Je réalise désormais que nous observions la même chose, ou du moins des choses que l'histoire a rendues similaires.
J'ai fait d'un faucon un fragment de vie humaine et d'une vie humaine un fragment de la vie d'un faucon, ce qui l'a rendu un million de fois plus complexe et source d'émerveillement à mes yeux.
J'avais introduit l'autour dans mon monde puis j'avais prétendu vivre dans le sien. Désormais, je ne considère plus les choses de la même manière. Nous sommes heureuses de partager nos vies tout en reconnaissant leur altérité (p.370)
Pendant que vous apprenez quelque chose, vous n’avez nul besoin de vous inquiéter de vos capacités, bonnes ou mauvaises. Mais lorsque vous avez accompli quelque chose, lorsque vous avez appris comment faire, vous n’êtes plus en sécurité. Être expert vous expose à être jugé.
Je souris, pour la première fois,je crois, depuis le coup de téléphone. (**annonce du décès du père de la narratrice).
En partie parce que l'eau coule vers la mer, et que ce phénomène de physique élémentaire a encore du sens dans un monde qui n'en a plus.Et en partie parce qu'une dizaine d'années plus tôt, mon père avait inventé un projet fabuleusement original pour occuper nos week-ends.Il avait résolu de photographier tous les ponts qui franchissent la Tamise. (...)
Mon père était non seulement mon père, mais aussi un ami, et le complice rêvé de ce genre d'aventures.
( Fleuve éditions, 2016, p.28)
"Il devrait rentrer quand il entend un bruit qu'il ne reconnaît pas, la note d'un moteur inhabituel, et oui, là, c'est le moment dont il a rêvé. Il scrute le ciel. Il voit les feux de position d'un...il ne sait pas ce que c'est. Quelque chose qui n'est dans aucun livre. Il le prend en photo. Il note le numéro dans son carnet. C'est une apparition venue du futur : un nouvel appareil de l'US Air Force. Pour un jeune garçon passionné d'aviation dans les années 1950, c'est comme de contempler le Saint-Graal."
La vieille Angleterre est un endroit imaginaire, un paysage fait de mots, de gravures, de films, de peintures pittoresques. C'est un lieu imaginé par les hommes, or les hommes ne vivent pas très longtemps et ne sont pas de bons observateurs. Nous savons très mal prendre en compte des échelles différentes. Tout ce qui vit dans le sol est bien trop petit pour que nous nous en préoccupions. Et le changement climatique, bien trop gigantesque pour que nous puissions l'imaginer. Nous ne savons pas non plus prendre en compte le passage du temps. Nous ne nous souvenons pas de ce qui vivait ici avant nous, et nous ne pouvons pas aimer ce qui n'existe plus. Nous ne sommes pas capables d'imaginer ce qui sera différent quand nous serons morts. Nous vivons nos quelque soixante-dix années et ne lions que les noeuds et les liens qui nous concernent.
Nous portons les vies que nous avons imaginées de même que celles que nous vivons, et parfois, nous faisons le compte de celles que nous avons perdues.
Aujoud'hui, on dénombre environ quatre cent cinquante couples en Angleterre. Furtifs, spectaculaires, parfaitement acclimatés. Le simple fait qu'il y ait des autours en Grande-Bretagne m'emplit de bonheur. Leur existence dément l'idée que la nature sauvage doive nécessairement être quelque chose qui n'a jamais été touché par l'homme. La nature peut être l'oeuvre de l'homme.
Les mains sont faites pour tenir d'autres mains, les bras pour étreindre d'autres êtres humains.