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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Magnifique roman très instructif sur l'Islande du XVIIIe siècle qui m'a appris beaucoup de choses comme la vie à l'époque, la façon dont la justice (ou l'injustice ?) y était rendue, la toute puissance du roi Danois ... bref, j'ai adoré cette lecture. Pour de plus amples détails, je vous invite à lire les critiques de viou1108, raton-liseur, dbacquet et Woland qui ont admirablement développé le sujet, je m'incline devant leur érudition.

Challenge Pavés - 2016-2017
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Publié en pleine Seconde Guerre mondiale alors que l'Islande, à peine autonome du Danemark et bientôt officiellement indépendante, sert de base aux Etats-Unis, c'est-à-dire entre 1943 et 1946, La cloche d'Islande est non seulement le roman le plus connu de Halldor Laxness mais aussi tout à la fois un roman historique et une ode à la liberté fondamentale et inhérente aux Islandais.

La cloche d'Islande retrace les trajectoires de trois personnages représentant chacun une part de l'âme islandaise et qui, chacun à leur manière et selon, ou contre, leurs volontés, seront pris dans les tourments politiques d'une île magnifique et misérable. Magnifique, puisque les paysages décrits par Laxness rendent compte d'une nature tout à la fois hostile et poétique et qui font croire que si les dieux existent, l'Islande ne peut être que leur oeuvre. Misérable puisque l'île est dépendante du Danemark qui ne sait que faire de cette possession lointaine, peuplée de gens à la limite de l'humanité selon les Danois, où l'on se bat pour un bout de corde ou une tête de requin pourrie.

La première partie a pour personnage central Jon Hreggvidson, voleur de corde, engagé pour détacher la fameuse cloche d'Islande qui sonnait aux temps anciens pour les réunions de l'Althing (Parlement islandais où l'on traite des affaires de politique et de justice) et qui tue, ou non (jamais on ne le saura), le bourreau du roi danois. Condamné à mort par le gouverneur Eydalin, il est sauvé in extremis par le caprice de la fille de ce dernier, laquelle l'envoie ensuite au Danemark porter un gage d'amour à Arnas Arnaeus, commissaire du roi en Islande et grand collectionneur de livres. Echouant en Hollande, passant en Allemagne, Hreggvidson finit par arriver au Danemark mais Arnaeus refuse le gage d'amour, préoccupé seulement par ses livres.

La deuxième partie se focalise sur Snaefrid, la fille du gouverneur Eydalin. Mariée à un obscur junker qui joue ses biens, puis son domaine et enfin son épouse contre de l'eau-de-vie, courtisée par l'archiprêtre Sveinson, sorte d'archétype de l'austérité protestante qui refuse la vie et l'amour malgré son idéologie chrétienne, Snaefrid, surnommée le soleil de l'Islande, doit surtout faire face au dilemme que représente le retour d'Arnaeus sur l'île. Celui-ci est chargé de revoir les procès et les verdicts rendus par Eydalin, matérialisant ainsi le pouvoir du roi du Danemark sur l'île. Parmi les procès révisés, celui de Jon Hreggvidson est le seul sur lequel plane encore l'ambiguité. Cette deuxième partie montre le prix à payer pour la liberté. Pour Snaefrid, cela passe par la chute des siens et la solitude absolue.

Dans la troisième partie, Arnas Arnaeus est sollicité par les Hambourgeois pour devenir le gouverneur de l'Islande, étant entendu que les Danois souhaitent vendre l'île. Scientifique et intellectuel, Arnaeus est aussi un idéaliste qui imagine redonner son honneur à l'Islande, faisant de l'île une république pour ainsi dire indépendante, dans la lignée des anciens colons qui fondèrent là, entre l'Europe et l'Amérique (qu'ils visitèrent et colonisèrent !) un modèle politique unique, et dont le travail incessant de copistes sauvegarda à lui seul le patrimoine littéraire et mythologique scandinave.

