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sur 83 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je remercie Babelio et les Editions du Seuil pour le dernier roman de Pascal Manoukian « le cercle des Hommes ». Roman d'aventure, il se révèle avant tout un vibrant conte écolo mettant en exergue les excès et dérives de notre société de consommation d'aujourd'hui. Je suis ravie de voir qu'une très grande majorité d'autres lecteurs l'ont aimé tout autant que moi.
Pour se rendre à un rendez-vous d'affaire, un riche industriel français survole l'Amazonie à bord de son avion. Il a un accident et s'écrase en pleine forêt, pas loin de la tribu d'indiens, les Yacou. Leur survie est menacée par l'exploitation et le défrichement de leur forêt. Ne le reconnaissant pas comme un homme, mais comme une « chose » tombée du ciel, ils le font prisonnier et le jettent dans un fossé parmi les cochons sauvages. Commence alors pour le français Gabriel une lutte au jour le jour pour se faire reconnaitre et accepter en tant qu'homme, bien décidé à se sauver et retrouver sa compagne Marie. Tentative bien difficile alors que tout les oppose. Alors même que la définition de l'homme les oppose. Parce qu'en plus de la langue, c'est toute une culture, une mentalité, des règles de vie qu'il va découvrir et devoir comprendre et assimiler. Une vie de frugalité, nus, parmi la nature, en respect avec la nature. Tant de règles si loin de son (de notre) monde, pour ne pas dire en complet décalage avec nos habitudes et comportements de sociétés dites « civilisées ».
Tous les matins, les Yacou régurgitent ce qu'ils n'ont pas digéré pour rendre à la terre et la nourrir comme elle les a nourrit. Tous les soirs, ils votent pour élire le chef du lendemain. Chaque matin, ils énoncent la couleur du vert qui prédomine autour d'eux et qui constituera leur journée plus ou moins active et enjouée. Ils respectent et remercient tout ce qui les entoure, la faune et la flore qui font partie de leur vie. Dès qu'il y a une source de désaccord entre eux, ils parlementent, discutent et votent. Chacun ensuite respecte ce vote, sans broncher (ou presque). Ils sont huit dans cette tribu et pas un de plus, car ils ont appris depuis des générations qu'être trop nombreux engendre des problèmes de survie et de conflits. D'ailleurs, une autre règle vitale est de ne jamais sortir du cercle dans lequel ils vivent pour leur sécurité et leur survie...
Autant de règles étonnantes pour nous, occidentaux et pourtant certaines sont si logiques, pour ne pas dire sensées et évidentes. le seul passage sur la recherche du miel nous ouvre un peu les yeux sur notre propre habitude de consommation facile, jetable... Quelle claque pour nous ‘'super-consommateurs'' ayant perdu conscience et morale (pour ne plus penser que profit et réussite) !
Chaque fois que je découvrais une de leurs « lois » et traditions, j'étais amusée, interloquée. Quelle étonnante imagination et conception de vie que cet auteur nous propose tout au long de ce roman ! Comme si, à chacun de nos problèmes et excès que connait notre civilisation occidentale, Manoukian avait soupesé les différentes solutions et choisi celle justement tellement opposée à nos habitudes, celle justement qui pourrait sauver encore notre planète avant que tout implose par notre inconscience et inconsistance. Dans ce roman, Gabriel est chacun de nous, français, européen, occidental. Loin d'être un ange tombé du ciel, il est notre miroir. A chaque page, nous sommes forcés de nous regarder bien en face, de réaliser ce que nous sommes, ce que nous sommes devenus, cherchant à posséder toujours plus, encore plus. Il nous représente, nous, ces humains individualistes avec des ornières.

