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3,85

sur 313 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Hervé le Corre, 68 ans, sait bien qu'il ne verra pas les temps qu'il nous décrit cependant avec une précision diabolique dans son dernier opus. Il s'adresse donc aux jeunes générations, celles « Qui après nous vivrez », la référence à François Villon est explicite. Un de ses meilleurs romans, parmi les plus noirs qu'il ait écrit, j'y retrouve le souffle de Dans l'ombre du brasier.

Une dystopie, certes, mais la mise sous nos yeux - qui refusons de voir - de situations pourtant déjà vécues par nos contemporains revenus à l'état sauvage, de scènes de guerre telles qu'elles se déroulent en ce moment.

Cela se passe entre 2050 à 2150, autrement dit : demain. le réchauffement climatique est à son apogée, des vagues successives de pandémies ont décimé les populations du monde entier, les étendues boisées des Landes de Gascogne ne sont plus que décombres fumants, des petits groupes d'individus fuient les exactions de commandos armés qui pillent et violent toute présence humaine sur leur passage - prémonition du carnage du 7 octobre ?

Des seigneurs de guerre exercent leur cruelle férule sous prétexte de principes religieux syncrétiques mais toujours asservissant les femmes leurs désirs bestiaux. Nous voilà propulsés sous les décombres de Berlin ou Hambourg en mai 1945, en Haïti, au Darfour, au Congo, au Niger, à Kherson, parmi les réfugiés de Gaza sous leurs tentes gorgées d'eau …

Au coeur de cet enfer que n'aurait pas même imaginé Dante, une dynastie matrilinéaire de survivantes : Rébecca, Alice, Nour, Clara … Elles fuient, mais où ?

Périodiquement attaquées, submergées par des bandes de « routiers » comme au Moyen-Âge. Ce sont elles, ces femmes, qui transmettent la vie et les vestiges du monde d'avant, leurs hommes sont faibles, absents, blessés comme Marceau, Martin, Gabriel. Léo, peut-être, le tout jeune héros, s'en tirera-il ?

Une seule catastrophe manque à ce tableau cataclysmique : l'agression nucléaire – comme dans Malevil (1972) de Robert Merle. La guerre est venue de l'Est en 2035-36 puis une gigantesque cyberattaque a fait s'effondrer le système numérique de la planète. Les survivants errent et reviennent à la technique de survie des chasseurs-cueilleurs, par petits groupes, tentent cà et là de reconstruire une communauté pétrie d'esprit des Lumières, comme dans L'année du lion de Don Meyer (2016) …

Pas vraiment un livre pour vous redonner le moral, mais surtout un exercice de style époustouflant, un récit d'un réalisme qui dépasse toute représentation cinématographique, des personnages dont l'humanité laisse sourdre un espoir ténu en la sauvegarde du genre humain, même après autant de catastrophes.

Moi non plus, je ne verrai pas cette effondrement de notre monde d'aveugles. Ouf !
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"Back in black"

Quand le moyen-âge s'écrit au futur.
Une panne d'électricité générale. La civilisation funambule, fragilisée par les crises et les pandémies, vient de perdre l'équilibre et bascule dans le chaos total. Une chute sans fin. Sur un siècle environ, une lignée de femmes affrontent de mères en filles la barbarie et la sauvagerie d'un monde où l'obscurantisme fait dorénavant foi et loi.
Rebecca, Alice, Nour, Clara tentent désespérément de fuir mais sans savoir où aller. Paysages en ruine, maisons éventrées , violences extrêmes. La gangrène de Poisonville, ville du vice par excellence chère à dashiell Hammett, s'est même répandue hors de ses frontières. Ces femmes portent pourtant en elles cette vie persistante telles les herbes folles qui se fraient un chemin vers la lumière entre deux plaques de béton d'une grisaille désarmante. L'espoir de la renaissance d'une société complètement disloquée.
L'humanisme et la fraternité vont- ils reussir à surnager au beau milieu de cette immense marée noire dans laquelle le monde semble englué ?

La plume transcendée d'Hervé le Corre prend ici l'allure d'une rumeur. Celle du vent, de la pluie, de l'orage qui gronde, du chaos qui résonne comme une prémonition. On distingue presque au loin les ombres de ces cavaliers et de leurs montures dont le roulement perceptible des sabots inquiète. Et on se met à espérer très fort qu'ils ne sortent pas tout droit de l'apocalypse...