Jon Hreggvidson, ce voleur et père indigne, cet assassin même, est au centre de la tension qui unit en même temps qu'elle atomise Snaefrid Eydalin et Arnas Arnaeus. Tension amoureuse qui unit trente ans durant deux personnages qui comptent parmi l'élite islandaise. Amour jamais satisfait, et qui pourtant dure et rapproche inexorablement les deux amants. Tension politique, aussi, qui les désunit, Arnaeus souffrant de sa position de commissaire du roi qui le place au-dessus de la mêlée politique islandaise et le conduit à bouleverser l'équilibre de la société. Tour à tour heureux messager des promesses d'amour et objet que la justice islandaise - et à travers elle, Arnas Arnaeus et Snaefrid - se déchire, Jon Hreggvidson est pourtant le seul personnage immuable - au sens : que n'atteignent pas les événements - du livre, solide fermier du Christ comme il aime à se décrire, indécrottable réciteur des rimes de Pontus, peau tannée par les coups et le rude climat.

Outre sa profondeur d'analyse, son goût pour l'histoire et l'anecdote, outre cette formidable capacité à tirer de l'histoire tragique une réflexion sur l'âme islandaise et la liberté, La cloche d'Islande est un livre qui marque par la profusion de l'écriture, son humour (quelques scènes cocasses tout de même !), sa structure aussi, très équilibrée, et dans laquelle pourtant les rythmes et les procédés changent. Laxness ajoute ainsi au conte philosophique voltairien (Hreggvidsen comme nouveau Candide dans la première partie) une dose de tragédie grecque dans laquelle les dieux d'Asgard semblent se rire de la destinée de l'île et des trois personnages centraux du livre.
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Halldor Laxness (1902 - 1998), lauréat du Prix Nobel 1955.

La Cloche d'Islande est une fresque historique se déroulant au début du 18ème siècle, en Islande et dans les pays voisins.

incipit :

"Il fut un temps, est-il dit dans les livres, où la nation islandaise ne possédait qu'un seul bien de valeur marchande. C'était une cloche. Cette cloche était suspendue au pignon de la maison de la Lobretta, à Thingvellir, sur la rive de l'Öxara, attachée à une poutre sous les combles; on la sonnait pour se rendre aux tribunaux avant les exécutions...."

Cette cloche ne jouera aucun rôle dans l'histoire, le roi de Copenhague ayant besoin de bronze pour fondre des canons vint la réquisitionner. Cette cloche est le symbole de la nation islandaise et le rapt de la cloche est le prélude à l'oppression que le Danemark a imposé à l'Islande. Il est significatif de noter que La Cloche d'Islande fut publiée en 1943 alors que l'Indépendance de L'Islande fur prononcée à Thingvellir le 17 juin 1944 sur place.

Le livre se compose de trois parties : La cloche d'Islande  raconte les pérégrinations de Jon Hreggvisson, paysan gaillard et paillard, voleur de corde, peut être meurtrier sans remords du bourreau du Roi du Danemark. Rustre peut-être, mais insolent et poète, il rimaille à chaque occasion,

Le gaillard obtint son déduit,

Mit près de soi la femme dans son lit

De l'ivresse d'amour empli,

De l'ivresse d'amour empli

A peine avait-elle dit oui"

Toute sa vie, il chante Les Anciennes Rimes de Pontus pour narguer les bourreaux ou les autorités.

Condamné à mort, il s'enfuit, arrive en Hollande, puis au Danemark pour solliciter la grâce du roi. Roman picaresque, pas de cape ni épée, quand Jon a un chapeau, des bottes et une corde il est déjà heureux.

La Vierge Claire, est centrée autour du personnage très séduisant de Snaefrid, le soleil de l'Islande, fille du Gouverneur de l'île mais mal mariée au junker Magnus de Braedradunga. Ce dernier  possède un domaine aux fermes de tourbe à moitié en ruine. Soiffard, il est capable de vendre ses terres, ses fermes et même sa femme pour un verre d'eau de vie. Réduite à la mendicité par son mari, Snaefrid se réfugie chez sa soeur, la femme de l'évêque de Skalholt.

La dernière partie L'Incendie de Copenhague gravite autour du savant Arnas Arneus , vice-gouverneur de sa Gracieuse Majesté, assessor consistori, professor philosophiae et antiquitatum Danicorum. Cet érudit cherche à retrouver et à préserver les manuscrits islandais anciens. Il les déniche dans les lits des paysans qui utilisent le parchemin pour ressemeler les chaussures, ou pour obturer les fenêtres. Pour retrouver le livre d'une islandaise parvenue jusqu'en Amérique dans les temps anciens, il va jusqu'à  Rome. Il ne se contente pas de collectionner les livres anciens, il tente d'utiliser son crédit auprès du Roi du Danemark pour améliorer l'ordinaire et la justice rendue à l'Althing de Thingvellir.