On veut l'IPhone dernière génération, qu'importe son prix exorbitant, qu'importe sa durée de vie, qu'importe ensuite qu'on soit fliqué par des Big Brother, qu'ils connaissent nos comportements et nous géolocalisent, qu'ils nous proposent ensuite -lorsqu'on navigue sur internet- les produits qui nous correspondent et qu'il est bon de posséder. Ils le savent mieux que nous-mêmes, mieux que notre mère.
On veut le dernier jean, qu'importe s'il a parcouru pour cela des milliers de kilomètres. Faut avouer qu'il est trop bien, ça nous fait une belle paire de fesses quand même. J'ai réussi à l'acheter pendant le black Friday, j'avais loupé l'occas' lors des dernières soldes et des ventes privées. Et ce tee-shirt à 10€, il me tente bien aussi. Bon, j'en ai des tas entassés dans mon placard un peu pareils, mais celui-là, non quand même, il change des autres. Je sais qu'il est pas cher parce qu'il a été conçu par des petites mains asiatiques, peut-être très jeunes ou surexploitées. Mais, j'vais quand même pas acheter un tee-shirt qui vaut le double ou le triple parce que dit « écoresponsable » (je viens de m'acheter le dernier Iphone, soyons raisonnables, voulez-vous) et faut bien que les petites-mains vivent aussi. Je vais couper l'étiquette et oublier vite fait d'où il vient. Et il fera super bien avec mon jean.
Si on remet un peu les choses dans leurs contextes pratiques, quand je consomme, que je sors ma CB, je ne suis pas égoïste, c'est ma façon à moi de penser à l'économie française, au PIB, au taux de chômage. Les français économisent trop, c'est un fait. Heureusement avec la baisse du taux d'intérêt du livret A, espérons qu'ils se mettent à dépenser plus et arrêtent de s'inquiéter pour le lendemain. Si je garde mon super jean comme exemple (je sais, je focalise un peu trop dessus, mais ça passera avec le prochain), en l'achetant, j'oeuvre pour mon pays. Y'a pas à dire, il est top, mon jean. Je me sens hyper bien dedans.
Les émissions télévisées pour sauver la planète se multiplient et y'a plus vraiment de bons films sur les chaines tv (heureusement Netflix et Amazon sont là pour nous sauver de ce gouffre). Les scientifiques nous martèlent qu'il faut agir vite contre le réchauffement de la planète Terre, notre mère nourricière. Ils nous parlent de la fonte des glaces (J'en sais rien, j'suis jamais allée au Pôle Nord mais j'ai vu plusieurs fois « L'âge de glace »), des animaux et de tout l'écosystème en danger et tout le tralala. Certains écrivains de littérature blanche ou noire se mettent même à écrire des essais sur ce sujet (Fred Vargas avec « L'humanité en péril » pour ne citer qu'elle).
La jeune militante Greta Thunberg, élue personnalité de l'année 2019 par le magazine Time (et qui n'a rien à voir avec Adamsberg), est souvent citée dans les média. Certains hommes politiques se moquent d'elle et la fustigent et sont critiqués pour cela. Sérieusement, il faudrait arrêter d'ennuyer les politiques, tels que les sénateurs, à propos de leurs avantages financiers et leur retraite dorée. Rappelons qu'ils n'ont pas été élus pour ça mais parce qu'ils pensaient d'abord à leur pays. Eux, en plus de leurs longues études, ils ont pas mal bourlingué, sont bien au fait du système et connaissent quelques lobbyings fichtrement intéressants. Parce que, faut pas se mentir, la p'tite Greta de 17 ans avec ses petits yeux de cocker, ça finit par être assez agaçant, voire flippant. Elle ne pourrait pas sourire de temps en temps ? Ok, le monde va mal et tourne à l'envers. Mais est-elle vraiment obligée de faire une tête de quatre mètres de long et nous plomber le moral ?
Et, d'ailleurs, elle veut que je fasse quoi de plus ? J'en fais déjà pas mal, j'trouve, sûrement plus que la moyenne, j'ai ma conscience tranquille. Je fais mon tri hebdomadaire, je ne prends plus que des douches, j'ai réduit ma consommation de viande (je suis au courant que les cochons, en bout de chaine, créent les algues vertes sur nos plages ; que pour nourrir les vaches ça nécessite beaucoup d'eau et, en plus qu'elles pètent et sont en partie responsables du réchauffement climatique, sans parler des poulets maltraités), j'ai arrêté la pâte à tartiner avec huile de palme, et j'ai même limité ma consommation d'alcool, c'est dire...
Même les industriels s'y mettent et surfent sur les produits plus écolo, avec plein de labels environnementaux dessus, tous sains, tous beaux. Et même si on ne comprend toujours pas grand-chose à toute la liste des ingrédients, le label est là pour nous rassurer et surtout pour donner une bonne image du produit (et de l'industriel)…
