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3,83

sur 268 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Trois étoiles et demi pour Hervé le Corre, ce n'est pas beaucoup car c'est vraiment un de mes auteurs français préférés. En plus, il a pris le risque de sortir de ses genres de prédilection ( romans noirs, polars ) pour s'aventurer dans la dystopie post-apocalyptique, et je trouve toujours réjouissant qu'un auteur cherche à se renouveler.

De la dystopie donc, avec une intrigue qui démarre en 2050 avec un grand effondrement planétaire qui plonge les hommes dans un monde impitoyable : catastrophe climatique, épidémies, totalitarisme, fanatisme religieux, exodes, famines, milices armés. Comment survivre dans un tel monde ? A quoi se raccrocher ? Qu'est-ce qui reste et fait notre humanité envers et contre tout ?

Les questions sont fortes, les enjeux tout autant. On est rapidement sidérés par la violence et la sauvagerie décrites sur quatre générations, de 2050 à 2150, en suivant le destin d'une lignée de femmes, Rebecca, Alice, Nour, Clara, de mères en filles.

Le Corre est un de nos meilleurs stylistes, chaque phrase est admirable. Mais si sa force évocatrice est incontestable, j'ai trouvé qu'elle s'essoufflait pour différentes raisons. D'abord, parce que les péripéties et épreuves qui attendent ces femmes semblent former un catalogue décrivant tous les sombres possibles qui nous attendent si on ne redresse pas vite la barre, aujourd'hui. Ce pessimisme radical clignote de façon un peu trop insistante, et la puissance narrative initiale s'effrite sous la redondance et la surcouche d'ultra-noir.

D'autant qu'on est sur un terrain très familier, peut-être trop. Durant ma lecture, je me suis souvent dit que j'avais déjà lu ça ( et en meilleur ) : La Route de Cormac McCarthy, Et toujours les forêts de Sandrine Collette, La Constellation du chien de Peter Heller, ou encore La Servante écarlate de Margaret Atwood ( pour les passages sur la colonie pénitentiaire ). Ce n'est pas gênant en soi car le Corre ne s'érige pas en prophète, il énonce juste des possibilités anxiogènes dont il pousse juste très loin les curseurs. Il sonne le glas sans donner de leçons.

Sans doute faut-il lire ce roman comme un continuum littéraire, un relais avec d'autres auteurs, comme s'il utilisait les briques des autres qui vivent dans la tête des lecteurs ( selon leurs acquis livresques et leurs références cinématographiques ) pour construire son propre récit.

Même si je ne suis pas aussi convaincue que j'aurais aimé l'être, j'ai apprécié de nombreux passages du roman, notamment une scène, somptueuse et bouleversante, lorsque deux de ses héroïnes rencontrent une vieille femme vivant complètement isolée avec son fils lourdement handicapée à la beauté fulgurante.

« Ils parlèrent aussi du temps d'avant, de ce qui les avait menées là, les unes et les autres, des épreuves, de la terreur, de la barbarie, des mains tendues qu'ils avaient saisies, secourables ou secourues, des nuits sans fin au fond d'un trou, des journées sous le feu des armes, délogés, traqués, perdus. On sentit passer entre eux quelques fantômes mais on ne les invoqua pas, peut-être parce qu'ils savaient s'inviter sans prévenir.
Ils dirent plutôt les bonheurs minuscules et les petits matins, la vie opiniâtre, l'entêtement du jour, le courage d'y croire, de se lever, de rester debout, de tenir peut-être parce que les femmes et les hommes sont aussi faits comme ça, pour ça. Tenir. Penser au lendemain en remettant le futur à plus tard. »

Et puis, il y a tout de même quelques trouées de lumière dans cette désespérance quasi absolue. C'est très puissant d'ériger cette lignée de femmes en gardienne de l'humanité et de l'espoir à transmettre à leurs enfants. L'espoir , même ténu, naît du collectif et des rencontres.

