La disparition du président

« Le président aura exceptionnellement un peu de retard aujourd’hui et vous prie de l’excuser ! » osa, d’une voix forte et assurée, le porte-parole du gouvernement, en s’adressant à l’assemblée qui commençait à prendre sa place réglementaire autour de la table. « Ah bon ? Où est-il ? Que fait-il ? Quand arrive-t-il ? » demanda en transpirant à grosses gouttes le ministre de l’éducation. « Il travaille sur un sujet très important qui lui prend beaucoup de temps… mais c’est vrai, tu n’es pas au courant… » répondit malicieusement la garde des Sceaux. Le Premier ministre s’assit, bailla, pris sa petite bouteille d’eau sur la table, l’ouvrit, attrapa son verre de son autre main, et en regardant attentivement ses deux mains se rapprocher pour opérer le transfert du liquide d’un contenant à l’autre, marmonna : « n’empêche, c’est pas son truc d’être en retard… pour une fois qu’il nous laisse souffler cinq minutes, c’est louche. » « Ah ! et bien je suis tout à fait d’accord avec monsieur le Premier ministre !! » renchérit la ministre de la santé et de la solidarité. Le ministre des affaires étrangères, quant à lui, attendait que chacun soit assis, que le brouhaha diminue afin de s’assurer d’avoir l’attention de tout le monde, et il interrompit le porte-parole du gouvernement qui tentait de rassurer l’assemblée par ces mots : « Mesdames, Messieurs, l’heure est grave. Je le sais de source sûre. Le président de la République a disparu ! »