Dans une récente émission, j'entendais que le 1/3 des ‘'produits'' issus de l'agriculture n'arrivait jamais dans nos assiettes parce qu'ils ne « respectaient » pas les normes imposées (et que des tonnes de pommes-de-terre trop grosses ou au mauvais calibre sont jetés par les agriculteurs). C'est sûr que pour finir en purée, j'aime bien qu'elles soient jolies et respectueuses, mes patates. Un quart ou plus des produits dans les supermarchés sont ensuite jetés car non achetés avant la date de péremption. Et, si on continue, une bonne partie de notre caddie finit aussi à la poubelle (yaourt périmé ou tristes carottes oubliées). Et entre temps, les assos caritatives essayent de se faire entendre pour dire qu'il y a de plus en plus de précaires et de moins en moins de dons… On marche un peu sur la tête, mais heureusement, on a de la chance, on est du bon côté…
Parce que, forcément, on peut pas s'occuper de ses belles petites fesses coincées dans son jean tendance, ou encore être ‘'plongés'' dans les réseaux sociaux où on a des tas d'amis virtuels et en même temps penser aux autres qu'on ne connait même pas. Ma mère m'a toujours dit de faire attention aux gens que je ne connaissais pas. (Ah, mais, j'avais pas vu ce super tuto qui m'explique comment bien me maquiller et me coiffer ! Hé, mais, c'est quoi son vernis à cette influenceuse ?! Je veux le même pour mon Noël !!...).
Durant l'hiver, plusieurs soirs de suite, j'ai vu des CRS et des membres de la sécurité de la RATP, alors qu'il faisait froid, déloger et obliger les SDF à sortir des métros. le CRS à qui j'ai demandé pourquoi ils ne s'occupaient pas d'abord des bandes de dealers à la gare St Lazare, m'a répondu qu'il n'était pas fier mais que c'était les directives. C'est sûr, ça fait plus propre... Les sans-abris dans Paris, ça casse un peu l'image d'Epinal de la plus belle des capitales. Pourtant le constat s'impose sous nos yeux : des hommes et des femmes, de tout âge, de toute nationalité, étaient de plus en plus nombreux dans la rue. Alors nous, nous marchons vite le soir, on détourne les yeux, on rentre vite dans notre logement pour préparer le dîner, en produits bio ou produits industriels qui facilitent notre quotidien.
Lors du dîner, on se dira « bon appétit » parce que c'est poli ou après, ça nous arrivera de dire « J'ai trop mangé » ou encore un « Tiens, il serait temps que je me fasse un petit régime » (cool, y'a des sociétés comme j'aime bien qui nous proposent des menus diététiques vite fait bien fait et nous garantissent de perdre dix kilos en deux mois et sûrement pour pas beaucoup plus chers, -ou si peu- qu'un repas standard qu'on aurait préparé soi-même, comme si on avait le temps avec notre rythme de vie effréné, ils nous font rire avec leur limitation de vitesse à 80 km/heure).
Et on s'installera dans notre canapé pour regarder un film sur notre TV Ecran extra large pour vite oublier ces images de la réalité. Et si une petite image désagréable nous harcèle encore sous les yeux, (oouhh, la méchante image qui fait mal aux yeux) on n'aura qu'à se rassurer en se disant qu'il y a au moins un mal pour un bien : ok, ils n'auront pas plus de patates mais avec le réchauffement de la planète, y'aura moins de SDF qui mourront de froid l'hiver (y'a qu'à voir ces records de température en janvier, ça donne du baume au coeur quand même, j'en parlais encore l'autre fois à ma voisine)… Enfin bon, j'dis ça, pas sûre que ce soit la solution. Déjà, on ne sait plus quoi faire de nos vieux, la population vieillit, les Ehpad se multiplient plus vite peut-être que les abeilles qui meurent.
Au moment des fêtes et des soldes, des opérations spéciales (pour la St Valentin, la fête des mères, la fête des grands-mères, Pâques, les vacances d'été, la rentrée, Halloween, Noël, j'en oublie ?), les boites aux lettres sont gavées comme des oies de prospectus sur toutes les bonnes affaires à ne pas manquer. Prospectus qui finiront en un rien de temps à la poubelle, dans le meilleur des cas dans la poubelle jaune… Tant pis si les forêts brûlent. Si le poumon de la mère Terre commence à ressembler à un poumon de gros fumeur de cinquante ans. Elle est plus vieille déjà, notre planète, elle a de la chance. Et tout a une fin, faut pas se leurrer, même les plus belles histoires d'amour.
A la télé, des dizaines de reportages évoquent l'évasion de Carlos Goshn. Ça change de Kim Kardashian ou de l'affaire Halliday. Y'aura sûrement un film sur la rocambolesque évasion de Goshn, sa personnalité atypique qui a gagné des millions et dépensé tout autant. D'accord, il a les dents longues, il se la joue un peu perso, il est dans son monde à penser que tout lui est dû, mais il est quand même très intelligent, il a réussi et est donc bien plus captivant que le quotidien de ces ouvriers à la chaîne de chez Nissan ou Renault qui peinent sous le labeur (CQFD). On parle déjà d'eux quand même avec les gilets jaunes, surtout quand ça pète et que ça flambe.
