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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce livre m'a vraiment beaucoup marqué.
Je préfère Emmanuel Lepage dans ses reportages que dans ses fiction, mais cette fois-ci, il va encore plus loin dans son approche de la réalité en parlant d'un sujet où il est directement impliqué, lui et plus particulièrement ses parents, le ton est très différent de ses autres reportages, le lecteur est invité à entrer dans l'intimité de leurs idéologies, de leurs opinions politiques, de leur action militante dans la période des années 60-70.

Je pense que beaucoup de fans de cet auteur seront décontenancés, le sujet est ici bien moins universel. Pour ma part, étant de la même région, bien qu'un peu plus à l'ouest, et de la même génération qu'Emmanuel Lepage, j'ai été étonné d'y trouver un certain écho avec ma vie dans cette période. Je n'avais jamais entendu parler de ces tentatives de vies communautaires en Bretagne, mais les milieux catholiques de gauche ont une certaine résonance dans mes souvenirs, je suis à peu près certains que mes parents ont fréquenté des personnes qui avaient assisté aux prêches de Bernard Besret. Mais ce que j'en retiens surtout, c'est cette vision que nous avions des adultes dans cette période où il se passait beaucoup de chose, beaucoup de nouvelle idées circulaient, c'était une période florissante où nous les enfants en profitions sans y comprendre grand chose, car nous étions nés dans cette effervescence et elle nous paraissait naturelle, le monde bougeait autour de nous et nous crapahutions insouciants, nous consacrant à nos bêtises d'enfants. le graphisme en aquarelles détaillées et vivantes d'Emmanuel Lepage nous immerge dans cette ambiance et dans cette région, dans le bocage de la Bretagne intérieure.

Cette bande dessinée a réveillé chez moi tout un tas de souvenirs, de moments de mon enfance, de moments ou mes parents participaient à quelques réunions politique ou culturelle pendant que nous jouions à côté, c'était le début des années 70, c'était la Bretagne, catholique tendant progressivement à gauche, c'était un moment où de mon côté je me développais, je m'éveillais doucement à la culture, aux idées, beaucoup de leurs combat sont restés vains, n'ont pas abouti ou ont accouché d'une souris comme la réforme de Jean XXIII avec Vatican II et pourtant ils ont profondément modelé, Emmanuel Lepage aurait-il été le même sans l'expérience de ses parents, j'en doute.

Ce livre ne raconte pas un combat idéologique, ce livre raconte comment on vit les expériences de nos parents, comment ont vit des décisions radicales quand nous somme pas encore en âge de les comprendre, ce livre raconte comment le monde évolue autour de l'enfant, de la famille, ce livre raconte les années 60/70 fiévreuses et bouleversantes jusqu'au fond du bocage breton, d'une autre façon que ce qui se passait alors à Woodstock, ce livre m'a concerné et m'a touché.
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Un roman graphique ambitieux, et une réussite totale.
Roman graphique ambitieux par son format – 300 pages bien denses, un poids conséquent – mais surtout par la volonté d'Emmanuel Lepage de raconter son enfance telle un arbre, avec ses profondes racines et ses branches divergentes, au fil des saisons et des témoignages recueillis.
Car son récit débute avec celui du père, né en 1938 dans une famille pauvre : l'Occupation, les années 50, son engagement religieux puis son tour du monde dans la Marine.
Les souvenirs de la mère complètent et enrichissent ce récit, une mère devenue peintre dont les tableaux veulent "montrer la vérité".
C'est toute la France des années 60-70, tant l'ordre social que les aspirations de la jeunesse chrétienne, tant l'histoire familiale que celle de la JOC (créée par l'Église pour contrer l'influence communiste dans la jeunesse ouvrière).
Tout cela me rappelle mes (lointains) cours de fac en Histoire contemporaine… mais aussi ma propre histoire familiale.
Parallèlement, l'auteur explique la démarche qui a amené ses parents à un habitat communautaire, celui où il a grandi dans la campagne proche de Rennes ; un collectif qui mutualisait la machine à laver mais aussi, comme il le raconte avec humour, les enfants, tous en liberté dans la Nature.
Tout cela me rappelle mes réflexions, à moi aussi, sur un projet d'habitat communautaire.
Pour conclure, cet album est une réussite totale également au niveau du dessin, avec une attention particulière aux couleurs qui traduisent une atmosphère, le sépia des parents, les couleurs joyeuses des souvenirs d'enfance, la profondeur des nuits étoilées…
Et la drôlerie de voir de face cette hirondelle en vol, ou une chèvre… !