« A huit ans, elle a traversé des misères insondables, des nuits de terreur sans fin, des flammes, des rivières glacées, des ponts effondrés. Des charniers. A huit ans, elle a parlé à des enfants morts comme elle parle aux oiseaux, dans sa langue bizarre, leur disant tout bas des prières peut-être, des suppliques, et Rebecca a dû l'arracher de ses agenouillements auprès des corps recroquevillés dans des fossés, ou renversés dans un talus, indifférente à la pestilence qui montait des cadavres.
Alice a fait ces choses, a vu tout cela, à huit ans, alors ça vaut la peine de lui dire à quel point un océan est beau jusque dans ses innocentes fureurs et d'essayer de lui faire comprendre que le flux et le reflux des vagues sont un mouvement perpétuel, le rythme battant de l'éternité. »

Oui, la lumière vient de ces enfants, de leur énergie, leur courage à jouer et rire au coeur des tragédies, de leur instinct de survie, force animale obstinée qui pousse à se relever.
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"Back in black"

Quand le moyen-âge s'écrit au futur.
Une panne d'électricité générale. La civilisation funambule, fragilisée par les crises et les pandémies, vient de perdre l'équilibre et bascule dans le chaos total. Une chute sans fin. Sur un siècle environ, une lignée de femmes affrontent de mères en filles la barbarie et la sauvagerie d'un monde où l'obscurantisme fait dorénavant foi et loi.
Rebecca, Alice, Nour, Clara tentent désespérément de fuir mais sans savoir où aller. Paysages en ruine, maisons éventrées , violences extrêmes. La gangrène de Poisonville, ville du vice par excellence chère à dashiell Hammett, s'est même répandue hors de ses frontières. Ces femmes portent pourtant en elles cette vie persistante telles les herbes folles qui se fraient un chemin vers la lumière entre deux plaques de béton d'une grisaille désarmante. L'espoir de la renaissance d'une société complètement disloquée.
L'humanisme et la fraternité vont- ils reussir à surnager au beau milieu de cette immense marée noire dans laquelle le monde semble englué ?

La plume transcendée d'Hervé le Corre prend ici l'allure d'une rumeur. Celle du vent, de la pluie, de l'orage qui gronde, du chaos qui résonne comme une prémonition. On distingue presque au loin les ombres de ces cavaliers et de leurs montures dont le roulement perceptible des sabots inquiète. Et on se met à espérer très fort qu'ils ne sortent pas tout droit de l'apocalypse...

"It's a battle
As the years start to fade
No hope in sight
Daylight before them dies
Enshrined the horrified
No hope in sight "

Paradise Lost - "No hope in sight"
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Le post apocalyptique est très tendance. de nombreux romans s'emparent de nos angoisses, sans doute légitimes, pour ce qui s'annonce dans un futur plus ou moins proche. C'est bien le propos d‘Hervé le Corre dans ce roman qui se situe à la fin de notre siècle, alors que tout part en vrille. Effondrement de la natalité, épuisement des ressources, mettant à la rue des millions d'humains en quête de survie, au prix le plus souvent d'une violence désespérée.

De mère en fille, elles se racontent, Rebecca, Nour et Alice, qui jouent aussi le rôle de repère temporel dans le brouillard de ce chaos permanent.

Car il faut être clair, le propos est désespérant : le comportement des humains a fait un bond en arrière de plusieurs centaines d'années « un nouveau moyen-âge », la lutte pour la survie est le seul leitmotiv, et génère de multiples scènes de guerre, avec son cortège de viols, tortures, et meurtres odieux. Seul le microcosme des personnages que l'on suit tente de garder un cap où la résilience, l'empathie et l'entr'aide auraient encore un sens. Même les expérimentations de reconstruction d'une société organisée sont l'occasion pour de petits chefs de régner en despote sur une communauté aliénée de tous ses droits (je n'ose même pas aborder le statut des femmes…)

Roman noir, sombre, désespérant, qu'il vaut mieux aborder entre deux feel-goods, même si on n'est pas aficionado du genre.
Malgré tout -, pour les plus aguerris, on peut reconnaitre la qualité de l'écriture et la puissance d'évocation de ce texte glaçant.