Et tant pis si, du coup, aux informations, on a vite oubliés (voire on passe sous silence) l'Amazonie qui brûle, les ours polaires, les guerres, les famines, les pays qui souffrent de sécheresse.
C'est moins glamour, ça nous empêche de digérer notre repas un peu lourd. Sinon, au pire, on a encore la possibilité de zapper car c'est trop triste, on a déjà assez avec nos problèmes, merci ça va bien, on ne peut pas porter toute la misère du monde sur nos épaules, j'ai déjà mal au dos.
Et puis moi, dans 20 ou 30 ans, la planète, peut-être que je ne la verrai plus, car je me serai fait écraser alors que je voulais attraper un bus, abimant au passage mon super jean que j'adorais (ch'uis dégoûtée), rongée par le crabe ou encore lobotomisée par la maladie d'Alzheimer. On nous a rabâché du « Carpe Diem » à toutes les sauces, fredonné Hakuna Matata, on nous a rappelé d'apprendre à profiter des petites joies du quotidien… Et maintenant faudrait que je pense à dans 20 ou 30 ans parce que la planète risque de ne plus supporter nos excès ? J'ai déjà mon cerveau qui fume à essayer de calculer le montant de ma retraite, alors, à force, ça risque de faire un trou dans la couche d'ozone.
Et puis si ça se trouve dans 10 ans, on aura trouvé une autre planète où aller vivre, suffira juste d'un long voyage en fusée et elle sera super aussi, la nouvelle planète. Alors qu'est-ce qu'on s'inquiète ?
S'il est très différent du précédent roman que j'avais aussi apprécié (« Ce que tient ta main droite t'appartient » qui traitait de Daesh), à bien y réfléchir, on trouve dans le dernier roman de Manoukian des thèmes récurrents sur l'identité, la différence, le respect entre les sociétés, l'humain (le pire et le meilleur) pour ne pas dire l'humanité.
J'ai trouvé que ce récit était un formidable plaidoyer écologique. Bien écrit, imaginatif, intelligent, sombre, qui n'empêche pas des passages très drôles. Je suis passée par toutes les émotions durant ma lecture. Qui plus est, il a su réveiller notre conscience durant quelques heures. C'est déjà pas mal. Forcément, on s'est senti égoïstes, individualistes, appartenant à cette société consumériste complètement folle, capable de détruire les terres des voisins d'à côté (parce qu'on ne va quand même pas se contenter de saccager uniquement nos champs ou la Méditerranée), juste pour notre petit plaisir personnel pour se croire vivre et importants, capables de s'autodétruire sans à peine s'en rendre compte. C'est à se demander qui sont les vrais sauvages et les êtres intelligents qui ont su se développer dans l'histoire.
Et au fur et à mesure qu'on tournait les pages, on s'est promis de faire un petit quelque chose pour changer un peu les choses, interpeler les politiques, voter vert aux prochaines élections ça fera les pieds aux autres, boycotter certaines entreprises, changer notre modèle économique, notre façon de consommer, notre mentalité d'énorme autruche occidentale. le tout est de ne pas les refermer aussi vite les yeux, une fois le roman terminé.
Et si, pour les prochaines bonnes résolutions des prochaines années, on se décidait à ajouter d'office une autre activité à notre liste ? En plus de faire un peu de sport, d'apprendre le suédois, pourquoi n'ajouterions-nous pas celui de consommer moins et surtout consommer mieux ? de faire un acte altruiste (un don, une heure de bénévolat, un geste écolo supplémentaire, limiter nos achats sur des sites de multinationales, que sais-je) ? Un p'tit quelque chose qui nous rendrait fier et nous donnerait un peu le sourire ?
Malheureusement, on ne peut pas toujours être de grands sages, impliqués et humanistes, verser toutes ces larmes de crocodile, se sentir coupables à chaque seconde, se dire que ce qui se passe dehors (d'autant plus, si ce n'est pas direct' sous nos fenêtres) nous concerne.
Faut que je pense aussi un peu à moi, sinon je vais péter les plombs. Comme j'ai été bien occupée à faire les soldes (j'ai pu enfin reprendre le métro après des semaines de galère et rattraper un peu le temps perdu), il me reste encore à regarder les derniers épisodes de la série qui cartonne en ce moment... C'est une série d'anticipation post-apocalyptique, un truc qui pourrait se passer soi-disant dans une cinquantaine d'années ou moins. C'est parfois un peu tiré par les cheveux, c'est vrai, mais les effets spéciaux sont incroyables de réalisme. Pas sûre que ça se finisse bien mais ça change des bouquins ou des films à l'eau de rose, pas plus crédibles d'ailleurs…
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Contraste entre une tribu amazonienne fictive et un PDG de grande entreprise.