Challenge Bande dessinée 2024
Club de lecture février 2024 : "La PAL fraîche"
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De 5 à 9 ans, l'auteur a vécu dans une communauté en Bretagne, le Gille Pesset. Plusieurs familles, catholiques et de gauche, voulaient tenter une autre façon de vivre ensemble, moins individualiste et plus propre au monde moderne et à la foi partagée. « Nous voulions révolutionner l'Église de l'intérieur ! » (p. 85) de ces quelques années, il reste à Emmanuel Lepage des souvenirs colorés, des éclats vifs comme le soleil, mais il lui manque l'origine du projet et, surtout, les raisons pour lesquelles ses parents ont brusquement quitté le Gille Pesset. Pendant plusieurs années, l'auteur interroge les fondateurs de cet habitat partagé. Il découvre des secrets de famille, des idéaux, le poids encore lourd de la foi dans les années 60 et 70 et cette aventure humaine un peu utopique. « Comment habiter, comment vivre ensemble... comment agir sur le monde que l'on veut changer ? » (p. 113) de dialogues en souvenirs, les témoignages qu'Emmanuel Lepage recueille dessinent la chronique d'un temps révolu et d'une réflexion menée sur l'institution ecclésiale et la société en général. le projet du Gille Pesset prend naissance au moment de Vatican II et de mai 68. Tout bouillonne et tout craque : les modèles passés sont trop étroits pour ces jeunes couples et ces familles qui ont l'espoir d'autre chose. « Nous sommes des gens de gauche en opposition avec les valeurs dominantes de la société, contre l'autonomie et la privatisation de la famille. [...] Nous cherchons l'épanouissement de la personne dans une entité plus large que la famille. » (p. 182 & 183)

Et cette histoire, c'est aussi celle de l'auteur. « C'est au Gille Pesset que tout a commencé. Là où sont les clés de tous mes livres. » (p. 147) Quand il dessine les témoignages, l'auteur utilise le gris et le sépia, mais quand il met en image ses propres souvenirs, la couleur éclate, vibrante comme le sont les heureux moments de l'enfance. « Pour nos parents, le Gille Pesset est une idée, une utopie... Mais pour moi et pour chaque enfant du groupe, il est le Monde. On est de son enfance. » (p. 160) C'est en faisant le chemin à rebours de sa mémoire et de celle des familles du Gille Pesset qu'Emmanuel Lepage comprend comment les idéaux et les espoirs cette petite communauté ont fait long feu.

J'ai plongé dans ce récit autobiographique avec beaucoup d'émotion, mais aussi de curiosité. J'ai découvert tout un pan du catholicisme breton, dans une époque que mes parents ont connue, qui pour moi n'est qu'histoire, mais histoire trop proche pour être vraiment objectivée. « Papa, cet homme que je vais raconter, ce n'est plus toi, et puis ce sera mon interprétation. » (p. 3) Au-delà du propos, je retiens surtout le dessin d'Emmanuel Lepage. Les pages représentant des racines et des arbres ont une symbolique évidente, mais d'une beauté immense. Cache-cache bâton est une oeuvre profondément émouvante et qui ne laisse pas d'interroger sur notre monde actuel.
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C'est un autre voyage que nous propose Emmanuel album avec ce nouvel album. Un voyage dans le passé, dans son enfance, dans la vie de ses parents, de ses grands-parents. Un voyage pour comprendre, pour se comprendre.

Une enfance pas tout à fait comme les autres. Ses parents ont expérimenté la vie en communauté, en partage. le petit Lepage a grandi là-bas, au Gille-Pesset, avec d'autres familles, d'autres enfants comme autant de camarades de jeux.

Emmanuel Lepage veut reconstituer le puzzle. Il interview les différentes familles, ses parents bien sûr, un peu effrayés par ce projet, il fait appel à ses souvenirs aussi pour saisir les traces que cette vie différente a laissées en lui.

"J'ai enfoui dans le corps des odeurs, des lumières... Et c'est en dessin que j'essaie de les faire émerger." le dessin alterne le noir et blanc pour l'enquête et les couleurs intenses pour l'enfance d'Emmanuel Lepage. L'émotion est souvent palpable, le lecteur partage l'intimité d'un artiste tout en lisant un récit documentaire sur la France des années 70.

