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Citations sur Âme brisée (235)

Il posa son archet sur les cordes. Une minute recueillie, calme, sereine, profonde, d’une clarté transparente, s’éleva lentement dans le silence presque religieux que rien ne troublait, que personne n’osait rompre.
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Un silence absolu était tombé au milieu d'eux et se prolongeait. Rei, immobile comme une carpe au fond d'un bassin en hiver, ne les quittait pas des yeux. Enfin, Yu signala le départ avec un léger mouvement de tête qu'il amorça en respirant à peine.
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... elle interpréta de nouveau la pièce de Bach.
Les aigus sonnaient comme une longue enfilade de gouttes d'eau pure versées par un ciel bas et tourmenté, étincelant aux premiers rayons du soleil pénétrant obliquement les feuillages verdoyants d'une forêt boréale luxuriante, tandis que les médiums et les graves étaient comme ouatés, glissant sur une étendue de velours, suscitant une impression de chaleur intime émanant d'une cheminée de marbre restée allumée, toute la nuit.
Il y avait là, en plus, une saisissante égalité de timbres.
La musique avançait, revenait, montait, descendait avec une liberté euphorique ; elle faisait penser à une danse joyeuse et sautillante qui semblait exprimer le bonheur de marcher dans un paysage enchanté.
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Chacun devrait pourtant se définir d'abord et avant tout comme un individu au-dessus de toute appartenance. Je suis certes chinoise, je parle chinois, mais je ne voudrais pas qu'on me réduise à cela... Mon individualité est tout de même autre chose que ce qui est défini par le hasard de ma naissance.
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Rei avait fait du violon brisé l'objectif et la matière de sa vie.
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la musique est tellement incarnée qu'elle possède la puissance de rappeler les âmes du royaume des morts...
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Yanfen baissa le son de sa voix.
- Franchement, je suis indignée contre l'expansionnisme colonial de l'Empire japonais, mais je ne confonds pas pour autant les individus et l'État qui les incorpore. Dans le monde d'aujourd'hui, nous sommes inévitablement soumis à l'État. Chacun devrait pourtant se définir d'abord et avant tout comme un individu au-dessus de toute appartenance. Je suis chinoise, je parle chinois, mais je ne voudrais pas que l'on me réduise à cela... Mon individualité est tout de même autre chose que ce qui est défini par le hasard de ma naissance.
Absorbé par les propos de ses amis, Yu avait oublié son thé. Lorsqu'il vida sa tasse d'une traite, le thé était froid. En reposant sa tasse, il s'adressa à tous les trois, en caressant la main de son fils qu'il sentait sur son épaule.
- Je suis profondément touché parce que vous dites. Je préfère avoir des amis comme vous dans un pays ennemi plutôt qu'avoir une patrie détestable et des compatriotes rampants qui ne jurent que par leur appartenance à cette patrie. Je serai avec vous, je resterai avec vous, même si l'on m'accuse d'être un «mauvais sujet japonais», un «traître à la nation», un hikokumin.
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Jacques, à son tour, parla de son admiration pour les grands maîtres luthiers depuis Amati qui ont fixé une fois pour toutes le choix des bois utilisés pour la création des instruments à cordes : l'épicéa pour la table, l'érable pour le fond, le manche, les éclisses, le chevalet, l'ébène pour la touche, le cordier... Comme Hélène, il travaillait des bois qui sortaient d'une longue période de séchage naturel ; et il était fasciné, de même qu'Hélène l'était par la beauté de la courbe des archets, par l'élégance gracieuse des voûtes qu'il fallait réaliser sur le dos ainsi que sur la table d'harmonie afin de donner à l'instrument une capacité de vibration surnaturelle. Il fallait arriver à une parfaite maîtrise de l'outil approprié à chaque geste jusqu'à ce qu'il devînt une partie intégrante de ses deux mains. Cela demandait un effort constant et une patience infinie. Mais il ne se décourageait pas. Bien au contraire, il redoublait d'efforts en se persuadant que la somptuosité et la splendeur des sons l'attendaient au terme de tout ce long chemin.
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Le silence persiste. Je rouvre les yeux à moitié. Il se penche alors lentement, très lentement, comme s'il hésitait, comme s'il n'était pas sûr de ce qu'il faisait. Une tête d'homme, coiffée d'un képi de la même couleur que l'uniforme, apparaît devant mes yeux. À contre-jour, elle est voilée d'une ombre épaisse. Du bord du képi descend par derrière jussu'aux épaules une pièce d'étoffe également kaki. Les yeux seuls brillent comme ceux d'une chatte qui guette dans les ténèbres.
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Jacques Maillard, ou Rei Mizusawa, était un homme sans religion. Il ne croyait à aucune après-vie. Qu'est-ce qui resterait à l'extrême fin, à la fin de tout, de la civilisation, de l'humanité, de la planète, du système solaire ? Tout serait englouti, oublié, perdu. La vie ne serait-elle pas au bout du compte une gigantesque hécatombe ? Pourquoi alors en ajouter d'autres ? Pourquoi commettre la bêtise abyssale d'en fabriquer d'autres, celles, innombrables, que les guerres engendrent impitoyablement, celle des tranchées, celle des camps d'extermination, celle causée par les bombes qui pleuvent et qui vous déchiquettent, celle provoquée par les armes de destruction massive allant jusqu'à la bombe atomique brûlant et calcinant toute une ville dans la seconde, érigeant dans le ciel un hideux et diabolique champignon précédé de l'apparition soudaine, aveuglante, déflagrante de la lumière luciférienne ? Pourquoi tant de cruautés ? Pourquoi tant d'actes meurtriers atroces ? Mais, précisément, à cause de ces violences inouïes, de ces tueries irrémissibles qui empêchent brutalement de vivre et qui, par là même, génèrent un interminable défilé de fantômes, l'édification d'un autel était absolument pour Rei Mizusawa, un autel qui rendait d'abord et surtout son père assassiné et, ensuite tous les disparus qui l'accompagnaient de près ou de loin. Dès lors, son art de luthier, celui de rendre les sons de l'âme, de la vie intérieure, de la plus noire mélancolie comme de la joie la plus profonde - grâce aux compositeurs du passé et du présent et par la médiation des interprètes hors pair - à travers les instruments qu'il fabriquait après tant d'années d'apprentissage, de tâtonnement, d'hésitation, de recherche, après tant d'efforts déployés dans l'étude patiente et passionnée des grands modèles des maîtres anciens, après surtout une vie entière passée, en compagnie du violon de son père au demeurant assez ordinaire, à réparer, à restaurer et à soigner... son art, donc, entièrement dévoué au service des émotions humaines, n'était rien d'autre que la tentative d'apaisement de la douleur traumatique issue de la destruction foudroyante de ce qui vous attache le plus intensément au monde et à la vie.
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