Il s'agit d'une tribu de chasseurs-cueilleurs qui vivent en petits cercles, n'ayant aucun contact avec d'autres peuples. Ce sont des nomades qui n'ont pas d'écriture, mais vivent en harmonie avec la nature, dirigés par les traditions et les visions de leur « ancêtre ».

En parallèle, la vie d'un riche dirigeant d'entreprises du 21e siècle. Entre deux réunions, aux commandes de son avion, il survole le territoire brésilien, les zones de déforestation et de cultures intensives.

Les deux trames se rejoignent quand le PDG passe au-dessus d'une jungle inconnue et que, pour des raisons inexplicables, son aéronef s'écrase. Il sera recueilli par la tribu, même si ceux-ci auront bien du mal à voir en lui un homme. Peu à peu, les relations changeront et le PDG réfléchira sur ses valeurs et sur ce que c'est que la « vraie vie ».

Une fable écologique qui fait intervenir aussi bien la magie et les voyages mentaux, que les discours sur le bonheur du « paradis perdu ».
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Sans doute, lorsque les discours tombent dans le vide, quand les études scientifiques sont ignorées, les individus centrés sur des problèmes qui semblent si minimes par rapport aux vrais risques, oui, sans doute faut-il prendre de la distance, changer d'angle de vue et sortir des chemins balisés. C'est le grand pouvoir du romancier, par la magie de la fiction que de tout renverser. Mettre un grand coup de pied dans la fourmilière humaine où s'agitent des êtres qui semblent avoir perdu le vrai sens de la vie - si tant est qu'ils l'aient jamais effleuré. Pascal Manoukian ose. Non seulement s'éloigner considérablement de l'univers de terrain de ses trois précédents (et plus que convaincants) romans, mais prendre le risque de déstabiliser ses lecteurs anciens ou nouveaux. Et ça, moi, j'adore !

Direction l'Amazonie où l'auteur nous rejoue d'abord une version revue et corrigée du Petit Prince en provoquant le crash d'un petit avion privé au coeur de la forêt amazonienne, sur le territoire d'une tribu d'Indiens isolés. le pilote, Gabriel est un homme d'affaires plus habitué à la jungle de la City qu'à la survie en milieu hostile. Pour les Yacou, la question est tout autre : cette chose tombée du ciel est-elle un homme ou un animal ? On l'aura compris, il ne s'agit pas pour Gabriel de dessiner un mouton mais bien de convaincre les membres de la tribu de le sortir de l'enclos où il est enfermé avec d'autres animaux. Voilà, le décor est campé, maintenant, il faut lâcher prise, et faire confiance au talent de l'écrivain. Attention, le voyage n'est pas de tout repos, on alterne le chaud et le froid, le beau et le cru, la poésie du conte et l'affrontement du réel.

