L'autour en vol prend une couleur difficile à décrire. Il n'est ni gris ardoise ni gris ramier; mais une sorte de gris nuage-de- pluie, et malgré la distance, je distinguai la houppe blanche de leurs plumes sous-caudales étalées en éventail sous leur queue courte et puissante, ainsi que la courbure magnifique de leurs plumes secondaires qui, lorsque les autours planent, permet de les distinguer à coup sûr des éperviers.
"La peur était contagieuse. Elle envahissait spontanément mon coeur quand les gens s'approchaient. Je ne savais pas si l'autour se débattait parce qu'elle était effrayée par ce qu'elle voyait ou parce que je lui communiquais ma propre terreur. Il se passait aussi autre chose pendant nos promenades. Nous étions devenues invisibles. Les gens que nous croisions ne s'arrêtaient pas, ils ne nous regardaient pas, ne jetaient même pas un coup d'œil en coin dans notre direction. Une partie de moi-même s'était mise à croire qu'ils ne nous voyaient tout simplement plus."
Le remède contre l'isolement c'est la solitude. Marianne Moore (page 52)
La capacité qu'ont les faucons de traverser des frontières infranchissables aux humains est une croyance qui précède les mythes celtes ou grecs, dans toute l'Eurasie, on retrouve des traditions chamaniques très anciennes qui font de l'autour ou du faucon un messager entre ce monde-ci et l'au-delà.
Le faucon était tout ce que je voulais être: solitaire, indépendante, libérée de la douleur, insensible aux blessures de la vie humaine.
Dans la réalité, l’autour est à l’épervier ce que le léopard est au chat. Il est plus gros, c’est vrai, mais surtout plus massif, plus féroce, plus dangereux, plus effrayant, et beaucoup, beaucoup plus difficile à observer. L’autour est le rapace des forêts profondes, et non celui des jardins, il est le Graal obscur des ornithologues. On peut passer une semaine dans une forêt pleine d’autours sans jamais en apercevoir un seul. Juste des indices de leur présence. Un silence subit, suivi des appels terrifiés des oiseaux des bois, la sensation que quelque chose vient de bouger à la limite de votre champ de vision.
Le simple fait qu'il y ait des autours en Grande-Bretagne m'emplit de bonheur. Leur existence dément l'idée que la nature sauvage doive nécessairement être quelque chose qui n'a jamais été touché par le coeur ou la main de l'homme. La nature peut être l'oeuvre de l'homme. (p. 21)
Il est un temps dans la vie où vous vous attendez à ce que le monde soit toujours rempli de nouveautés. Puis vient le jour où vous comprenez qu'il n'en va pas du tout ainsi. Vous voyez que la vie va devenir une chose faite de trous. D'absences. De pertes. Des choses qui ont été là, mais qui ne le sont plus. Et vous réalisez également que vous devez vous développer autour de ces manques, entre ces creux, même si vous pouvez tendre la main à l'endroit où ces choses ont existé et sentir le terne éclat et la tension des lieux où les souvenirs se logent.
...c'est un trait courant chez les alcooliques que de faire des projets et des promesses , à eux-mêmes et aux autres , avec ferveur et sincérité , dans l'espoir d'une rédemption . Des promesses qui sont systématiquement rompues par la peur , le découragement , par toute une série de raisons qui dissimulent un désir très profond d'anéantir leur personnalité brisée .
Et je porte d’autres cicatrices invisibles, des cicatrices qu’elle ne m’a pas infligées mais qu’elle m’a aidé à guérir.