Livre d'histoire décrivant la vie misérable des Islandais au début du 18ème siècle. Les marchands danois ont le monopole du commerce et il est strictement interdit aux Islandais d'entrer en contact avec les navires hollandais ou anglais qui croisent dans la région. Les pêcheurs islandais n'ont d'autre choix que de livrer leur pêche à Copenhague (huile de baleine) quand ils peuvent pêcher car on leur rationne corde, ficelles et hameçons pour leurs lignes. La disette règne sur l'île. Peste, variole, lèpre déciment la population.

Livre d'histoire mais aussi livre de poésie nourri de légendes nordiques, de sagas, de généalogies, d'érudition et même de latin. 

Au retour d'Islande, je peux mieux imaginer comment l'Althing - le parlement vieux de plusieurs siècles - a perduré, non pas comme institution qui légifère mais comme tribunal où se rencontrent nobles et mendiants, marchands et évêques. On voit aussi faucher l'herbe, traverser les rivières glaciaires. Chevaux, chiens ne sont pas oubliés.

Une conclusion magnifique à notre voyage et à toutes ces lectures islandaises!
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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Au début du XVIIIe siècle, la « longue nuit » qu'impose le Danemark à l'Islande, réduite à la misère, semble ne jamais vouloir prendre fin. Comble de l'insulte, le pouvoir danois confisque la cloche de l'Alþing, le parlement millénaire des Islandais, pour en faire des canons. Face à cet affront, un homme se lève, annonçant le réveil de l'Islande.

Plongé malgré lui au coeur d'une épopée picaresque, ce misérable paysan ainsi que les hommes et les femmes qui continueront son oeuvre incarne tout un peuple, rebelle, doté d'une capacité de résilience hors-normes et jaloux de ses traditions, notamment des histoires et chansons qui se transmettent génération après génération. Chef d'oeuvre du Nobel islandais Halldór Laxness, La Cloche d'Islande est une merveilleuse et passionnante introduction à l'histoire de l'Islande et à ce qui constitué l'âme islandaise.
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Íslandsklukkan
Traduction : Régis Boyer