"It's a battle
As the years start to fade
No hope in sight
Daylight before them dies
Enshrined the horrified
No hope in sight "

Paradise Lost - "No hope in sight"
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Comme souvent dans les romans de le Corre, dès les premières pages, j'ai beaucoup pensé à Dante et à son avertissement à l'entrée de l'Enfer :"Lasciate ogni speranze voi ch'entrate" - "Vous qui entrez, laissez toute espérance" (il FAUT lire Dante by the way!)

L'écrivain bordelais ne nous laisse pas vraiment le choix, on part dans le monde d'après-demain, celui qui nous pend méchamment au nez à force de détruire, polluer, exploiter sans limite les ressources de notre planète tout en attisant les flammes de l'intolérance et de l'exclusion sans vergogne. Alors que tout s'effondre, nous suivons les trajectoires sinueuses de 4 générations de femmes : ces mères et ces filles se battent pour protéger leurs proches, pour garder un semblant de dignité et d'humanité dans un monde qui a perdu tous ses repères.

On remonte le fil des souvenirs des personnages, des bribes de mémoire qu'on chérit comme des rêves oubliés et des cauchemars qu'on voudrait ne jamais avoir vécus, qui forgent pourtant pas à pas l'existence de ces femmes, unies, solidaires, dignes. Rebecca, Alice, Nour et Clara se tiennent debout, malgré tout.

En dépit de l'angoisse que provoque chez nous ce monde post-apocalyptique hyper-réaliste, on admire l'art de le Corre de raconter les joies qui brûlent les doigts, les douleurs qui déchirent et le très mince espoir d'y réchapper encore.

Rien de révolutionnaire dans le post-apo selon le Corre mais ça fonctionne à merveille, on est pris dans le tourbillon des évènements et de cette prose hypnotique qui raconte le pire des mondes possibles, qu'on voudrait tant mettre à distance sans jamais vraimenty parvenir. Un roman qu'on lit en apnée, comme un avertissement au bord du précipice. Magnifique récit qui, s'il n'est pas mon préféré de l'auteur, démontre encore une fois le grand talent de le Corre à dire les hommes, côté ombre.
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Je crois que j'ai tout lu d'Hervé le Corre maître du roman noir et jk'ai beaucoup lu aussi sur le déreglement climatique, la fin du monde et ce qui pourrait rester dans quelques années quand, nous humains, nous aurons tout détruit.
Mais pour ce dernier roman, je crois bien que le lecteur , et j'en suis un, peut rester très longtemps dans un état de suffiocation permanent.
Du début du roman , où l'on sent une chape de plomb se poser sur la ville, à la fin du roman où la suite reste à imaginer, il ne se passe pas une page sans que l'horreur et le retour aux plus vils instincts de l'humanité n'apparaissent.
Les hommes sont violents, violeurs, affamés de sexe, de guerre, de pouvoir sauf quelques uns qui émergent (surnagent) dans ce livre. Et les femmes sont toutes belles, magnifiques, courageuses, douées et n'ont qu'une envie, un désir : VIVRE. Et ce quoi qu'il en coûte.
Vivre avec leur enfant pour croire encore que ce que l'Homme a laissé n'est qu'une étape vers un autre monde, un monde utopique dans lequel la nature serait plus présente, plus écouter. Un monde dans lequel les femmes seraient l'équilibre, le socle de la vie, de la parole, de l'amour, de la justice, et de l'Avenir.
Un grand roman dont on ne sort pas indemne. Je l'ai dit on suffoque du début à la fin. On est en apnée et les rares moments où on peut respirer ne durent pas très longtemps.
Hervé le Corre est vraiment un grand maître du roman noir mais ce dernier nous conte une histoire tellement réaliste, tellement imaginable que nous devons tous réagir, se lever et contrer cet impitoyable capitalisme qui nous mène droit dans un cataclysme.



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Alors je crois que c'est la première fois que j'ai mis autant de temps pour lire un roman…

Ma lecture a vraiment mal débuté, beaucoup (trop ?) d'informations entre les personnages et les événements. Sans parler de la longueur des chapitres… j'en lisais un par jour et encore. C'était extrêmement long tout le premier tiers du roman.

Il s'agit d'une dystopie qui se déroule en 2050 sur une centaine d'années. On va suivre le destin de trois femmes sur trois générations. Très intéressante comme approche mais les chapitres étant denses et longs, j'ai eu du mal à créer de l'attachement sur la première histoire après avoir lu les deux autres et ainsi de suite.

Le roman d'Hervé le Corre se veut violent et apocalyptique : c'est la fin du monde mais plus particulièrement de notre monde.