400 pages Payot et Rivages 10 janvier 2024

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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J'ai emprunté ce livre sur la foi du nom de l'auteur dont j'avais particulièrement aimé trois précédents romans. Je n'en avais lu ni la quatrième de couverture, ni les critiques sur Babelio. Et puis, un titre évoquant Francois Villon est un clin d'oeil engageant.

Dès les premières pages, le ciel m'est tombé sur la tête au propre comme au figuré. Incendies dantesques, canicules infernales, j'étais arrivée dans le monde d'après...

Mon premier réflexe a été de penser: "Zut! Mince! Encore... Une dystopie post apocalyptique, une de plus."
Hervé le Corre n'a pas le moindre optimisme envers cet effondrement dont il situt les prémices dans les années 2030. Il n'a non plus aucune indulgence quand il fait dire de façon réitérée à ses personnages: " Vous saviez, mais vous n'avez rien fait". Une saine colère envers cette poignée d'ogres fous avides de "toujours plus" qui ont pillé la planète avec une morgues insoutenable.

L'auteur nous propulse vers 2150 au lendemain d'un blackout énergétique total. Ce qu'il restait du monde après les guerres climatiques, les afflux migratoires massifs, les famines, n'était déjà pas beau à voir. Cet arrêt définitif de la fée électricité propulse l'humanité dans un ultime déclin où rien ne nous est épargné de toutes les violences imaginables.
C'est noir, diaboliquement noir.
Quatre femmes hantent le roman. Rebecca, Alice, Nour, Clara. Une lignée matriarcale dont l'auteur fait le symbole d'une force de vie indéracinable, leur ventre à toutes fécond comme une possible issue à "l'après de l'après ".
C'est un bon bouquin, notamment dans la force des personnages auxquels il est difficile de ne pas s'attacher, et par l'habile construction qui joue sur la temporalité et les flashbacks.

Cette prolifération exponentielle de romans apocalyptiques m'interroge réellement. Si l'on admet que les forces créatrices se nourrisse de l'air du temps, il est à conclure que cet air est vraiment nauséabond.
La Route de McCarthy était survenu comme un OVNI en 2006. On l'avait lu avec effroi sans mesurer à quel point ce cher Cormac était un visionnaire de génie.
Peut-être faut il voir alors dans cette multiplicité un sain rappel à réagir. Il est toujours temps de tenter l'impossible, de prendre conscience d'une urgence qui n'est pas dans la mesure quantifiée de notre consommation, mais dans un modèle délétère qui pousse nos besoins à consommer comme autant de fantassins sur la scène d'une bataille perdue.

In fine, je m'en veux un peu de ce "encore" pensé si fort en début de lecture. Car, oui, il est nécessaire de poser sur la table ce sentiment d'urgence qui ne doit rien à l'imagination, mais tout à la folie d'un système auquel il est crucial de tourner le dos.
Le titre du roman est magnifique et lourd de sens. La mélancolie poignante du testament de François Villon ne se dépare jamais d'une joie insolente pour tenir la mort à distance.

"Frères humains qui après nous vivrez
N'ayez les coeurs contre nous endurcis..."
La première résistance commence par le non.
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Figure reconnue de la littérature policière française, Hervé le Corre a été primé à maintes reprises pour ses romans. Leurs intrigues se nouent généralement au coeur de faits divers tragiques, survenant dans des univers sociaux de misère et de souffrance, inspirés de la réalité sociale ou historique. Des rapports de force particulièrement violents et sordides exposent des personnages faibles et fragiles à d'autres, puissants et malveillants.

Qui après nous vivrez n'est pas un polar, c'est une dystopie, un roman d'anticipation pessimiste, dans lequel l'auteur a imaginé un monde auquel il apporte ses codes habituels de noirceur, de terreur, d'horreur, de mort, tout en s'inspirant des pires prédictions survivalistes d'effondrement de la civilisation.

