne change rien. On ne peut pas changer les masses. C’est là un des faits les plus importants de la science sociale. Panem et circenses !
Constance rentra lentement à la maison. La maison ! C’était un beau nom, bien chaud, pour cette grande baraque triste. Mais c’était un mot qui avait fait son temps. Il n’avait plus de sens. Tous les grands mots, semblait-il, avaient perdu leur sens pour les gens de sa génération : amour, joie, bonheur, maison, père, mère, mari, tous ces grands mots puissants étaient à moitié morts aujourd’hui, et mouraient chaque jour davantage.