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Citations sur Villa des Femmes (39)

Badi » les accom­pagne souvent, et voilà la messe est dite, regards équi­voques, rougeur sur les joues de Marie qui petit à petit est gagnée par l’audace, qui s’isole avec Badi », encou­ragée par ses cousines, et tout le monde évidem­ment joue avec le feu parce que l’on sait très bien que le mariage de Badi » et Marie est impos­sible. Mais on s’amuse, on élabore des scéna­rios, on essaie de les faire exister, la vie pour un moment est comme un roman.
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Dans la voiture, elle se mettait en colère et marmon­nait dans mon dos contre son frère qui lais­sait faire, qui donnait son accord pour que fussent inhumés là une vieille femme ou un vieillard trépassés simple­ment parce qu’ils s’appelaient Hayek . « On n’est plus entre nous, ni sur nos terres ni en dessous » grommelait-​elle.
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Nous vivions dans une époque complexe et difficile, la roue des jours tournait comme la pierre de l’affûteur, grinçante et en même temps joyeuse, brûlante et pourtant étincelante, et lui, mon patron, était ainsi, difficile et resplendissant, dur et pourtant capable d’une générosité plus que royale.
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C'était aux confins des steppes, ils roulèrent des heures sur des pistes, alors qu'au loin les premiers monts pelés de ce qui toujours plus à l'est devient l'Himalaya dessinaient d'étranges arêtes que le soleil teintait de vermeil et de pourpre. On était au printemps, me rappela-t-il, et, outre les champs de coton et la blancheur de leurs récoltes, le paysage aride était couvert de coquelicots à perte de vue. Des cavaliers surgissaient, creusant des sillons dans ce tapis sang et neige, et venaient vers eux au galop...
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C’étaient la grandeur symbolique des Hayek et le souvenir d’un monde gouverné par son père qu’elle avait chevillés au corps, dont elle se voulait le dernier défenseur, et non pas la matérialité de cette grandeur ni ce qu’avait fait Skandar au jour le jour pour la maintenir.
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Les bonnes étaient blêmes, tout tremblait autour de nous, on s’entendait à peine, et nos corps pour se mouvoir devaient lutter contre le vacarme, comme contre une marée montante qui submergeait tout. Moi, je tentais malgré les protestations d’aller vers la porte d’entrée pour comprendre ce qui se passait, je l’ouvrais et, à plat ventre, j’essayais de regarder dehors. Le vacarme redoublait mais je ne voyais jamais rien, sinon le rebord de la rambarde du perron où je m’asseyais d’habitude. Je me redressais un peu, la fusillade se poursuivait mais ce n’était pas dans notre rue, car du côté du portail tout était parfaitement immobile. Et puis, aussi brutalement que cela avait commencé, tout cessait, et le silence s’abattait, monumental, spectaculaire.
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Ce qui n’empêcha pas Mado de sortir de ses appartements à l’étage, où elle s’était retirée depuis le début des folies de son neveu, et d’exiger que l’on mît finaux agissements de Noula. En tant que tante, elle n’avait aucun pouvoir sur le personnage, amis elle pensait que sa mère en aurait. Or cette dernière resta de marbre, puis déclara sèchement face à l’insistance de sa belle-sœur qu’elle n’avait nul moyen d’agir. Mado aurait pu alors mettre le feu aux poudres, déclencher les hostilités bien avant le temps où le destin semblait en avoir fixé l’échéance, mais elle se tut, elle n’ajouta rien, sauf qu’assurément elle devait penser que le refus d’agir de Marie était volontaire, qu’elle contribuait sciemment par son silence à la faillite des Hayek, à la destruction de leur patrimoine, que c’était sa revanche. Peut-être même était-elle persuadée que tout cela ne venait pas du sang des Hayek mais de la part étrangère qui s’y mêlait dans les veines de Noula. Mais elle ne dit rien, le temps n’était pas encore venu, même si tout son être parlait pour elle, ses regards indignés, sa raideur, sa maigreur pythique et ses marmonnements.