Un livre en forme d'enquête dans l'intime, un livre qui relève le pari de tendre vers l'universel pour toucher le lecteur, quel qu'il soit. Un livre qui m'a renvoyé à ma propre enfance, à ce qui a fait de moi ce que je suis, à ce qui m'a construit.
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Tout commence au milieu d'un jeu d'enfants. Un jeu étrange tout autant que le titre de cette bande dessinée. A ces enfants qui courent, s'ajoute un échange entre deux personnes : un père qui ne veut pas être représenté juste comme cela et un auteur qui lui répond, le rassure. Cette bande dessinée est autobiographique et Emmanuel Lepage, comme il peut le faire dans ses précédentes oeuvres, se met en scène. Il remonte à son enfance, quand il a vécu avec ses parents au sein d'une communauté. 5 familles qui ont décidé de vivre ensemble, partageant un mode de vie et se soutenant dans le quotidien. Chaque couple emportant avec lui ses enfants pour vivre à Beton, près de Rennes. Emmanuel Lepage veut remonter même encore plus loin et savoir d'où viennent ses parents et les adultes qui ont imaginé cette communauté dans les années 70.
On voit alors en dessins et en mots apparaître le passé des ces adultes qui approchent des 80 ans à l'entrée du XXIè siècle. Comme son père le dit régulièrement à l'auteur, "il est difficile de comprendre l'époque d'alors". Son père, Jean-Paul, raconte son enfance, son rapport à la religion, son idée de devenir prêtre, ses quelques années dans l'armée et cette idée de vivre ensemble, d'imaginer la société autrement.
A travers les témoignages de ces fondateurs, on plonge dans la France des années 40 en repérant le poids du secret, l'état d'un pays en guerre et les grands changements au sein de l'Eglise, notamment Vatican 2.
Cette bande dessinée est une épopée intime, générationnelle pleine d'idéaux et d'espoir. On observe une société bousculée par L Histoire mais également laisser germer, plus ou moins facilement, d'autres manières d'être ensemble. On suit toutes les étapes, les discussions et les actes, qui ont donné naissance à ce mode de vie. On découvre les astuces de cette vie ensemble. Des petits mots laissés pour donner une information aux autres : nous allons au cinéma vendredi soir et il reste des places dans la voiture ; j'ai fait de la soupe, quelqu'un en veut. L'échange se fait. Mais il y a également les ruptures et les divergences.
En croisant les témoignages des adultes fondateurs mais également de leurs enfants, Emmanuel Lepage montre les grandes possibilités et les fragilités de telles aventures. Mais il reste l'énergie, le courage, l'audace de sortir d'un monde matérialiste, l'envie de mettre tout à plat.
Cette histoire est portée par le talent incroyable de l'auteur, un des grands noms du 9ème art. Des portraits marquants. Des décors magnifiques. ue manière virevoltante de naviguer dans le temps, des années 40 à aujourd'hui. Des dessins délicats, en noir et blanc laissant ponctuellement des couleurs apparaître, redonnant vie et actualité aux textes.
De ce récit très personnel, de cette expérience étonnante, Emmanuel Lepage tire une bande dessinée sociale, culturelle et politique où les cas particuliers parlent à tout le monde, où les questionnements de chacun interrogent les autres. En parlant du temps long, l'auteur évoque aussi avec bcp d'intelligence le poids du regret dans l'élaboration de projets et dans les choix de vie.
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L'auteur réalise ici une enquête ou plus précisément une immersion totale dans une utopie qu'il a vécu enfant et qui s'est interrompue brutalement alors qu'il avait 11 ans. Il veut comprendre pourquoi dans les années 70, 5 couples ont décidé d'acheter en commun un terrain autour d'une vieille ferme. Habitat partagé comme cela se nomme aujourd'hui, vie en communauté ou vie ensemble, des mots qui avaient alors un sens précis et sur lesquels ces personnes ont discuté heure après heure, avant, pendant et des années après. Car s'ils avaient des idées communes, politiques, sociales, ils étaient aussi des femmes et des hommes, des individualités différentes, venant de mileux différents. Emmanuel Lepage va interroger inlassablement ses parents malgré leurs récticences (surtout son père qui aurait préferré que le livre soit publié après sa mort!), les membres de la communauté de Gille Plesset, mais aussi des personnes ou des mouvements comme le scoutisme qui ont par leurs actions ont initié cette volonté de vivre autrement.
Une histoire qui tente d'analyser les raisons de l'échec de cette tentative de vie partagée, toutes les raisons et il y en a beaucoup, y compris l'élément déclencheur qui ne sera que le tout dernier élément qui séparera définitivement les parents d'Emmanuel de ces voisins.
C'est documenté et détaillé, alternant l'histoire chronologique de la communauté, les souvenirs d'Emmanuel et ses différents entretiens menés à la fin des années 2010, début des années 2020.
Une somme passionnante, dense, qui raconte une époque, celle d'une utopie sociale, à son niveau, la volonté de jeunes gens, jeunes couples, de vivre différement. le graphisme reste parfait, alternant noirs et blancs profonds et aquarelles légéres.
Une réussite! A lire.
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« On est de son enfance comme on est d'un pays » St-Exupéry.