En 2050, tout saute. Plus d'électricité et donc plus d'éclairage, plus d'appareils, plus de réseaux, plus d'industrie ! Une mégapanne ? Bon ! C'est déjà arrivé, on attend que ça reparte… Mais là, ça ne repart pas. Ça tombe mal, quand le quotidien est déjà plombé par les pénuries, les épidémies, les incendies, les guerres de gangs, sous un soleil brûlant alternant avec des pluies glacées.

Fin de la civilisation technologique, telle que nous la connaissons. Retour progressif à des conditions de vie pratique qui ressemblent à celles du Moyen-Age. Ce saut en arrière s'accompagne en parallèle d'une perte de sens de l'humain et de la société, au profit de luttes individuelles ou en clans pour survivre, tous les coups étant permis. Retour en même temps, et peut-être encore plus rapidement, à une certaine forme de bestialité, qui réinstalle l'homme dans son rôle de domination, de prédation et d'asservissement de la femme.

Les chapitres du livre entremêlent — dans un désordre auquel il faut s'habituer — les aventures traversées entre les années 2050 et 2120 par un lignage de quatre personnages féminins, Rébecca, Alice, Nour et Clara. Elles se transmettent, de mère en fille, la volonté de survivre jour après jour. Au fil des générations, leurs environnements sont de plus en plus hostiles. Mais l'espèce humaine a du ressort et s'efforce de s'adapter. Ce qui compte, c'est le lendemain. Pour après, on verra ! Parfois se présente ce qui ressemble à un havre de paix, où l'on peut se poser quelque temps. Il faudra toutefois repartir. L'humanité retrouve des habitudes de nomadisme. On se remet en route, en quête d'on ne sait trop quoi.

Comment en est-on arrivé là ? s'interrogent les personnages. L'auteur a des convictions politiques claires : ce sont les riches et les puissants qui ont mené le monde à la catastrophe. Il faut bien désigner des coupables, même si l'auteur déclare aussi que cela faisait des décennies que chacun était prévenu et pensait pouvoir s'adapter.

L'on peut à bon droit être impressionné par le travail d'imagination et d'écriture déployé pour décrire, avec autant de détails, la nature qui retourne à l'état primaire et les ruines de ce que furent des maisons, des quartiers, des villes. Des visions cauchemardesques, entrecoupées de scènes insoutenables de brutalités, de meurtres, de guerres, de viols. Un texte d'une poésie macabre et fangeuse, qui rappelle qu'Hervé le Corre révère Lautréamont.

L'auteur sait mettre en tension sa narration, y introduire du suspens. On s'attache à Rébecca, à Alice, à Nour et à Clara, qui, en dépit des agressions et des sévices, placent l'amour au-dessus de tout. Quel destin l'auteur leur a-t-il réservé ?

Les sentiments humains n'ont pas tous disparu. Dans les moments d'espoir ou de désespoir apparaissent des gestes d'entraide, de solidarité. Quelques épisodes sont très émouvants. L'amour maternel pourrait-il sauver l'espèce ? Un éclair réconfortant dans une lecture plutôt démoralisante.