Passé le tiers, j'ai commencé à apprécier les personnages dont principalement le point de vue de Rebecca et d'Alice en tant que mère. Cependant, les héros principaux sont plus centrés sur la dernière génération composée de Nour et Clara…

Donc j'avançais tranquillement dans ce roman, entre les viols à répétition, la violence exacerbée et le néant d'une société terminée. Sauf que lorsque les trois histoires s'emmêlent et se répondent, le livre prend un nouveau tournant qui est assez dingue et brillant !

Vraiment la qualité du synopsis est vraiment très travaillé et aboutie. À la fin de ma lecture, j'ai mis la note de 3/5 à cause - encore une fois - de la longueur terrible des chapitres.

Pourtant, j'ai fini ce livre il y a quelques jours et je ne l'ai pas mis de côté pour passer à la suite, non il est toujours présent parce qu'avec le recul je le trouve fascinant.

Alors accrochez-vous, lisez le ! Il en vaut vraiment la peine et puis faut avouer qu'une dystopie ça m'a fait sortir de ma zone de confort. Ce livre prend vraiment aux tripes.
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Trois récits de la fin de notre monde : celui du plus lointain (autour de 2120), sans espoir, dans lequel l'ado Léo survit dans un univers hostile où sa mère est morte violée et assassinée par une horde, et qui doit sans cesse se déplacer avec son père, épuisé, et deux mère et fille, Nour et Clara, pour trouver de l'eau et un abri (parfois une maison restée dans son jus depuis 40 ans) ; celui de l'apocalypse de départ, la coupure d'électricité dans un monde déjà touché par les catastrophes écologiques et leurs conséquences (réfugiés, chômage, surveillance constante par drones et forces de l'ordre omnipotentes), vécue par Rebecca et son bébé Alice, qui quittent la grande ville pour des communautés dans des milieux ruraux ; celui très sombre déjà de l'entre-deux, de la génération qui n'a pas connu l'électricité et dans lequel des groupes restreints s'opposent à d'autres où une religion mixte domine les femmes, dans lequel se débat la mère de Nour, Alice, qui réussit à quitter l'emprise d'un homme.
Dans chacune de ces tranches d'apocalypse, les femmes, bien que fortes et figures centrales de l'histoire, sont malmenées. Ce roman est si noir qu'il donne des envies de leçons de survie - savoir manier une arme et se battre à mains nues semble bien plus efficace que l'espoir en la raison et en l'humanité.
La fin, plus qu'ouverte car plus proche d'une fin de chapitre, renforce ce sentiment.
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Dans l'interview accordée à Lire magazine, Hervé le Corre parle de Qui après nous vivrez comme d'un roman sur l'amour humain avant d'être une oeuvre post-apocalyptique, avec "des personnages qui survivent et se tiennent debout calés les uns contre les autres." Cette humanité, on la retrouve principalement dans les relations entre les mères et les filles, sur plusieurs générations : Rebecca, Alice, Nour, Clara. A vrai dire, cette tendresse et solidarité féminine est l'ingrédient nécessaire pour ne pas sombrer dans la noirceur la plus totale, alors que la civilisation, qui n'en mérite plus le nom, sombre et régresse dans la deuxième moitié du XXIe siècle et les 50 années qui suivent. Qui après nous vivrez nous raconte un monde aux allures féodales où les êtres reviennent à une sorte d'état sauvage, dans une fuite sans cesse renouvelée vers des lieux susceptibles d'être plus hospitaliers, puisque l'espoir fait ... survivre. Ce roman post-apocalytrip en rappelle bien d'autres du même acabit et si le lecteur peut apprécier le style réaliste et parfois poétique de l'auteur, il a parfois l'impression que les situations se suivent et se ressemblent, notamment les exactions les plus atroces, les violences faites aux femmes y tenant le premier rôle. La construction, avec ses trois récits qui progressent en différents temps, en alternance, ne facilite pas la tâche et il faut parfois, en début de chapitre, s'interroger pour reconnaître l'époque dans laquelle se situe l'action. Qui après nous vivrez est un roman puissant, on ne peut lui enlever son caractère, d'une violence parfois insoutenable et qui ne donne guère d'espérance sur l'état du monde à venir, tout en fustigeant, mais sans trop de lourdeur, celui dans lequel nous vivons aujourd'hui et qui court à sa perte, dans une inconscience et un égoïsme forcenés. Qui après nous lirez, préparez-vous à une expérience perturbante, voire traumatisante.
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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