L'enfance de Lepage, c'est Betton, près de Rennes au lieu-dit Gille Pesset « réserve d'indiens » de 3 hectares acquis collectivement en mars 1966 par 6 couples de « chrétiens de gauche », alternatifs et utopistes.

Le collectif croit au rythme des naissances dont celle de l'auteur en septembre 66. Pour cette marmaille, « le bonheur est dans le pré ». le collectif fait progressivement apparaitre deux types d'engagement : « Il y a ceux qui vivent ici leur vie comme une expérience, et d'autres qui essaient de vivre leur vie de façon plus concrète »

Juillet 1975 : la famille Lepage quitte précipitamment le « collectif » pour Lannion à la suite d'une altercation avec une famille du collectif : « Les autres ne sont pas toujours ce qu'on voudrait qu'ils soient » alors que « Refuser le dialogue, c'est désespérer de l'autre ».

A compter de ses neuf ans, Emmanuel cultivera la nostalgie de cette parenthèse libertaire.

Dans un album épais et dense au titre initialement énigmatique, Lepage se lance dans un travail de mémoire, entre enquête intimiste et étude sociologique au coeur des années 70. Lepage reconstruit en sépia le puzzle de cet idéal communautaire.

La douceur de dessins aux couleurs plus vives s'agissant des souvenirs d'enfance, plus sages lors des interviews récents, confère un sentiment de nostalgie de cette période mâtinée d'une tendresse pour les protagonistes. « Ressurgit du passé les rêves de paradis perdu, de camp retranché ».

L'émotion est palpable, le lecteur partage l'intimité d'un artiste tout en lisant un récit documentaire sur la France des années 70.

A quelques jours près, ce pudique album aurait eu sa place dans mon top 5 de 2022.

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J'ai beaucoup apprécié la lecture de ce roman graphique, qui est basé sur des faits réels et qui nous en apprend davantage sur cette période en Bretagne.
Les illustrations sont belles. L'alternance entre les différentes familles peuvent parfois perdre le lecteur (la lectrice !)
Cependant, on voit l'histoire à travers ses yeux d'enfants puis d'adulte, et cela apporte de la magie à l'histoire.
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L'histoire d'un pari, d'une idée, d'un rêve fou-mais-pas-si-fou. Inventer un monde meilleur. A la marge. Une expérience qui laissera un goût tantôt émerveillé, tantôt amer dans la bouche des témoins qui se livrent et composent cette bande dessinée à la manière d'un vieux puzzle que l'on ressort du placard : fané par le temps, parfois incomplet mais toujours teinté de nostalgie et de promesses. Un merveilleux témoignage dessiné sur l'enfance et la communauté qui transcende les générations, les milieux sociaux et le temps : un grand Emmanuel Lepage !
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Emmanuel Lepage, l'auteur d'Ar-Men, repart en Bretagne. Mais, cette fois, il y mène une enquête à Betton, près de Rennes, où il retourne dans la communauté où il a grandi dans les années 1970. Pourquoi quelques jeunes couples ont-ils créé cette communauté ? Qu'est-ce qui les a poussés à se lancer dans un projet de ce type ? Comment vivaient-ils là-bas ? Lepage creuse en enquêtant sur l'époque, de l'après-guerre aux années 1980, sur les mouvement de la jeunesse, sur la manière dont ces rêves se réinventent aujourd'hui. le tout servi par un dessin qui s'éclate pendant 300 pages, c'est somptueux.
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