Une lecture en même temps éprouvante, car d'un chapitre à l'autre, il n'est pas facile de saisir dans quelle génération l'auteur nous invite. Cela donne par moment l'impression de relire des descriptions et des péripéties déjà entrevues.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Une dystopie de plus où l'angoisse est présente à chaque page.
Cette histoire qui s'étend sur presque 400 pages, couvre tout un siècle de désastres et de récession. L'originalité, c'est qu'on suit quatre générations de femmes, de Rebecca à Clara en passant par Alice et Nour, héroïnes résistantes et qui s'accrochent à leurs valeurs humaines, chose rare en ces temps troublés. On ne peut que les admirer et trembler pour elle.
Les évènements qu'elles traversent se répètent souvent : elles doivent affronter des hommes prédateurs, protéger leur enfant, s'allier à de bonnes personnes et apprendre à se battre, voire chasser pour se nourrir.
Dans un pays, qui n'est pas nommé, où les épidémies, les incendies et l'effondrement de la société créent un désastre, elles doivent survivre. Leur vie se trouve parfois confronté à des coïncidences et j'ai trouvé qu'il y avait quelques grosses ficelles, mais bon….
J'aime le style d'Hervé le Corre qui sait nous conter l'apocalypse et ses conséquences comme si on le voyait sur grand écran.
Malgré quelques longueurs et des situations qui se répètent un peu trop à mon goût, j'ai apprécié ce roman d'anticipation.
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La crise climatique s'est aggravée en l'absence de toute décision concrète pour enrayer le réchauffement global. Outre les épidémies à répétition, les problèmes de ressources, d'énergie et d'approvisionnement en eau entrainent des tensions sociales majeures. Dans une grande ville de province, une jeune femme et son compagnon viennent malgré tout de donner naissance à un enfant. Un jour, le réseau électrique français s'effondre et une émeute plus violente que les autres éclate.

On connait l'autre parce qu'il s'est notamment penché au travers de très solides polar sur le passé au gré d'une fresque historique extrêmement sombre de l'époque tumultueuse de la Commune avec Dans L'Ombre du Brasier (Rivages/Noir 2021), ou encore parce qu'il a décliné les dysfonctionnements de notre monde contemporain autour de romans noirs emblématiques tels que le flamboyant Traverser La Nuit (Rivages/Noir 2021),

Hervé le Corre s'interroge en ce début 2024 dur notre devenir et signe son grand retour au gré d'une dystopie dont le titre, Qui Après Nous Vivrez, s'inspire en l'assumant complètement du premier vers du célèbre poème La Ballade Des Pendus de François Villon, pour nous entraîner dans l'obscurantisme des reliquats d'un monde agonisant que l'on reconnaît comme étant le nôtre. Comme un lanceur d'alerte qu'il est dans ses romans sociétaux, Hervé le Corre se plait à mélanger les genres et les futurs avec en fil conducteur le portrait trois générations de femmes luttant pour survivre

Le travail comme vertu, la soumission des femmes , la crise climatique, les autorités de contrôles et les hommes comme responsables de la communauté. sont les grandes thématiques de ce beau western féministe et humaniste, dans la droite lignée de ces écrits précédents.

Du bien bel ouvrage !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Dans l'interview accordée à Lire magazine, Hervé le Corre parle de Qui après nous vivrez comme d'un roman sur l'amour humain avant d'être une oeuvre post-apocalyptique, avec "des personnages qui survivent et se tiennent debout calés les uns contre les autres." Cette humanité, on la retrouve principalement dans les relations entre les mères et les filles, sur plusieurs générations : Rebecca, Alice, Nour, Clara. A vrai dire, cette tendresse et solidarité féminine est l'ingrédient nécessaire pour ne pas sombrer dans la noirceur la plus totale, alors que la civilisation, qui n'en mérite plus le nom, sombre et régresse dans la deuxième moitié du XXIe siècle et les 50 années qui suivent. Qui après nous vivrez nous raconte un monde aux allures féodales où les êtres reviennent à une sorte d'état sauvage, dans une fuite sans cesse renouvelée vers des lieux susceptibles d'être plus hospitaliers, puisque l'espoir fait ... survivre. Ce roman post-apocalytrip en rappelle bien d'autres du même acabit et si le lecteur peut apprécier le style réaliste et parfois poétique de l'auteur, il a parfois l'impression que les situations se suivent et se ressemblent, notamment les exactions les plus atroces, les violences faites aux femmes y tenant le premier rôle. La construction, avec ses trois récits qui progressent en différents temps, en alternance, ne facilite pas la tâche et il faut parfois, en début de chapitre, s'interroger pour reconnaître l'époque dans laquelle se situe l'action. Qui après nous vivrez est un roman puissant, on ne peut lui enlever son caractère, d'une violence parfois insoutenable et qui ne donne guère d'espérance sur l'état du monde à venir, tout en fustigeant, mais sans trop de lourdeur, celui dans lequel nous vivons aujourd'hui et qui court à sa perte, dans une inconscience et un égoïsme forcenés. Qui après nous lirez, préparez-vous à une expérience perturbante, voire traumatisante.
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Comme souvent dans les romans de le Corre, dès les premières pages, j'ai beaucoup pensé à Dante et à son avertissement à l'entrée de l'Enfer :"Lasciate ogni speranze voi ch'entrate" - "Vous qui entrez, laissez toute espérance" (il FAUT lire Dante by the way!)