Il est ici question de notre terre, bien sûr. de notre rapport à la nature. de nos comportements destructeurs et suicidaires. Gabriel apprend une autre façon de vivre en harmonie avec les autres êtres vivants, végétaux et animaux, non sans douleur, vous verrez. Il y a des passages incroyables dans ce roman, notamment les scènes de clairvoyance de Gabriel, sous l'effet des drogues administrées par le chaman (100% naturelles, hein), totalement hallucinantes. On passe sans arrêt d'un mode faussement naïf du roman d'aventures dépaysant à la réalité de la laideur du monde. On peut compter sur Pascal Manoukian pour laisser au vestiaire les bons sentiments et ne pas éluder ce qui fâche. La tonalité est là pour nous le rappeler. Ce qui n'empêche nullement de prendre un réel plaisir en compagnie de cette tribu qui limite volontairement le nombre d'individus constituant chaque groupe pour un meilleur équilibre (pas fous...), commence chaque matin en riant et en définissant l'exacte tonalité de vert de la journée (et il y en a beaucoup), confie aux femmes le maniement des armes pour la chasse (beaucoup plus sûr) ou convoque des R.I.C (Rassemblement dans l'intérêt du clan) lorsqu'il y a un sujet à trancher. Un plaisir néanmoins obscurci par la menace que l'on sent planer sur ces modes de vie en voie d'extinction...

Pascal Manoukian puise dans la force des récits, la puissance des histoires pour tenter d'ouvrir les consciences. Je parlais du petit prince mais il y a aussi un peu de Barjavel par endroits ; tout ceci avec le regard que l'auteur porte sur le monde depuis de nombreuses années mais qu'il choisit ici de décaler, ce qui lui donne une force inédite. Et offre au lecteur, dans les traces de Gabriel, une immense matière à réflexion. Puisse-t-il réfléchir vite et passer à l'action.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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En plein coeur de l'Amazonie habite une poignée d'hommes, un peuple vulnérable, menacé par notre civilisation. Huit membres composent la tribu des Yacou. Des hommes et des femmes qui vivent dans le dénuement le plus total, totalement déconnectés du reste du monde et en parfaite osmose avec la nature.

Dans leur langage, les mots profit et pouvoir n'existent pas. Ils mènent une vie insouciante, au rythme des lunes, en communiquant avec les esprits. Tout n'est que partage et traditions ancestrales dans ce clan où seules les femmes peuvent porter des armes, où un seul mot suffit à désigner l'action de manger et de faire l'amour. 

Jusqu'au jour où Gabriel, PDG d'une grande compagnie minière, s'écrase avec son avion au coeur du territoire des Yacou. Cette "Chose qui pue" sème le trouble. Est-elle un homme ou bien un animal? C'est du fond de son enclos qu'il partage avec les porcs que Gabriel devra leur prouver son humanité. 

Une histoire qui met en avant le choc de deux cultures. Face à la mondialisation, à la technologie, aux choses superficielles qui obstruent notre quotidien, Gabriel va découvrir un mode de vie diamétralement opposé au sien, qui va complètement modifier sa propre vision de l'existence. Une vie frugale, sans inégalité, dans laquelle les hommes veillent à ne laisser aucune empreinte écologique derrière eux. 

Fidèle lectrice de Pascal Manoukian, ce dernier m'a une fois de plus bluffée. Avec un sujet radicalement différent de ses autres romans, il réussit un pari osé en nous immergeant avec talent dans la jungle tropicale.

Récit d'aventures flirtant avec le conte philosophique, l'auteur pose un regard aiguisé sur les travers de notre société.

Des propos forts, percutants qui poussent à la réflexion sur notre rapport à la nature, à la prise de conscience face à la déforestation, à ces populations indiennes exploitées.

Une lecture fascinante, dépaysante et absolument nécessaire afin d'ouvrir les yeux sur ce monde qui est le nôtre. 
Lien : https://mesechappeeslivresqu..
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Surprise dans un premier temps par le style de Manoukian que je ne connaissais jusque là qu'avec les échoués, il m'a fallu m'adapter à une description très fleurie. Malmenée par d'improbables communions entre les indiens et la nature qui ne font qu'un dans l'harmonie faune flore parfois un peu too much dans l'utopie, beaucoup de métaphores sexuelles fleuries, récurrences à souhait. Puis j'ai commencé à me décrocher de notre réalité pour entrer dans l'univers littéralement fantastique du début de roman, sortir des incohérences et de mes répères pour me laisser enfin porter naïvement par ce que je lisais. J'ai tellement apprécié les échoués, j'avais envie de découvrir tous les Manoukian ;-) C'est un nouveau monde que l'auteur nous présente et j'appréciai le découvrir loin de nos codes. En dernière partie de livre, nous comprenons un monde moins fantastastique qu'archaïque puisque la mise en comparaison est franche quant à nos vies contemporaines. La chute va être rapide, des raccourcis qui tranchent avec un début de roman long et langoureux. Des clés de compréhension capitaliste vs ecologisite qui ont surement values des qualificatifs de « véritable conte écologique ».

