John Barleycorn : Le Cabaret de la dernière chance

Il est le roi des menteurs et, en même temps, la franchise même. Il est l'auguste compagnon avec qui on se promène en la société des dieux. Mais il est aussi de mèche avec la Camarde. Il vous conduit à la vérité toute nue et à la mort. Il produit des visions claires et des rêves immondes. Il est l'ennemi de la vie et le maître d'une sagesse supérieure à celle de la vie. C'est un meurtrier aux mains rouges, l'assassin de la jeunesse.

"Malgré cela, l'occasion devait me ramener vers John Barleycorn, m'y ramener sans cesse, jusqu'à ce qu'après de longues années l'heure vînt où je le chercherais dans tous les lieux fréquentés par les hommes - je le chercherais et le saluerais joyeusement comme un bienfaiteur et un ami, en même temps que je le détesterais et le haïrais de toute mon âme. Oui, c'est un étrange ami, ce John Barleycorn!"

Dans les coins les plus invraisemblables je rencontrai la camaraderie de la boisson

L’ivrogne ordinaire roule facilement dans le ruisseau, mais quelle terrible épreuve, pour l’autre, de se tenir droit, bien assuré sur ses deux jambes, et de conclure que dans l’univers entier il n’existe pour lui qu’une seule liberté : celle de devancer le jour de sa mort.

"Je suis en ce moment à l'oeuvre sur John Barleycorn, qui atteindra 50.000 ou 60.000 mots.
C'est un livre dont le sous-titre exact pourrait être : Mémoires d'un alcoolique. C'est une discussion autobiographique du problème de la boisson de A à Z.
Le "Saturday Evening Post" m'a promis 15 cents le mot pour la publication en feuilletons [...] J'ai à peine besoin de vous dire qu'une avance de, disons, un couple de milliers de dollars me rendrait plus facile l'écriture de "John Barleycorn".
Voilà un livre qui rapportera gros, j'ai entière confiance dans le public"....
(extrait de la préface "Le seul combat que Jack London ait perdu")

L'appel était impérieux, irrésistible. Plus que toute autre chose au monde, mon esprit en capitolade voulait puiser du répit aux sources qu'il savait certaines. Et voici où je veux en venir : pour la première fois de ma vie, pleinement conscient et de propos délibéré, j'avais envie de boire. Manifestation nouvelle, totalement différente, du pouvoir exercé par John Barleycorn. J'éprouvais pour l'alcool non pas un besoin corporel, mais un désir cérébral. Mon esprit, surmené et fêlé, cherchait de l'oubli.

Je compris qu'il y avait des limites à ma robustesse, alors qu'il n'en existait pas à la puissance de John Barleycorn. Une ou deux petites heures lui suffisaient pour venir à bout de ma forte tête, de mes larges épaules et de ma vaste poitrine, pour me mettre sur le dos, me serrer la gorge avec sa poigne de démon, et me faire rendre l'âme.

[…] Le romanesque et l'aventure semblent toujours descendre la rue bras dessus, bras dessous avec John Barleycorn. Pour connaître les deux premiers personnages il me fallait fréquenter le troisième ; sinon je n'avais qu'à retourner à ma bibliothèque gratuite, lire les exploits d'autrui et borner les miens à rester esclaves de la machine à dix cents l'heure.[…]

p.94
dans la version Éditions de Jouvence
ISBN : 2-921458-09-1

Je rappelai à Charmian les hangars à pirigues qu' elle n'avait
pu visiter dans les îles méridionales du Pacifique : les canni-
-bales à cheveux crépus venaient festoyer et boire entre
eux, loin de leurs femmes, à qui l' entrée du lieu saint était
interdite sous peine de mort .

Je rappelai à Charmian les hangars à pirigues qu' elle n'avait
pu visiter dans les îles méridionales du Pacifique : les canni-
-bales à cheveux crépus venaient festoyer et boire entre
eux, loin de leurs femmes, à qui l' entrée du lieu saint était
interdite sous peine de mort .