Par une étrange coïncidence, je postais tout à l'heure sur Kenzaburô Ôé qui fut Prix Nobel de littérature en 1994 et voici maintenant celui qui reçut le même prix, mais en 1955, pour "avoir ressuscité l'ancienne tradition narrative islandaise."
Né en 1902 dans le milieu paysan, à Laxness qui, plus tard, lui servira de pseudonyme, Halldór Gudjonsson arrête ses études avant d'avoir obtenu son baccalauréat. Mais cela fait déjà un certain temps qu'il écrit. Rebelle-né, il s'insurge contre la religion d'Etat - le prostestantisme luthérien - et ira jusqu'à se convertir au catholicisme en 1923. Il abjurera d'ailleurs un peu plus tard mais il faut dire à sa décharge qu'il est aussi, en Islande, le traducteur de Voltaire.
C'est un grand voyageur : Paris d'abord où il approche le mouvement Dada et les Surréalistes ; les USA et surtout la Californie ensuite (à Hollywood, ses scénarii ne sont d'ailleurs pas passés à la postérité) ; le Canada ; l'URSS qui le verra adhérer à l'idéologie communiste jusqu'en 1956 où, une fois de plus, il rompt avec éclat. A la fin de sa vie - il vécut très vieux, centenaire à deux ans près - revenu dans son pays natal, il se tourna vers les systèmes philosophiques orientaux, notamment le Taoisme.
Et puis, bien sûr, il écrit. "La Cloche d'Islande" passe pour son chef-d'oeuvre. Je ne saurais le dire puisque c'est le premier ouvrage de Laxness que je lis mais une chose est sûre : cet étrange roman est une espèce de météorite, la trace et la résurrection d'un passé qui a permis au peuple islandais de survivre à l'occupation danoise et de finir par en triompher.
Certes, on peut le résumer mais en aucun cas, on ne saurait donner au lecteur une idée exacte de son style, épique, foisonnant, une espèce de chaînon manquant entre la littérature moyen-âgeuse et la littérature moderne : c'est un peu comme si, en s'appuyant sur le passé littéraire de son peuple, issu de l'oralité la plus pure et retranscit dans les sagas, Laxness avait façonné une chanson de geste moderne où tiendrait toute l'Histoire de son pays.
La construction répartit l'action en trois parties :
1) la première, "La Cloche d'Islande", a pour personnage principal un paysan pauvre mais matois, nommé Jon Hreggvidsson. Ses aventures sont un mélange de Rabelais et de Swift. Jon est ce que l'on peut appeler un mauvais sujet mais, s'il passe beaucoup de temps à voler, c'est qu'il est pauvre, que les Danois ont interdit aux Islandais de commercer avec tout autre pays que le Danemark et que la vie est, comme d'habitude, particulièrement pénible aux humbles. Jon dérobe un bout de corde - cette corde soutenant la fameuse cloche qui, selon la légende, existait bien avant que l'Homme abordât en Islande - afin de s'en faire une ligne. Comme, quoique pauvre, il se veut libre, il se permet aussi quelques plaisanteries malvenues envers le roi du Danemark. A partir de là, il se retrouve flagellé, en prison et bientôt condamné à la pendaison. Mais la fille du gouverneur s'interpose et le fait évader, le chargeant au passage d'une mission pour son amant, Arnas Arnaeus, Islandais émigré au Danemark ...
2) dans la deuxième partie, "La Vierge Claire", c'est Snaefrid qui accède au rôle principal. Seize années se sont écoulées depuis qu'elle a confié son message à Jon. Elle a épousé sans amour un junker fort porté sur l'eau de vie, Magnus de Braedratunga. le couple est sans enfants mais, en raison des habitudes de dilapidation et de boisson du mari, est pratiquement ruiné. Bientôt, ils seront expulsés de leur domaine. Mais il y a plus grave : le père de Snaefrid, le gouverneur, est menacé de déchéance pour certains jugements - dont celui de Jon Hreggvidsson - qui ont été prononcés sous son administration. Arnas Arnaeus revient en effet au pays pour en juger, mandaté par le roi du Danemark ...
3) la troisième et dernière partie - la plus brève : 18 chapitres pour 20 dans chacun des volets précédents - "L'Incendie de Copenhague", on voit Snaefrid, qui a renoué commerce amoureux avec Arnas, mener une lutte longue, difficile et dangereuse pour que lui soit restitué le domaine que possédait son mari, dont elle est désormais veuve.
Avec ces trois points, on n'aura dessiné que le squelette de cette épopée, mais au moins pourront-ils servir de points de repère au lecteur, un peu dépaysé sans doute par les noms islandais mais aussi par le matériau lui-même et la façon dont Laxness l'a forgé, de cette épopée irracontable et prodigieuse où se nichent toute l'âme d'un pays et le souvenir inoublié des guerriers nordiques et celtes - eh ! oui ! celtes, la chose est prouvée et ce n'est pas un hasard si, lorsqu'il se convertit au catholicisme, Laxness choisit "Kiljan" comme second prénom - qui, les premiers, peuplèrent l'Islande.
A lire à haute voix, pour ne pas trop s'y perdre et goûter toute l'art du conteur (traduit par Régis Boyer, un inconditionnel) ainsi que son amour, immense et je suis tentée d'écrire indicible, pour son pays, l'Islande. ;o)
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Trois récits, trois personnages, trois tons.
C'est trois fois magnifique.
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La cloche d'Islande, souvent considérée comme le chef-d'oeuvre de Halldór Laxness, prix Nobel de littérature en 1955, est initialement parue en 3 volumes, centrés chacun sur un des trois personnages principaux, pris dans des tourmentes politiques, judiciaires, familiales ou sentimentales. Jón, Snaefrid ou Arnas, tous trois placent, au-dessus de tout, leur honneur, celui de leur famille ou celui de la nation. Il y d'ailleurs chez Snaefrid quelque chose de cornélien : pour restaurer l'honneur bafoué de son père, elle devra trahir l'homme qu'elle aime. Laxness fait revivre l'Islande du XVIIIè siècle, plongée dans une grande misère et écrasée par le Danemark ; et à travers le propos historique, il dénonce les dangers plus sournois qui, dans l'immédiat après-guerre, menaçaient la nation tout récemment indépendante. Oeuvre majeure de la littérature islandaise moderne, imprégnée des sagas dont elle reprend certains codes, La cloche d'Islande adopte un style tour à tour épique, satirique ou dramatique. Ce texte appartient au patrimoine littéraire mondial.
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