J'ai donc savouré certains passages. La poésie des repères pour indiquer non pas une heure de rendez vous, mais un moment où se retrouver : « quand tes jambes commenceront à te faire mal » «  quand ton estomac commencera à réclamer tu nous trouveras ». Ca a sauvé ma lecture désenchantée des 70 premières pages.
J'ai apprécié ma lecture pour l'auteur, pour les enchainements de mots bienvenus ensemble, mais au fond de moi je crois que ça ne suffira pas à marquer ma mémoire.
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Salut les Babelionautes
Curieux roman que ce livre de Pascal Manoukian que 'ai reçu lors de la première Masse Critique de l'année 2020.
c'est un grand plaidoyer écologique qui nous entraîne au coeur de la Forêt Amazonienne au sein d'une tribu qui tente de survivre a la déforestation que l'appât du gain inflige au poumon de notre belle boule bleue.
Gabriel est l'un de ceux la, sa vie se déroule au sein de conseils d'administrations ou seul l'argent est Roi.
Mais un accident d'avion va le projeter dans un milieu ou il n'a pas court, et c'est en remettant en cause tout ce en quoi il croit, qu'il va réussir a survivre.
D'abord la tribu qui l'a recueilli ne sait pas si il est un homme ou un animal, pourtant ils vont le soigner et le nourrir, puis il devra faire la preuve qu'il fait parti de l'Humanité.
Petit a petit il va devenir un membre des Yacous, et quand l'heure de revenir a la civilisation va sonner, c'est un drôle de choix qu'il va faire.
Vraiment en prise avec le drame qui se joue en Amazonie, ou chaque jour des espèces disparaissent, aussi bien dans la Faune et la Flore unique qui la compose.
le constat est dur a admettre, mais tellement vrai, l'Homme est le plus grand prédateur de notre planète, la seule qu'on est.
Merci aux éditions du Seuil et a Babelio pour m'avoir permis de découvrir un nouvel Auteur.
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Un coup de coeur bien amer !
« La forêt s'égouttait encore des larmes de la nuit. Parfois, racontait la légende des Yacou, le Soleil pleurait de se savoir enfermé dans le noir ».
C'est sur ces jolies phrases que commence le roman de Pascal Manoukian.
Chez les Yacou, tribu d'Amazonie, la journée débute par la cérémonie des chatouilles, pour apaiser les tensions de la journée à venir. Chez les Yacou, on n'écrit pas mais il existe 57 mots pour décrire chaque nuance de vert. Chez les Yacou, on vit par petites tribus de 8 parce que le mal surgit d'un nombre plus grand. Ayant expérimenté que la violence venait des hommes, les Yacou ont inversé les rôles : les femmes sont devenues les chasseresses et les hommes les cueilleurs.
Les Yacou ne savent rien de notre civilisation. Ils vivent en autarcie totale, très frugalement, des dons de la terre et des bêtes, font partie intégrante de la nature, sans se sentir supérieurs mais plutôt constamment redevables de ses bienfaits. Alors quand un jour, l'avion de Gabriel, un multi-millionnaire dirigeant d'une société minière, s'échoue dans la canopée, ce sont deux mondes qui s'entrechoquent.
D'abord pris pour une « chose », Gabriel est enfermé dans la fosse aux cochons sauvages et va devoir regagner son humanité dans un monde où la nature règne en maître.
Par les temps qui courent, il n'est pas inutile de se pencher sur « le mythe du bon sauvage », sans idéologie, de revoir notre rapport (très lointain) à la nature, de prendre le temps de réfléchir à notre société de consommation, du toujours plus, jusqu'à l'obésité. Sans caricature, Pascal Manoukian, en nous rapprochant de cette tribu grâce à une écriture très documentée et minutieuse, nous met devant notre incapacité à raisonner et notre tendance mortifère à la surconsommation, à la surpopulation et à la destruction. Il prend un malin plaisir à dézinguer certains travers de nos sociétés et notamment celui du pouvoir, l'infâme Bolsonaro en tête, celui qui regrette « que la cavalerie brésilienne ne se soit pas montrée aussi efficace que l'américaine en exterminant tous les autochtones d'Amazonie, incapable de s'exprimer dans une langue correcte, sans aucune culture, sous-occupant et sous-exploitant 13% du territoire national, qui serait bien mieux dans les mains des grandes compagnies » (oui oui vous avez bien lu, il a bien dit ça).