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Mais nul ne sait où s’arrêtent l’envie et le désir de puissance, et Noula, qui était timoré et faible, se rêvait comme un conquérant alors qu’il n’avait d’autre qualité que celle de posséder l’argent nécessaire pour faire non des conquêtes mais des bêtises. Et c’est ainsi qu’au bout de quelques mois, et comme s’il s’était promené dans l’usine qu’il voyait pour la première fois et l’avait trouvée vieille et poussiéreuse, il décréta qu’il fallait évacuer tout ça, ajoutant qu’il allait tout remplacer par de nouvelles machines allemandes, des Köber. Il ne cessa plus de faire l’apologie de ces dernières dans les salons, auprès de sa parentèle et des autres industriels qui le regardaient d’un air narquois, et aussi auprès des femmes de la maison Hayek, qui pour la première fois levèrent des sourcils inquiets. Elles n’y connaissaient pas grand-chose, certes, Mado et ma patronne Marie, mais elles avaient tout de même vécu dans le culte des traditionnelles tisseuses, les Monfort et les Gladbach, elles avaient vu les ingénieurs étrangers venir les ausculter, elles avaient entendu les louanges qu’on en faisait et avaient compris que la fortune des Hayek depuis au moins un demi-siècle s’était construite sur ces noms vénérables. Elles furent effrayées par les décisions intempestives que Noula leur exposait lors des repas qu’il venait prendre chez nous à midi et à l’occasion desquels Jamilé lui mitonnait ses plats préférés. Il riait des craintes des femmes et avait l’air si confiant qu’elles durent se dire que c’était la peur du changement qui les inquiétait et sourirent alors complaisamment au garçon. Lorsque j’entrais à la fin des repas, je les voyais tous détendus et cela m’agaçait. L’aveuglement des deux femmes me rendait malade et je ne pouvais même pas en parler avec Jamilé, qui aimait Noula, et considérait ses décisions comme la sagesse même.
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Si les problèmes étaient chaque fois réglés, le patron n’en sortait pas moins épuisé. Mais, tout cela, je crois qu’il le faisait parce que ainsi il demeurait au courant des affaires, et pouvait protéger ses terres, ses biens et l’usine. Et aussi pour que le monde tel qu’il l’avait connu puisse durer le plus longtemps possible, alors qu’il devait bien se douter que les changements étaient inéluctables. Si bien que, quand j’y pense aujourd’hui, j’ai cette impression que si notre univers a en partie résisté encore quelques années, c’est grâce à lui. Il tenait les fils de notre destin entre ses mains et tant qu’il tint bon, tout tint, les choses continuèrent de tourner, avec la maison au centre, et le monde autour, avec l’usine qu’il gérait patiemment, avec les orangers et les pins, avec les cueilleurs di pignons perchés au sommet des arbres, avec le va-et-vient devant le portail, avec les bonnes qui passaient la serpillière pieds nus et en chantant à tue-tête quand les patrons étaient absents, avec les lubies de Mado, avec l’élégance de la patronne et avec l’excitante présence de Karine, qui, comme toutes les filles de son milieu, était surveillée attentivement, à l’instar de la fille d’un prince promise à quelque altesse et qu’il faut protéger du monde, autorisée à tous les caprices à l’intérieur mais très peu en dehors.

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Il se rendait parfois en ville, d’où il nous envoyait des lettres qui parvenaient des mois après. Il lui arrivait aussi de téléphoner, parlant tantôt avec sa mère, tantôt avec Mado, et même une fois avec moi et j’étais si ému que je ne sus quoi lui dire à part des sottises. Après quoi il partit sur des rafiots en bois pour écouter la parfumerie de son associé, il poussa jusqu’à Zanzibar, me dit-il, et lorsqu’il me le raconta je ris de ce nom que je prenais pour un pays inventé dans les vieilles légendes, et aussi jusqu’au Mozambique, un pays que j’imaginais riche et bariolé à cause des mosaïques qui résonnaient dans son nom. Il tira au revolver contre des pirates d’un bord à l’autre de vieux navires, et des maquisards noirs lui apprirent à utiliser la kalachnikov sur une immense plage au large de Lourenço Marques où le bruit des vagues couvrait le fracas des mitraillades. Il rencontra dans un port un marin somalien qui n’avait que trois doigts et qui prétendait avoir joué les autres aux cartes à Colombo, et il fit de la moto sur les digues du port d’Aden, dans un side-car sur lequel son compatriote se tenait en équilibre, debout, les bras en croix, heureux de son commerce florissant et de la fortune qu’il était en train d’amasser
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