L'écrivain bordelais ne nous laisse pas vraiment le choix, on part dans le monde d'après-demain, celui qui nous pend méchamment au nez à force de détruire, polluer, exploiter sans limite les ressources de notre planète tout en attisant les flammes de l'intolérance et de l'exclusion sans vergogne. Alors que tout s'effondre, nous suivons les trajectoires sinueuses de 4 générations de femmes : ces mères et ces filles se battent pour protéger leurs proches, pour garder un semblant de dignité et d'humanité dans un monde qui a perdu tous ses repères.

On remonte le fil des souvenirs des personnages, des bribes de mémoire qu'on chérit comme des rêves oubliés et des cauchemars qu'on voudrait ne jamais avoir vécus, qui forgent pourtant pas à pas l'existence de ces femmes, unies, solidaires, dignes. Rebecca, Alice, Nour et Clara se tiennent debout, malgré tout.

En dépit de l'angoisse que provoque chez nous ce monde post-apocalyptique hyper-réaliste, on admire l'art de le Corre de raconter les joies qui brûlent les doigts, les douleurs qui déchirent et le très mince espoir d'y réchapper encore.

Rien de révolutionnaire dans le post-apo selon le Corre mais ça fonctionne à merveille, on est pris dans le tourbillon des évènements et de cette prose hypnotique qui raconte le pire des mondes possibles, qu'on voudrait tant mettre à distance sans jamais vraimenty parvenir. Un roman qu'on lit en apnée, comme un avertissement au bord du précipice. Magnifique récit qui, s'il n'est pas mon préféré de l'auteur, démontre encore une fois le grand talent de le Corre à dire les hommes, côté ombre.
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Il y a pour ma part deux critiques pour ce livre, une littéraire et l'autre politique. C'est un bon roman, le Corre est un excellent auteur, dont j'ai lu tous les ouvrages. Politiquement, cette "dystopie" qui d'ailleurs est plutôt une hypothèse crédible de ce qui nous attend, est remarquable. Tout y est :
- La transformation de l'État libéral en État autoritaire où la police tire à vue et sans avoir de compte à rendre.
- Les gardes frontière qui coulent les bateaux de migrants.
- le contrôle social des pauvres poussé à l'extrême (Pôlice Emploi)
- Les canicules 6 mois par an.
- Les fondamentalistes religieux et d'extrême-droite et leurs attentats.
- Les militant.es isolés, réprimés, et moqués.
- La multiplication des pandémies.
- La débandade finale catalysant le tout, sur fond d'individualisme, des smartphones et d'indifférence générales, tel exactement ce que nous vivons aujourd'hui. Tout le monde s'en fout, seules quelques minorités agissantes s'engagent dans la lutte, subissant la répression du pouvoir et l'indifférence des autres. le Corre projette cela dans le futur en s'appuyant sur une situation connue et parfaitement présentée par nombre de scientifiques. Cela lui permet de faire des hypothèses environnementales et politiquement valables. En ce sens, ce roman est à la limite de l'essai, le nucléaire en moins. Car à + 4° dans quelques décennies, il ne sera plus possible de refroidir les centrales et elles exploseront, tout se terminera donc beaucoup plus vite.

Finalement, c'est la première fois qu'un bon roman m'a été aussi pénible, j'ai eu beaucoup de mal à le terminer.
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