C'est un livre efficace, militant, sans manichéisme, un réquisitoire contre nos modes de vie absurdes, sur la vulgarité profonde de nos excès et de nos dérives. Un roman qui nous place face à nos responsabilités, car comme le disait Einsten (cité en exergue) « le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal mais par ceux qui les regardent sans rien faire ». Un livre qui secoue !
« Son monde à lui réduisait le temps, pensant le maîtriser. Les sandwichs avaient remplacé les repas, les tweets l'écriture, les mails la lecture, les week-ends selfies et bagages cabine les voyages au long cours. le temps ne s'étirait plus jamais, il se rétractait sans cesse, et avec lui la capacité de comprendre et de réfléchir, donc de décider. L'instantanéité prenait le pouvoir, on réagissait plus qu'on agissait, 24 heures sur 24, en direct, en 280 caractères, en nourrissant les réseaux de photos toutes plus inintéressantes les unes que les autres, en inventant des anti-langues sans grammaire ni orthographe, en réduisant les émotions à des petits visages jaunes, en préférant l'insulte à l'argument ».
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Le mythe du bon sauvage inversé: à la suite d'un accident d'avion, un patron de holding se retrouve au coeur de l'Amazonie, dans une zone isolée, peuplée d'une seule tribu composée de 8 personnes. Sans connaissance aucune d'un mode de vie autre que celui ancestral que cette tribu perpétue, la confrontation entre ces femmes et hommes d'un côté et ce naufragé des airs de l'autre est une ode à la liberté, au libre choix, à la nature. Sans aucun manichéisme, l'auteur nous amène à réfléchir sur le rôle de l'homme dans la nature et sa responsabilité vis-à-vis d'elle. Ce n'est pas un roman écologique pour autant mais plutôt une réflexion globale sur l'Humanité.
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Alors qu'il survole d'un air conquérant l'Amazonie, Gabriel, pdg français d'une grosse exploitation forestière, s'écrase en pleine forêt, sous une attaque surréaliste de Aras. Un indien de la tribu des Yacou le trouve moitié mort, carbonisé, défiguré, gonflé par ses blessures, recouvert de sang, de terre et de vermine. Les 8 membres de la tribu l'accueillent avec circonspection, ne reconnaissant pas en lui un homme mais un animal et il est jeté dans une fosse avec des cochons sauvages. Peu à peu, grâce à un fort instinct de survie, une volonté de fer et une grande capacité d'analyse, Gabriel retrouve des forces. Mais le monde dans lequel il a atterri, le Cercle des Yacou, est bien loin du sien et il va devoir se battre pour sa survie, pour redevenir un Dihab, un homme aux yeux des indiens, quitter la forêt et, qui sait, retrouver son ancienne vie, entre ses somptueux appartements de Paris et New-York, sa délicieuse épouse et ses comptes en banque pleins à craquer.

L'auteur saisit l'occasion du crash, en pleine forêt amazonienne, de l'avion privé de Gabriel, ce surconsommateur qui participe activement, entre autre, à la déforestation de l'une des trois plus importantes forêts vierges du monde, pour pointer l'inconséquence, la bêtise des Hommes. Il compare deux mondes, diamétralement opposés mais imbriqués, par la force de toutes ces "choses" créées par une certaine partie de l'humanité, et qui sont bien dérisoires.

Un livre que tout le monde devrait lire. Un roman farouchement écolo mais aussi profondément humaniste. Un coup de coeur ♥

Un auteur qui m'avait déjà touchée avec Les échoués. Ses autres romans sont sur ma table de nuit, prêts à être lus.
Lien : http://www.levoyagedelola.com
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Un voyage en Amazonie, une remise en question de notre de vie (qui se résume principalement à de la consommation).
Derrière les descriptions de la beauté de la nature, de la magie des interdépendances, le lecteur ressent l'angoisse d'une fuite en avant vers la catastrophe écologique.
Je regrette que l'auteur ne laisse pas plus souvent le lecteur se remettre en question seul.
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